Droits des femmes: Les progrès du Maroc mis en avant à New York    Inégalités salariales au Maroc : trois mois de travail "gratuit" pour les femmes    Complexe Mohammed V : comme un air de discorde…    Cheptel en crise : la gestion Akhannouch sous le feu des critiques    Gaspillage alimentaire : le CESE sonde l'opinion publique    Diplomatie : le Maroc élu à la présidence de la CEA    Usage présumé de moyens communaux à des fins électoralistes, inquiétudes face à la baisse drastique de la production d'huile d'olive : Mustapha Baitas ne répond à rien    Droit de grève. La cour constitutionnelle valide le cadre législatif    Agadir : 530 MDH pour aménager la zone du Grand stade    Véhicules en crédit-bail : les pièges fiscaux à éviter    L'initiative « poisson à prix raisonnable »: une forte affluence avec 2.150 tonnes de poissons congelés commercialisés    Perturbation du trafic maritime entre Tarifa et Tanger en raison du mauvais temps    Maroc-Russie : des négociations en cours pour renforcer la coopération agricole    Immobilier. Le marché reprend des couleurs en cette fin d'année    Le conseiller du Président palestinien salue le soutien soutenu de S.M. le Roi à la cause palestinienne    « Le statu quo n'est plus une option face aux menaces et aux attaques contre la sécurité européenne »    Plus de 25 millions de fidèles à la mosquée Al Haram durant les dix premiers jours du mois de Ramadan    Cemac. Les nouvelles pièces de monnaie pour le mois prochain    Addis-Abeba : La participation des élus du Sud du Royaume à la 57e session de la CEA, un signe fort d'intérêt pour l'intégration continentale    Sport : Fouzi Lekjaa réélu au Conseil de la FIFA    BMW Golf Cup 2025 : La Team Morocco décroche la 2e place à la finale mondiale    Météo alerte orange : pluies et rafales de vent sur Casablanca    Réforme de la Santé : On avance, mais à quel rythme ?    À Casablanca, une complice de Hicham Jerando condamnée à deux ans et demi de prison ferme    Patrimoine : la Kasbah Ajbili classée patrimoine national    Vidéo : La RAM exalte la culture et le patrimoine marocain dans ses consignes de sécurité    Le président centrafricain adresse un message écrit au souverain chérifien    L'Algérie porte plainte contre Louis Sarkozy après ses propos sur son ambassade à Paris    Un appel d'offres de six milliards de dollars pour développer les infrastructures gazières marocaines    SM le Roi félicite le Pape François à l'occasion de l'anniversaire de son investiture à la mission papale    Spain's Africa strategy excludes Western Sahara    Senegal approves judicial agreement with Morocco for detainee transfers    Attijariwafa Bank and government partner to digitize merchants    Représentants de la CAF à la FIFA. Fouzi Lekjaa meilleur élu    Central African Republic's Foreign Minister delivers letter to King Mohammed VI    Ramadan : Avec 37,7% de PdA, Al Aoula est la chaîne publique la plus regardée au Maroc    "Rouge Tangerine" par Hanane Oulaïllah, un kaléidoscope de destins brisés    Blanche-Neige, revisité en live-action, dans les salles de cinéma à partir du 19 mars    Les médias mauritaniens : Avec le soutien du Maroc, la Mauritanie réalise un exploit historique et obtient pour la première fois un siège au Conseil de la FIFA    14e AGE de la CAF: Le vote consacre la forte présence du Maroc en Afrique (Fouzi Lekjaa)    Ligue des Champions : Le Borussia Dortmund met fin au rêve de qualification du LOSC    Démantèlement d'un réseau d'espionnage lié aux renseignements algériens en France    Bruxelles riposte à Donald Trump par des taxes "proportionnées" dès avril    Affaire «Doualemn» : la justice donne un avis favorable à l'expulsion de l'influenceur algérien    Fouzi Lekjaa continue de représenter le Maroc à la FIFA en étant réélu pour un deuxième mandat au sein du comité exécutif    Débat autour du concept de liberté dans les contextes arabe et occidental    «Basmat al-Tourath» : Le Maroc en animation, une histoire qui bouge !    Célébration de la journée mondiale du théâtre: un programme national couvrant les différentes régions du Royaume    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Sortie nationale du film «Les ailes de l'amour» de Abdelhai Laraki : Don juan à la Médina
Publié dans Albayane le 26 - 04 - 2011

C'est le troisième long métrage de Abdelhai Laraki. Les ailes de l'amour, en salle à partir de cette semaine, vient en effet après Mouna Saber, premier long métrage (2001) inscrit dans la logique d'une époque marquée par le récit de la quête à travers l'espace de la mémoire ; Ce premier film raconte l'histoire d'une jeune fille qui revient au pays sur les traces de son père disparu lors des années de plomb.
Le film se clôt d'ailleurs autour du lieu emblématique dit Derb Moulay Cherif. Mouna Saber s'inscrivait en toute légitimité dans ce qui allait devenir un genre en soi au sein de la cinématographie marocaine, celui du devoir de mémoire. Laraki passe ensuite avec Parfum de femme (2006) à un autre registre, celui du film d'action sur fond de trafic de drogue, de combines politiques et de déchirement personnel : l'histoire a pour cadre le nord du pays, tout un programme.
Après un passage à la télévision où il a réalisé notamment deux séries, Laraki retrouve donc le cinéma avec Les Ailes de l'amour. Changement de cadre et de décor. Ces ailes de l'amour nous portent de la sphère publique et ses questionnements à la sphère privée et ses errements. Avec ce nouveau film, il place au cœur du récit la question de l'intime, du désir et de l'amour charnel. Cependant, la première caractéristique du film est inhérente à son scénario écrit en référence à un roman marocain, le best seller de Mohamed Nedali, Morceaux de choix, auréolé en outre du Prix Grand atlas (2005). C'est un roman dense, riche en péripéties et, surtout, portant à tous les étages de son édifice les traces de son ancrage dans un milieu socio culturel fortement codé, celui de la médina et de la ville de Marrakech. Nedali est le romancier du Haouz par excellence, nourri d'une culture variée aux confins du pays amazigh et de la capitale ocre. Laraki en s'appropriant cette oeuvre romanesque apporte un nouvel élément au débat souvent emprunt de malentendu concernant le rapport littérature et cinéma au Maroc. Les ailes de l'amour en offre une illustration ; c'est une ouverture opportune et prometteuse. Comment Le scénario a négocié cette rencontre ? A la lecture du roman et suite au visionnement du film, on peut dire qu'il s'agit plus d'une transposition que d'une adaptation classique. Le passage du récit littéraire au récit filmique s'est fait sous le signe de la liberté. La formule utilisée en l'occurrence est qu'il s'agit «d'une adaptation libre» rejoignant ainsi la thèse d'Umberto Eco en la matière «le livre est mon livre, le film est ton film », instaurant définitivement un modus vivendi entre les romanciers et les cinéastes. Comment se décline ici cette liberté du film par rapport au roman ? A mon sens, elle intervient en opérant principalement un remaniement stratégique au niveau de l'espace narratif. En ramenant son récit à la Médina de Casablanca, Laraki et son coscénariste se sont libérés de la pesanteur culturelle qui marque l'espace marrakchi. C'est une donne essentielle dans le livre. La transposer dans le cinéma aurait été une gageure principalement sur le plan de la production de l'imaginaire : un espace ça se sent, ça vit et ça respire une culture. Cette liberté revendiquée et assumée est allée à un point de faire du film carrément un huis clos où les indicateurs spatio-temporels sont secondaires par rapport à l'essentiel du récit, la vie sentimentale de Thami. De quoi s'agit-il en fait ? C'est l'histoire d'un jeune homme, issu d'un milieu traditionnel, son père est Adl (notaire religieux) ; il quitte le giron familial pour se livrer à son sport favori, la drague. De guerre lasse, son père l'aide finalement à embrasser le métier de boucher…cette occupation lui offre l'occasion pour rencontrer la gente féminine ; d'une aventure à une autre, jusqu'à ce qu'il rencontre Zineb…
Le film est, en somme le parcours d'un jeune animé d'une passion face à un ensemble de contraintes : un récit d'initiation où le héros se forge son identité et réalise son rêve. Pour se faire, il épouse la figure du rebelle. A un certain niveau de ce parcours, Thami renvoie à une figure littéraire et mythique celle du don Juan ; celui qui aime toutes les femmes et fait de chacune d'elle l'ultime but de sa vie et leur fait croire à tour de rôle qu'elles sont la passion incarnée. Le don Juan du mythe et son cousin lointain de la médina sont dans la conquête permanente, remplaçant l'absolu sacré (la religion est omniprésente dans leur environnement) par l'absolu féminin. A la différence près que le Don Juan historique va finir par succomber au défi qu'il s'impose face à l'absolu alors que Thami va abdiquer quand il va rencontrer le grand amour. Mais à l'instar de Don Juan c'est un amour compliqué puisqu'il s'agit d'une femme mariée (de force certes). L'accomplissement de sa passion sera au terme d'une confrontation qui aboutira aussi à l'émancipation de sa bien-aimée qui finit par le rejoindre dans sa révolte. Cette quête amoureuse s'inscrit donc indéniablement dans une logique de remise en question de l'ordre établi, des valeurs dominantes. Thami exprime à travers son rapport à la femme, ce désir de liberté que la société tente de camoufler par un appareillage normatif et idéologique. Ce ne st pas un hasard si cette révolte se fait contre un père Adl c'est-à-dire habileté par la société à dire le dogme, la voie juste…
Le film s'ouvre d'ailleurs sous le signe funéraire avec la mort du père et l'exercice du rituel de lavement du corps, moment à forte charge symbolique car il s'agira le long du récit de parvenir à un corps réconcilié avec lui-même, dans la mort pour le père, dans l'amour pour Thami…Laraki use à plusieurs reprises de l'image de la mort et du cimetière dans ses films. Mouna Saber commence par une séquence dont le point fort a lieu au cimetière…et Les ailes de l'amour se clôt par une séquence au cimetière. Là, la mort est le point de départ d'une quête autour d'une vérité absente ; ici, la mort signifie la fin d'une époque, la fin d'un monde et l'émergence d'un autre, celui illustré par le regard de Zineb défiant celui du Moqaddem. Le cimetière comme figure filmique renvoie dans un jeu intertextuel à un film que le film et le personnage de Laraki n'hésitent pas à convoquer et à ressortir de la mémoire cinéphile. Il s'agit de L'homme qui aimait les femmes (1977) de François Truffaut. Un plan du film de laraki est carrément dédié au film de Truffait et à son affiche, le plan où l'on voit des jambes de femmes sur fond de confession de Thami. Thami ou le Bertrand Morane de la Médina ? Beaucoup de points communs autorisent ce rappel notamment cette passion pour la gente féminine qui en fait le centre du monde ; Thami partagerait dans l'absolu cette vision du monde que nous en donne le personnage de Truffaut : «Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le globe terrestre en tout sens, lui donnant son équilibre et son harmonie.» *critique de cinéma
Directeur du festival international du cinéma d'auteur de Rabat


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.