Voter le 1er juillet prend une signification extrêmement importante. Le projet de la nouvelle Constitution est le couronnement de plusieurs décennies de lutte. A l‘aube de l'indépendance et depuis l'indépendance, les forces démocratiques et parmi elles le PPS ont réclamé une Constitution qui reconnaisse la souveraineté du peuple. Une Constitution qui consacre la séparation des pouvoirs et qui permet au Parlement de légiférer, de contrôler l'exécutif, d'évaluer les politiques publiques, d'être porteuse des revendications citoyennes. Une Constitution qui permet de disposer d'un gouvernement réellement responsable et dont la légitimité émane des urnes à travers la majorité parlementaire, d'avoir un pouvoir judicaire indépendant et qui a les moyens de son indépendance et qui veille à l'application de la loi et au respect des droits. Au-dessus de tout cela, un pouvoir monarchique qui continue à jouer un rôle central dans la direction du pays, en assumant la défense de la Constitution, la défense de l'unité nationale, la défense de l'intégrité territoriale et de l'indépendance du pays. L'institution monarchique assume ainsi son pouvoir d'arbitrage entre les institutions, au cas où un problème important se pose. Elle a la responsabilité d'assurer la pérennité de l'Etat et également l'exercice d'Imarat Al Mouminine à travers la régulation du champ religieux. Le Roi est en même temps le garant de la liberté de toutes les religions et de toutes les expressions de pensées dans tout le pays. Evidemment, nous avons aujourd'hui cette Constitution qui détermine toutes ces attributions. Nous avons aussi une Constitution qui, sur le plan des droits, consacre à peu près 21 articles à ce sujet. Nous avons un article 19 emblématique qui parle d'égalité des droits homme-femme. Et c'est avec cela que nous inaugurons l'entrée de plain pied dans une démocratie qui reconnaît à toutes les citoyennes et tous les citoyens l'égalité pour les droits et pas seulement les droits politiques, comme c'était le cas jusqu'à présent. Deuxième article emblématique, au niveau des libertés, c'est le droit à la vie. En plus des droits politiques, il y a de nouveaux droits qui sont autant d'obligations pour les pouvoirs publics : les droits économiques, les droits sociaux, les droits culturels, les droits environnementaux, les droits de la protection de différentes couches de la population, de protection des femmes, protection de la famille, promotion de la jeunesse… Cette nouvelle génération de droits, qui sont autant d'acquis pour nos citoyens que d'obligations pour les pouvoirs publics ouvrent de grandes possibilités à la participation des citoyens à la gestion de la vie publique. On ne peut plus avoir, par exemple un gouvernement qui, au nom du libéralisme, nous dira que les questions de la culture ou la promotion du sport doivent être réglés par les mécanismes du marché. Chose tout à fait nouvelle, c'est la possibilité pour les citoyens d'ester en justice au nom de la Constitution en s'adressant à la Cour Constitutionnelle…. Evidemment, nous devons souligner le fait qu'il y a une nouvelle architecture institutionnelle de l'Etat entre le centre et la région. Cette nouvelle organisation de l'espace donne l'opportunité de créer de nouveaux espaces de développement régionaux qui tirent leur légitimité du suffrage universel et qui doivent fonctionner selon les règles de solidarité. Pour toute ces raisons et en tête desquelles la reconnaissance de la langue amazighe comme une composante fondamentale de notre identité et également cette ouverture de la Constitution qui parle de différents affluents de notre identité nationale : arabe, africaine, andalouse, hébraïque, je voterai oui. Maintenant, ce qui va changer demain pour le citoyen, c'est qu'il pourra participer davantage à la gestion de la chose publique. Aussi, a-t-il la possibilité d'interagir à travers les partis politiques, évidemment, les syndicats sans omettre la société civile. Il va pouvoir accéder aux instances de réflexions consultatives et également avoir le droit de pétition qui constitue une première pour le Maroc. Faut-il rappeler que les luttes permanentes des forces démocratiques et progressistes avaient pour but ultime d'armer les citoyens, les partis politiques, la société pour aller de l'avant au nom des droits, devenus aujourd'hui des acquis. Et à partir des acquis, bien entendu, il va falloir les mettre en exécution, voire les matérialiser. Quand on parle de justice sociale, de l'accès à la santé, à un enseignement de qualité, à une qualité de vie, au droit à la culture… il s'agit bel et bien de chantiers de luttes ouvertes pour le futur. Cette nouvelle Constitution ouvre de grandes perspectives dans ce sens. En définitive, nous n'oublions pas que la Constitution n'est pas une fin en soi ; elle est un moyen pour acquérir de nouvelles libertés ayant pour objectif premier le progrès du pays et la dignité du peuple. Ainsi, les partis démocratiques et progressistes devront se mettre à l'ouvrage afin d'assumer le rôle qui leur revient. Cela commence par la mise à niveau de la législation. Une fois votée cette Constitution, certaines de nos lois se retrouveront en contradiction avec l'essence de la nouvelle Constitution. Il y a également les réformes politiques que nous avons réclamées. La nouvelle Constitution n'est qu'une partie de cette nouvelle génération de réformes demandées par le PPS lors de son dernier Congrès. Les autres réformes concernent le domaine politique. Il va falloir revoir la loi sur les partis, revoir le mode de scrutin, disposer d'un code qui permet plus de présence de femmes, plus de présence d'élites… Et il va falloir travailler aussi à la moralisation de la vie politique et réconcilier les citoyens avec la chose politique. Il faut faire appel à leur sens des responsabilités. Il faut que le peuple s'approprie cette nouvelle Constitution. En fait, il s'agit d'une véritable bataille de la société civile, de la presse, de toutes les instances pour encourager les citoyens et leur dire : allez-y vous avez les moyens d'interagir, prenez le pouvoir parce que maintenant la Constitution vous le reconnaît. De tout cela découle un nouveau cahier des charges pour les partis politiques. Ainsi, les partis doivent revoir leurs modes de gestion, tout en s'adaptant avec la réalité, agir avec plus de responsabilité, se constituer en véritables écoles de formation des citoyens et d'émergence de nouvelles élites. Et pour que cette nouvelle Constitution ne soit interprétée de manière minimaliste mais maximaliste, il faudra adapter les acteurs politiques à cette nouvelle donne. Ainsi, il faut donner plus de responsabilités aux élus, plus de libertés politiques aux citoyens leur permettant d'interagir avec les politiques, voire les interpeller. Au sein du PPS, nos priorités commencent par l'action en vue de se mettre au diapason de toutes ces innovations et en continuant notre combat permanent pour la démocratisation de la société. Nous estimons que la Constitution ne doit pas être uniquement porteuse de droits, mais qu'elle puisse ouvrir des perspectives larges à plus de justice sociale, à une meilleure gouvernance, à la lutte contre les dysfonctionnements et les tares qui ont accompagné la vie politique durant ces dernières décennies. Quelle que soit votre opinion, l'essentiel c'est que nous puissions, tous ensemble, agir au lendemain de l'adoption de la nouvelle Constitution pour atteindre les objectifs qui sont les nôtres. : Un Etat démocratique, moderne et solidaire. Nous restons convaincus que l'on ne peut pas changer la société uniquement par la protestation, nous ne le ferons pas en adoptant une position passive. Il est établi historiquement que le meilleur combat est celui qui aligne et les institutions et la société pour faire progresser le pays en toute douceur. (*membre du bureau politique du PPS)