Washington au pied du mur au Proche-Orient. Empêtré dans le chaos irakien, le président George W. Bush doit, cette semaine, s'occuper également du conflit israélo-palestinien avec deux rendez-vous en perspective : avec le président égyptien, Hosni Moubarak, puis le Premier ministre israélien, Ariel Sharon. Le premier dossier risque d'influer sur le deuxième... le tout sur fond de course à la Maison Blanche. "Regardez ce qui attend le président. L'effondrement en Irak est entre ses mains. Son programme de démocratie est rejeté par les Saoudiens et les Egyptiens", note Edward Walker, ancien ambassadeur américain en Israël et en Egypte. Lundi, le premier visiteur dans le ranch texan de Bush est Hosni Moubarak. Le raïs égyptien craint que l'actuel projet israélien de retrait de Gaza ne débouche, à terme, sur une forme d'annexion indéfinie et déguisée d'autres territoires occupés. Tout comme les autres Arabes, notamment le roi Abdallah de Jordanie, qui sera lui à la Maison Blanche le 21 avril, le même jour que Nabil Chaâth, chef de la diplomatie d'un Yasser Arafat toujours boycotté par Bush. Le Palestinien rencontrera son homologue Colin Powell et la conseillère à la sécurité national,e Condoleezza Rice. Washington, affirme Chaâth, a promis de ne pas se prononcer sur le plan Sharon avant d'avoir écouté les Palestiniens. Les Arabes devraient donc faire pression pour obtenir des garanties américaines: tout retrait unilatéral de Gaza doit s'inscrire dans le cadre de la "feuille de route" adoptée par la communauté internationale, et donc dans la poursuite d'un processus de négociations. L'heure est délicate pour Bush. Sa gestion de l'Irak contestée par les dirigeants arabes, il est obligé de se pencher sur le conflit israélo-palestinien "en position de faiblesse et il a encore plus besoin que ça réussisse", estime Stephen Cohen, président de l'Institut pour la paix et le développement au Proche-Orient. Vu sa saison politique, George W. Bush a besoin que les choses avancent. Mais il a aussi besoin qu'Ariel Sharon, qu'il reçoit mercredi, lui mette sur la table un projet montrable à des alliés arabes de plus en plus remontés contre lui. Martin Indyk, ancien ambassadeur en Israël à l'époque de Bill Clinton, est lui certain que M. Bush va donner sa bénédiction au projet Sharon. Déjà, deux "sherpas" israéliens de haut vol, Dov Weisglass et Giora Eiland, respectivement directeur de cabinet de M. Sharon et conseiller à la sécurité nationale, sont à Washington pour peaufiner les détails de la rencontre de mercredi. Les Israéliens veulent la reconnaissance de plusieurs vastes "blocs d'implantations" en Cisjordanie, mais Washington renâcle. Ils veulent aussi que les Etats-Unis s'engagent à limiter le "droit au retour" pour les Palestiniens, et ne savent franchement pas ce que les Américains sont prêts à offrir comme concession. Reste que, très décrié sur sa droite, et au sein même du Likoud qui va se prononcer par référendum à la fin du mois sur ce projet de retrait susceptible de faire exploser sa coalition, Ariel Sharon a absolument besoin de la bénédiction américaine. Il s'est donc fait cajoleur dimanche, déclarant que "le désengagement est bon pour la paix. Il est clair que ce plan ouvre le chemin à l'avenir pour un processus de paix". Mais le problème, c'est qu'on a également "besoin de Moubarak", ajoute Martin Indyk. Un Hosni Moubarak vu comme le seul rempart pour éviter que les extrémistes du Hamas ne prennent le contrôle total de leur bastion de Gaza.