Ennahj Addimoukrati continue de gérer un lourd héritage, en attendant sa légalisation politique. Ennahj Addimoukrati a vu le jour en 1995, ses initiateurs le présentant volontiers comme «une continuité politique et intellectuelle de l'expérience du mouvement marxiste-léniniste marocain». Une continuité qui a valu à Ennahj le soutien des militants et sympathisants du mouvement marxiste-léniniste, mais aussi qui l'a placé sur un socle façonné par le capital «intellectuel, politique et militant», accumulé 30 années durant et devenu une sorte de référence politique d'un courant qui attend depuis 7 années maintenant qu'on lui ouvre les portes de la légalité politique. En attendant, toute la littérature d'Ennahj Addimoukrati, rejette la notion de clandestinité, mettant l'accent sur la qualité de « courant politique œuvrant publiquement », dans l'attente d'un « cadre politique légal ». Alors que la scène marocaine des droits de l'homme connaissait des développements positifs, des groupes de militants issus du mouvement marxiste-léniniste marocain, se trouvaient dispersés ici et là dans des organisations syndicales ou des droits de l'homme. La nécessité d'un nouveau cadre politique regroupant toutes ces potentialités s'est très vite fait sentir. De la lutte qui s'engagera alors entre différents courants, émergera Ennahj Addimoukrati qui clame son attachement au «projet socialiste authentique», aux « aspects rayonnants» de l'expérience marxiste-léniniste au Maroc, mais «sans sacralisation aucune» et en oeuvrant en permanence pour «assimiler et dépasser les erreurs». Ceci pour l'identité. Quant à l'action, on lui trace dès le début deux voies principales et indissociables. D'une part l'unification des forces attachées au socialisme et d'autre part l'unification de «toutes les forces démocratiques véritables» pour «faire face au Makhzen et contrer avec détermination le libéralisme sauvage». Ainsi, dès avril 1995 se rencontraient des militants et sympathisants de l'expérience «Ila Al Amam» pour discuter d'aspects organisationnels. Il est question alors d'une commission nationale de coordination, d'une ligne politique conductrice progressiste et de la publication du journal « Annahj Addimoukrati». Des rencontres nationales allaient se succéder, axées sur la discussion des rapports de la commission nationale de coordination, le façonnage de l'identité politique du courant, la recherche d'un cadre légal d'action politique et le positionnement par rapport à la situation du pays. Au volet politique, les changements requis concernent notamment «le démantèlement des organes makhzéniens de l'Etat », la restructuration du département de l'Intérieur et de l'appareil judiciaire, ainsi que l'élaboration d'une «constitution démocratique» consacrant les principes de l'élection, de la séparation des pouvoirs, de la liberté de constitution des organisations politiques, culturelles et autres et la reconnaissance des spécificités régionales. Des changements en l'absence desquels, le nouveau courant s'installait durablement dans une posture de refuznik à gauche de la Koutla.