Le message de paix apporté par le Festival de Fès des musiques sacrées du monde (3-12 juin) est la meilleure réponse au terrorisme et à toute forme d'intégrisme, ont souligné à Paris les organisateurs de cette manifestation culturelle et leurs partenaires français. Emus par le tragique attentat terroriste qui a endeuillé la semaine dernière la ville de Marrakech, la direction du festival et ses amis français, réunis au siège du Sénat français pour la présentation de cette manifestation, ont invité les adeptes de la paix de par le monde à être plus forts que les terroristes en se rendant massivement au Maroc pour partager les valeurs de ce “Davos culturel”. En l'espace de 17 ans, cet événement s'est imposé, en effet, comme l'un des plus grands rendez-vous internationaux pour le dialogue des cultures et des religions, essentiel, selon eux, pour combattre les différentes manifestations d'extrémisme à travers le monde, pouvant conduire au crime, comme c'est le cas avec l'attentat de Marrakech. “L'annonce de ce festival vient en contrepoint de cette actualité douloureuse puisque cette manifestation, qui en est à sa 17-ème édition est tout sauf une manifestation de violence”, a déclaré le sénateur Christian Cambon qui a assuré la direction du festival du soutien du groupe d'amitié France-Maroc qu'il préside au Sénat français. Il s'est dit convaincu que “cette manifestation pacifique emprunte de culture et de spiritualité est la meilleure réponse que l'on puisse offrir à la violence aveugle”. Ce “Davos culturel”, a-t-il affirmé, offre la possibilité de montrer “combien le Maroc est un pays au carrefour de l'Orient et de l'Occident, des religions et des courants de pensée”. Pour le directeur général du festival, M. Fawzy Skali, l'attentat de Marrakech “nous rappelle malheureusement que l'extrémisme est toujours bien présent partout dans le monde”, d'où la nécessité de continuer le travail mené en faveur de “la paix, la tolérance et le dialogue entre les cultures et religions”. Ces valeurs, a-t-il souligné, le festival de Fès n'a cessé de les défendre depuis ses débuts dans cette ville impériale, “héritière de l'Andalousie chère à nos cœurs, où vivaient en convivialité différentes cultures (arabes, berbère, etc.) et les trois religions monothéistes, dans une sorte de symbiose tout à fait remarquable”. Au-delà de son aspect patrimonial, M. Skali a souligné que le festival de Fès des musiques sacrées s'est érigé comme un véritable forum pour réfléchir sur la manière avec laquelle “la spiritualité des cultures pourrait entrer en interaction avec le monde tel qu'il est”. C'est la réponse, selon lui, à “cette fameuse thèse du clash des cultures”. Convaincu que “la politique passe aussi par la culture”, le directeur général du festival plaide pour une action qui “ne consiste pas simplement à dénoncer mais à proposer”. Il a souligné à cet égard que “la culture et la spiritualité nous donnent une force pour aborder, dans le cadre de ce forum, des questions différentes”, allant des bouleversements en cours dans le monde arabe, aux enjeux de la bonne gouvernance à travers le monde pour un avenir meilleur de l'humanité. Pour la sénatrice Bariza Khiari, membre du groupe d'amitié France-Maroc, il suffit de participer une seule fois au festival de Fès des musiques sacrées pour avoir l'envie de “spiritualiser la politique dans ce sens que la politique a besoins de sens, de gouvernance, un projet, une vision, et non pas de politiser la spiritualité”. “Quand on revient du festival, nous avons envie de donner du sens, de l'éthique à notre action quotidienne”, a-t-elle dit. Tout en regrettant l'acte terroriste tragique survenu au Maroc, Mme Khiari a souligné que si “l'on aime ce pays pacifique, tolèrent et ouvert, il faut absolument y aller et être plus fort que ces terroristes et intégristes pour leur montrer que nous n'avons pas peur”. Organisée sous le Haut patronage de SM le Roi Mohammed VI, la 17-ème édition du Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde, qui se tiendra du 3 au 12 juin prochain, a retenu cette année la thématique des “sagesses du monde”. Des intellectuels connus et reconnus dans le monde se réuniront, pratiquement tous les jours, sous le chêne pluricentenaire du somptueux musée Al Batha, pour mener une réflexion collective dans le cadre du Forum “Une âme pour la Mondialisation”, prévu en parallèle avec la programmation musicale du festival. Pour cette édition, la fondation esprit de Fès, principale initiatrice de cet évènement, a concocté en effet une programmation “invitant à une quête du sens et de la beauté, à travers arts cultures et visions du monde”. De l'Ethiopie à l'Afghanistan, d'Inde du Nord au Maroc, du Brésil au Sénégal, de France, d'Espagne ou d'Italie aux Etats-Unis, le festival de cette année sera une belle promenade dans les “vastes espaces des chants et des rythmes que les cultures du monde ont crées depuis l'aube des temps”, avec pour commencer la création Opéra “Majnoun et Layla”, qui proposera une traversée musicale et poétique des grandes traditions orientales, de la Perse au Monde arabe. Le festival emmènera, ensuite, le public de la cité Idrisside vers des horizons musicales lointaines, qui n'ont en commun que la beauté et l'originalité de la musique, dite “sacrée” : D'Elena Ledda d'Italie, à Maria Bethânia du Brésil, en passant par Françoise Atlan et Moneim Adwan (Maroc-Palestine), Arcàngel d'Espagne, Salah Aghili d'Iran, Prem Sanyas d'Inde et Alèmu Aga d'Ethiopie. Parmi les têtes d'affiche figurent aussi les stars Ben Harper (Etats-Unis), Julia Boutros (Liban), Abd Al Malik (France), Homayoun Sakhi (Afghanistan), l'Ensemble Paraguay Barroco d'Asuncion, Farid Ayyaz, les grandes voix du samaâ et l'Ensemble Syubbanul Akhyar (Indonésie). Le grand artiste sénégalais Youssou Ndour sera aussi très attendu, avec au menu un grand hommage à Cheikh Sidi Ahmed al-Tijânî. La musique arabe sera dignement représentée, notamment par le célèbre Kazem El Saher qui se produira aux côtés de la chanteuse Casablancaise Asma Lmnawar, pour un concert dédié, pour la première fois, à un répertoire spécialement créé pour la ville de Fès, où les accents spirituels auront la plus grande part. D'autres concerts ne manqueront pas d'attirer le public, dont ceux de l'égyptien Sheikh Taha et de l'enfant du pays Mohamed Amin El Akrami et son orchestre traditionnel andalou. A l'instar des autres années, cette édition maintient la programmation musicale gratuite du “Festival dans la ville”, en vue d'étendre l'ambiance festive et spirituelle du festival à l'ensemble de la ville. (MAP)