Pour être conforme à l'esprit de la Constitution de 2011, qui a prévu la création de l'Instance nationale de probité, de prévention et de lutte contre la corruption (INPPLC), l'Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC), créée en 2007, n'existera plus. L'annonce a été faite, mercredi à Rabat, par Abdeslam Aboudrar, président de l'ICPC, dont la mission arrivera à échéance le 20 août prochain puisque le décret du 13 mars 2007 instituant l'ICPC prévoit que le président de l'Instance est nommé pour 6 ans non renouvelables. Pour leur part, les membres de l'assemblée plénière ont un mandat de 4 ans renouvelable une fois. Ceci dit, la mission de celle-ci s'est achevée le 15 octobre 2012. Voilà pourquoi l'Instance s'est contentée de présenter, mercredi lors d'une conférence de presse, un rapport bilan reprenant son travail pour 2012-2013. Ainsi, la place sera cédée à l'INPPLC qui remplacera l'ICPC dès que le texte de loi l'organisant aura été promulgué. Pour le moment, le texte devra être incessamment adopté par le Conseil de gouvernement. Concernant le travail réalisé par l'ICPC, son président estime que «cette Instance a contribué d'une certaine façon à briser le tabou de la corruption, tous milieux confondus». Cependant, l'Instance devait faire face à deux obstacles majeurs. Il s'agit du suivi et de l'évaluation de la politique gouvernementale en matière de prévention de la corruption et de la collecte d'informations en relation avec le phénomène de la corruption. «Sans stratégie nationale de lutte contre la corruption, on ne peut pas parler de politique dans ce sens et il n'y a forcément aucune matière à évaluer», a martelé M. Aboudrar en enchaînant que son Instance a rempli sa mission de Conseil au gouvernement puisque celui-ci a finalement lancé le chantier d'élaboration d'une stratégie nationale actuellement en cours. Aussi, l'ICPC devait faire face au problème de collecte d'informations. «La future loi sur l'accès à l'information devrait normalement atténuer ces difficultés», a-t-il avancé. Et ce n'est pas tout. L'INPPLC envisage de collaborer avec l'ICPC puisque la nouvelle Instance pourra disposer, après le diagnostic général et ceux sectoriels réalisés par l'ICPC, des conclusions de l'enquête nationale sur la corruption que l'ICPC mène actuellement et qui apporteront des éléments concrets sur le vécu quotidien du citoyen marocain par rapport au phénomène de la corruption. Une nouvelle instance avec un pouvoir d'auto-saisine 3 questions à Abdeslam Aboudrar, président de l'ICPC ALM : Quelle serait la différence entre l'ICPC et l'INPPLC ?
Abdeslam Aboudrar : La nouvelle instance a non seulement des prérogatives de prévention mais aussi d'investigation. Ainsi elle peut aider la justice dans son travail pour détecter la corruption et poursuivre les cas de corruption. L'INPPLC pourra aussi s'autosaisir. C'est important parce que l'ancienne instance ne pouvait que recevoir des doléances. De plus, elle a l'initiative d'agir en toute liberté puisque la Constitution utilise ce terme d'initiative. La loi fondamentale garantit également l'indépendance de cette nouvelle autorité administrative. De même, les textes de loi relatifs à cette instance devraient garantir cette indépendance. Chose à laquelle nous avons veillé lors de l'élaboration de ces textes. Quel est l'objectif du rapport que vous adressez à la nouvelle instance ? C'est un rapport bilan pour marquer la fin de mission de l'ICPC et s'arrêter sur ses réalisations et les obstacles auxquels elle a fait face, notamment le positionnement de l'instance auprès du gouvernement, le manque de moyens, etc. Le rapport étale également les conditions de succès de la nouvelle instance nationale de probité, de prévention et de lutte contre la corruption essentiellement la mise en place d'une stratégie nationale de lutte contre la corruption et les moyens humains et matériels à la mesure des défis qu'on lui lance. Quels regards portez-vous sur la corruption ? Je crois qu'il y a des choses qui se font, mais les gens ne s'en rendent pas compte. On est beaucoup moins tolérant avec la corruption, il y a des sanctions qui arrivent. Donc c'est un début pour mettre un terme à l'impunité. D'autant plus que la stratégie précitée permettra, entre autres, à la nouvelle instance de travailler dans des conditions bien meilleures que les nôtres il y a cinq ans.