L'etat d'urgence est plus palpable que jamais et le premier ministre israélien, les mains pleines de sang palestinien, déclare tranquillement que la guerre d'indépendance, à laquelle il a participé, « n'est pas encore achevée.” A 74 ans, Ariel Sharon joue dans la fureur et le sang (des Palestiniens) le dernier acte d'une longue vie de baroudeur, où l'obstination le dispute au cynisme et à la brutalité, voire à la cruauté. C'est lui qui a, pour la première fois depuis 1967, fait bombarder les Territoires palestiniens par des chasseurs F-16 de fabrication américaine. Premier « coup d'éclat » connu de Sharon : En 1953, il commande l'unité 101, qui riposte, derrière les lignes ennemies, aux infiltrations des fedayins. A Kibya (Cisjordanie), 69 personnes, dont 50 civils, sont tuées dans le dynamitage de leurs maisons. En 1971, il « pacifie » Ghaza à coups d'arrestations massives et de châtiments collectifs. C'est le Liban qui ternira durablement l' « honneur » d'Ariel Sharon, devenu ministre de la Défense de Menahim Begin. Manipulant le vieux chef du Likoud, de marchandages en demi-mensonges, il ourdit l'invasion du pays du Cèdre, fait bombarder Beyrouth, et « laisse » les milices phalangistes massacrer quelque 2000 Palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila. On sait qu'il directement supervisé le massacre depuis un terrain de football mitoyen. Une commission d'enquête israélienne le déclarera « indirectement responsable » de cette tuerie. Et, à propos du Liban, Sharon a un regret… Non celui de poursuivre le massacre des Palestiniens, mais celui de ne pas avoir « éliminé » Arafat lors de l'invasion israélienne de ce pays en 1982. La colonisation des territoires occupés fut et reste sa grande affaire. Dans les gouvernements de Menahim Begin, Yitzhak Shamir et Benyamin Netanyahou, il eut les mains libres pour encourager l'annexion rampante des territoires, en multipliant les faits accomplis. L'objectif était avoué : transformer la Cisjordanie en une peau de léopard, une région rapiécée, inapte à devenir un Etat viable. Sûr de son bon droit, dirigeant populiste autoritaire et incontrôlable, ouvertement méprisant pour les Arabes, arrogant jusqu'à la provocation –la dernière en date, sa visite « musclée » sur l'Esplanade des Mosquées, le 28 septembre 2000, a allumé la mèche de la deuxième Intifada. Une Intifada qui, lorsque devenu premier ministre, lui a été prétexte pour laisser libre cours à toute la barbarie dont il est capable. Ce qui n'est pas peu dire.