Les Etats-Unis et le Maroc ont achevé les négociations qui ont débouché, mardi 2 mars, sur un accord de libre-échange bilatéral (ALE) complet et inédit. L'ALE maroco-américain est le septième accord du genre conclu par les Etats-Unis avec un pays tiers. Il est le deuxième avec un pays arabe et le premier en Afrique. Sa signature, prévue pour juin, sera soumise aux législateurs des deux pays pour ratification. Dès le premier jour de son entrée en vigueur, le Maroc bénéficiera de l'accès libre, sans droit de douane, à l'immense marché américain. Les opérateurs marocains semblent plus satisfaits que réticents. C'est désormais chose faite. Après treize longs mois et d'intenses tractations, l'accord de libre-échange entre le Royaume du Maroc et les Etats-Unis d'Amérique a été conclu mardi 2 mars 2004. À l'issue de sept rounds de négociations, même les plus réservés des opérateurs marocains (textiliens en tête) affichent leur satisfaction. Curieusement, les différends tant décriés ont été surmontés d'un trait de plume. La recette miracle vient de la bouche des négociateurs marocains :”Face aux difficultés objectives rencontrées, il a été recherché puis trouvé des solutions de compromis, imaginatifs et exceptionnels par rapport aux dispositions généralement retenues dans des accords de même type”. Même son de cloche côté américain par la voix de l'ambassade américaine au Maroc « les négociateurs américains ont œuvré de près avec leurs homologues marocains à la fois pour que l'accord de libre-échange entre les deux pays soit un outil de promotion de l'investissement créateur d'emplois rémunérateurs au Maroc et pour qu'il tienne compte des secteurs sensibles de production, ainsi que des réalités socio-économiques du pays ». Les deux équipes de négociations sont ainsi parvenues à un accord global, spécifique. D'entrée, une fois l'accord ratifié, un accès libre sur le marché américain est garanti pour 98 % des produits industriels marocains. Ceci est en particulier bénéfique et opportun pour les produits qui faisaient face à des droits de douane relativement élevés et pour lesquels le Maroc dispose de production compétitive. Le président de la CGEM, Hassan Chami, en est convaincu : « Le pays pourrait devenir une plate-forme de production à même de drainer des flux d'investissements non négligeables. Par contre, nous ne pouvons, compte tenu de la taille du marché américain, nourrir l'ambition de concurrencer les Américains sur leur marché, mais on peut percer grâce à une sage politique de créneaux porteurs. ». Il en va ainsi pour le secteur textile pour lequel cet accord ouvre de façon importante et significative le marché américain aux exportateurs marocains. Hormis certaines réserves, Jawad Hamri, présent sur place à Washington au nom des textiliens laisse entendre que l'accord est globalement satisfaisant. L'accès préférentiel au marché américain ainsi que les flexibilités accordées pour les règles d'origine dans ce secteur permettent d'entrevoir une augmentation substantielle des exportations, des investissements au Maroc, et donc, de création d'emplois. Le communiqué des négociateurs marocains laisse entendre que secteur de la pêche bénéficiera également de multiples possibilités d'accroissement des exportations marocaines sur le marché américain. Mais il ne donne toutefois pas de détails à ce sujet. Pour les produits agricoles et agro-industriels, l'accord offre des opportunités significatives pour développer et diversifier les exportations marocaines sur le marché américain aux nombreuses potentialités. Ce développement encourage manifestement la modernisation du secteur agricole et alimentaire, génératrice d'emplois et de revenus pour les populations rurales. « L'ouverture du marché agricole marocain se fera progressivement au rythme de la mise en œuvre des réformes envisagées. Elle n'est que partielle pour les produits structurants de l'agriculture marocaine, notamment les blés pour lesquels la préférence accordée est sous forme de contingent dans les limites des besoins d'importation du Maroc », précisent les négociateurs marocains. Pour d'autres produits sensibles, des périodes de transitions très longues et des mesures de sauvegarde appropriées et exceptionnelles ont été retenues. « La partie américaine est pleinement consciente du nombre de personnes qui vivent du secteur au Maroc et des contraintes des petits agriculteurs aussi bien que des éleveurs », a expliqué Robert Zoellick le représentant des Etats-Unis pour le commerce extérieur. Pour le domaine particulier des génériques, l'accord confirme, pour l'essentiel, les engagements dans le cadre de l'OMC. Il est à relever que l'accord ne prévoit pas de prolongation de la durée du Brevet d'un médicament et ne remet pas en cause les acquis de l'industrie nationale. « En tout état de cause, l'accord prévoit explicitement la possibilité pour le Maroc de disposer des flexibilités nécessaires pour protéger la santé publique et garantir l'accès des médicaments pour tous, conformément à la déclaration de Doha sur les ADPIC ». Pour le ministre du Commerce, Rachid Talbi Alami, la logique de protection, bénéficiant à un nombre restreint de sociétés marocaines doit céder la place une autre visant la stimulation du process de production. «La propriété intellectuelle a pour avantage d'aider à la promotion du savoir et de l'entreprise innovatrice », a toutefois observé M. Zollick, citant l'exemple de la Jordanie dont les mesures de protection ont attiré les investissements d'entreprises comme Microsoft, de compagnies pharmaceutiques et d'autres, a-t-il dit. En même temps qu'il ouvre des opportunités économiques nouvelles aux Etats-Unis et au Maroc, l'accord de libre-échange conclu présente la particularité d'être un parmi seulement sept accords de ce genre conclu avec les USA, le deuxième avec un pays arabe et le premier en Afrique. Sa signature est attendue pour juin prochain, puis il sera soumis aux législatures de deux pays pour ratification.