Le chef du gouvernement espagnol, Jose Luis Zapatero, entame, ce samedi, une visite officielle au Maroc. C'est la première du genre depuis son investiture. Cette visite suscite l'intérêt aussi bien des médias marocains qu'espagnols. De plus en plus, depuis l'investiture de José Luis Zapatero à la tête de l'exécutif espagnol, les observateurs parlent de l'ouverture d'une nouvelle page entre Rabat et Madrid. Et pour cause, le nouveau président du gouvernement ibérique n'a pas rompu la tradition selon laquelle la première visite officielle du chef de l'exécutif est effectuée au Maroc. Samedi, Zapatero sera l'hôte du Maroc. Il sera reçu par SM le Roi Mohammed VI et par le Premier ministre, Driss Jettou. Plusieurs activités sont prévues lors de son séjour au Maroc. Le Maroc officiel et populaire porte un intérêt particulier à l'Espagne et à Zapatero. Les médias également. Le même constat est fait de l'autre côté du détroit. Pas moins de 70 journalistes, représentant tous les médias espagnols, feront partie de la délégation accompagnant Zapatero au Maroc. A ceux-là s'ajouteront environ trente correspondants locaux. Zapatero recevra certes, les honneurs dus à tout chef d'Etat en visite au Maroc. Mais celle-ci a véritablement un tout autre goût. Cette visite n'est pas celle de la réconciliation, car le Maroc n'a jamais été en froid ni avec Zapatero ni avec son parti, le PSOE. L'ancien secrétaire général du parti socialiste espagnol, Felipé Gonzales, a été, et reste toujours, un fidèle ami du Maroc, au grand dam des conservateurs du parti populaire. La visite de Zapatero sera, en fait, celle des retrouvailles. Huit ans durant, la crise entre les deux pays a atteint des niveaux extrêmement dangereux. José Maria Aznar, l'ex-homme fort d'Espagne, a même commencé à chauffer les machines de guerre pour se lancer à l'assaut du Maroc. Aucun dossier politique n'a été épargné par l'animosité aznarienne à l'égard du Maroc: Sahara, immigration, pêche, coopération euro-méditerranéenne… Mais aujourd'hui, Aznar le va-t-en-guerre s'est éclipsé en faveur de Zapatero le non-violent. L'homme qui hait le Maroc a cédé ainsi sa place à celui qui représente l'Espagne que nous aimons. Les messages de Zapatero à l'égard de son voisin du sud n'ont pas manqué. Déjà, en pleine crise aznaro-marocaine, en décembre 2001, Zapatero s'est rendu à Rabat, en sa qualité de secrétaire général du PSOE. SM Mohammed VI l'a reçu. Il y a quelques semaines, lors de la campagne électorale en Espagne, l'actuel ministre des affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos a estimé, concernant la solution au conflit au Sahara, que "le meilleur moyen est de faciliter l'élaboration d'un accord politique, et pour ce faire, il est nécessaire de baliser le terrain, parler aux parties concernées et mobiliser les principaux acteurs, parmi lesquels la France et les Etats-Unis". Cette déclaration augure d'un changement de position espagnole concernant cette affaire. Comme le Maroc, l'Espagne n'a aucun intérêt à ce que ce conflit artificiel perdure. Cela pourrait déplaire aux militaires algériens qui ont réussi à "acheter" la complicité d'Aznar à coups de juteux contrats au profit de certaines firmes espagnoles. Mais ces considérations purement mercantiles sont les derniers soucis de Zapatero. Nous l'avons constaté dans l'affaire de l'Irak. L'Espagne de l'après-Aznar, pourtant toujours un membre de l'Otan et un allié traditionnel des Etats-Unis, n'a pas hésité à rappeler au bercail ses troupes stationnées en Irak. Zapatero a fait preuve d'un courage unique en refusant de faire la guerre à l'Irak en compagnie de l'Oncle Sam, l'hyperpuissance mondiale incontestable. Ce ne sont pas quelques généraux sanguinaires en Algérie qui diront le contraire. En somme, il est quasiment certain que les relations, entre Rabat et Madrid, vont entamer un nouveau tournant. Tous les dossiers prioritaires, notamment l'affaire du Sahara et l'immigration, seront réglés rapidement. Pour ce qui est des affaires beaucoup plus sensibles telles que Sebta, Melilla et les îles occupées, leur traitement sera effectué de manière sereine, civilisée, loin des récupérations politiciennes chères à José Maria Aznar. Rabat et Madrid vont également unir leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme. Un fléau qui a touché les deux pays. Les Marocains installés en Espagne ont une chance inouïe. Alors que la législation sur le séjour des étrangers s'endurcissait sous le "règne" d'Aznar, Zapatero compte y apporter plusieurs bémols. Une aubaine, sachant qu'au lendemain des l'attentats du 11 mars, les Marocains sont devenus des cibles pour les extrémistes.