Ariel Sharon a annoncé qu'il allait desserrer l'étau sur Yasser Arafat, mais sans donner de précisions. Pendant ce temps, les incursions et les occupations de camps de réfugiés se poursuivent, faisant leur lot quotidien de morts parmi le peuple palestinien. Malgré cette déclaration en apparence conciliante, qui intervient à quelques jours de l'arrivée dans la région d'Anthony Zinni, l'émissaire américain au Proche-Orient, l'armée israélienne a poursuivi ses opérations de grande ampleur à Ghaza et en Cisjordanie. Une cinquantaine de chars, de véhicules blindés et de bulldozers israéliens ont occupé totalement dans la nuit de dimanche à lundi la ville autonome de Kalkiliya, où le couvre-feu a été imposé tandis que les militaires procédaient à des perquisitions maison par maison. Trois Palestiniens ont été tués lundi à l'aube au cours de cette opération, alors que simultanément, deux hélicoptères israéliens ont tiré des roquettes contre un bâtiment abritant une unité de la Force 17, faisant quatre blessés graves. D'autres unités de l'armée ont également occupé le camp de réfugiés de Dheishé, près de Beit Lahm, où l'armée a imposé un couvre-feu et ordonné par haut-parleurs à tous les hommes de 15 à 45 ans de se rendre dans deux écoles du camp pour être interrogés. Le Premier ministre israélien avait, dimanche soir, estimé que le président de l'Autorité palestinienne avait rempli les conditions pour pouvoir quitter Ramallah en Cisjordanie, où il est bloqué par l'armée depuis le 3 décembre. Et d'affirmer à la télévision qu'il estimait que les conditions qu'il avait posées pour que M. Arafat quitte Ramallah « sont remplies ». «Il faut respecter nos engagements», a-t-il poursuivi, en faisant allusion à l'arrestation par les services palestiniens des cinq Palestiniens soupçonnés d'être impliqués dans le meurtre le 17 octobre dernier du ministre israélien du Tourisme Rehavam Zeevi. Avant cette annonce, le président palestinien avait affirmé à la télévision italienne qu'il était prêt à reprendre le dialogue pour la paix « immédiatement » malgré « les humiliations continuelles » subies par le peuple palestinien. Sharon n'a toutefois pas précisé quand M. Arafat retrouverait sa liberté de mouvement, ni s'il serait autorisé à se rendre librement à l'étranger, particulièrement au sommet arabe à Beyrouth les 27 et 28 mars. Pour sa part, le ministre israélien des Affaires étrangères, Shimon Peres, a affirmé lundi à la radio militaire que M. Arafat pourrait circuler « dans les prochains jours » en Cisjordanie et dans la bande de Ghaza. Il n'a pas exclu que le président palestinien puisse se rendre à l'étranger, notamment au sommet arabe prévu à Beyrouth à la fin du mois. Sur le plan diplomatique, Hubert Védrine, le ministre français des Affaires étrangères, a déclaré lundi au journal français « Le Parisien » que « les Israéliens devraient constater que la politique menée pour rétablir la sécurité n'a fait qu'empirer la situation » et que « c'est à eux de prendre la décision d'en changer ». Dan un autre entretien publié au quotidien « Al-Hayat», M. Védrine a appelé les pays arabes à cautionner l'offre de paix saoudienne, lors du sommet de Beyrouth. De son côté, le ministre espagnol des affaires étrangères, Josep Piqué, qui a salué lundi matin à Bruxelles l'annonce de Sharon, a souligné que les ministres européens vont préparer une «déclaration claire et solide » sur le Proche-Orient en vue du sommet européen de Barcelone, les 15 et 16 mars. Par ailleurs, l'ancien président socialiste portugais Mario Soares a affirmé lundi à Téhéran que « s'en prendre à Arafat, homme d'un grand courage, serait une catastrophe. Il est l'homme important pour la paix chez les Palestiniens, tout comme Shimon Peres est l'homme important pour la paix chez les Israéliens», a ajouté M. Soares , qui s'est déclaré « très ému » par l'annonce de la destruction des bureaux de M. Arafat à Ghaza par l'armée israélienne. «Je me trouvais dans cette maison à ses côtés en septembre 1995 quand (le Premier ministre socialiste israélien) Yitzhak Rabin a été assassiné». Interrogé sur les violences actuelles, il a répondu : « si nous ne voulons pas humilier le monde arabe, nous devons arriver rapidement à la paix. il faut faire la paix, et d'urgence. Il faut que la spirale de la violence soit arrêtée. Aussi bien l'Union européenne que les Etats unis et l'ONU doivent dire: +ça suffit+ »! « Les deux peuples sont condamnés à vivre ensemble. Il n'est pas possible pour les Palestiniens d'expulser les Israéliens, il n'est pas possible pour les Israéliens d'écraser les Palestiniens », a-t-il ajouté.