Son comportement n'a pas échappé à son institutrice. Celle-ci, en bonne éducatrice, en avise les parents et les sollicite de lui expliquer s'il y avait des problèmes qui semblent avoir un impact direct sur la petite. La réponse est négative, il n'y a pas de problème. Il doit y avoir certainement autre chose. Nous sommes à Marrakech, quartier Es-Saâda II où demeure Houda. Sa mère, qui tentait de savoir ce qui lui est arrivé, explique : «J'ai entendu un bruit qui provenait de l'extérieur. Du judas de porte, j'ai remarqué qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas derrière la porte de l'appartement de mes voisins d'en face qui était entrouverte. Mon mari m'a rejoint pour voir. Il a vu notre fille Houda qui venait d'y sortir et nettoyait sa bouche et sa joue avec de l'eau». Rapidement, le père ouvre la porte et fait entrer sa fille qui semble être perturbée. Calmement, il essaie, en compagnie de sa femme, de savoir ce qu'elle y faisait. Pour réponse, Houda lance cette phrase incompréhensible : «Il se reproduit ce que j'ai l'intention d'oublier». Une scène qui s'est produite le jeudi 7 mai. Mais, qu'est-ce qu'elle a tenté d'oublier et qu'est-ce qui vient de se reproduire ? «La première fois, il m'a fait entrer chez lui. Il a commencé à faire des attouchements à tout mon corps. Après quoi, il a enfoncé son doigt dans mon appareil génital», poursuit-elle avec innocence tout en ajoutant, «il a abusé de moi une fois chez lui et plusieurs fois sous les escaliers donnant sur le hall de l'immeuble». Mais qui est ce «il» ? C'est le voisin, Abderrahim, 57 ans, qui occupe l'appartement d'en face, à l'immeuble n° 15. Marié depuis vingt-et-un ans avec une femme qui n'a jamais mis au monde un enfant, mais ils adopte un garçon de 5 ans. Le scandale éclate. Comme une traînée de poudre, l'information se répand dans ce complexe résidentiel du quartier Es-Saâda II de la ville ocre. Les langues des enfants se délient. Spontanément, Aya, 10 ans, affirme que ce pédophile abusait d'abord de sa sœur, Chorok, 8 ans, avant que ne vienne son tour. «J'avais peur d'être maltraitée par mes parents si je leur disais ce qui nous est arrivé», précise-t-elle. La peur les a jetées, durant quelque mois, dans un gouffre du silence. Mais, elle arrive enfin à le briser. «Il m'embrassait, me faisait des attouchements, enfonçait son doigt et son sexe dans le devant et le derrière et filmait par son téléphone portable mon appareil génital», explique Aya. Quant à sa sœur, Chorok, elle raconte : «Il m'a fait rentrer chez lui à trois reprises». Ce n'était pas le pire. Salma, 10 ans, témoigne : «Devant mon regard, il a abusé de Younes, l'enfant qu'il adopte, pour me faire croire qu'il s'agit d'un acte normal et simple, avant de passer à moi», dit-elle avant d'ajouter : «Il me menaçait de me tuer si je disais quoi que ce soit à mes parents». La police a été alertée. Le mis en cause a été arrêté, lundi 18 mai, et traduit devant le parquet général près la Cour d'appel de la ville ocre et le 23 juin, il sera devant le juge d'instruction. L'association «Touche pas à mes enfants» se charge de l'affaire pour soutenir les victimes et tente de pousser les autres victimes qui gardent encore le silence à parler et porter plainte contre le mis en cause.