Avec la montée spectaculaire de leur nombre ces deux dernières années -on compte un peu plus de 720 unités- les Entreprises et Etablissements publics, prennent du muscle et se disent prêts à batailler ferme pour la promotion d'une culture managériale en nette rupture avec les pratiques du passé. C'est, en tout cas, écrit noir sur blanc dans les documents de la Loi de Finances 2011. L'enjeu, disait-on, est de se restructurer, ouvrir le capital et assurer le développement économique et social du pays, en saisissant les opportunités que pouvait conférer la libéralisation économique et le lancement de nombreux chantiers d'infrastructures (ports, aéroports, autoroutes, transport urbain, énergie électrique, assainissement et eau potable, habitat social, tourisme, agriculture, pêche… Officiellement, 25 entreprises publiques concentrent près de la moitié du portefeuille public (en dehors des EP à périmètre local ou régional). Sur les 116,9 milliards de chiffre d'affaires, elles se taillent 52 milliards DH : 12 MMDH pour Al-Sharq for Development, 8 MMDH pour la Société d'Investissements Energétiques, 7 MMDH pour Renault Tanger Méditerranée, 6 MMDH pour la Société d'Aménagement de CALA IRIS, 4,8 MMDH pour la Société d'Aménagement du Parc Industriel de SELOUANE, 4 MMDH pour la Société du Tramway de Rabat-Salé et 500 MDH pour le Parc Halieutique d'Agadir «HALIOPOLIS». Cela dit, globalement le secteur des EP affiche des performances économiques acceptables. En dépit de la hausse continue des charges d'exploitation (plus de 100 milliards en raison de l'augmentation sensible des charges de la CMR (15,7 milliards), de la CNSS (12,3 milliards DH), du Groupe HAO (7,4 milliards), du Groupe CDG (2,5 milliards DH) mais aussi et surtout de l'ONE (16,3 milliards) et la RAM (10,9 milliards DH), le secteur des EP parvient à réaliser des résultats opérationnels positifs (13,8 milliards pour le REX) ; 11,4 milliards DH pour le RN). Par ailleurs, les investissements réalisés ont atteint 67,7 milliards DH, mais les dettes de financement dépassent la barre de 135 milliards. Côté effectifs employés, le chiffre de 123.000 salariés demeure cependant en-deçà des prévisions. Pour l'heure, les grands groupes (RAM, ADM, ONDA, Groupe OCP, ONCF, ONE, ONEP, HAO, BAM, ANCFCC, ONHYM…), tentent de tirer meilleur parti des synergies entre leurs différentes entreprises. En même temps, de nouvelles EP ont vu le jour, suite à la création de nouvelles filiales et de prises de participation (dont 6 pour la CDG, 2 pour la BCP et 2 pour la SNTL). Il s'agit essentiellement de Tanger Med 2 avec un volume d'investissement global de 13,4 milliards DH ; Marrakech Shore (2,3 milliards DH) ; New Marina Casablanca (près de 2 milliards DH) et les deux filiales de la SNTL (SNTL Immo et SNTL Logistics (1,5 milliards DH) Au jour d'aujourd'hui, rares sont donc les holdings qui, pour être dans leur rôle d'acteurs économiques majeurs et vecteurs de modernité, acceptent de soumettre leurs performances à la dictature du marché (levées de fonds sur les marchés des capitaux pour financer leurs investissements). Il est vrai que le recours aux marchés des capitaux exige, entre autres conditions, la transparence des comptabilités, le respect des réglementations fiscales, un management de qualité, un rendement satisfaisant et des projets en ligne avec les attentes du pays. Mais, au-delà des exigences purement financières, il est «paradoxal de remarquer qu'en dépit da la largesse de ce secteur, ses investissements importants , celui-ci n' a pas pu réaliser une performance significative pour notre pays en termes d'indice de développement humain, d'emploi, d'éducation, de santé et d'innovation et de recherche scientifique » fait observer Mohamed Harakat, Président fondateur du Centre international des Etudes stratégiques et de gouvernance globale. A part le rapport Jouahri (1976) il n'y a pas eu d'audit ou de rapport d'évaluation globale de la gouvernance de ces établissements et leur apport au développement, note ce spécialiste de la gouvernance. « Les audits effectués à ce jour, y compris ceux de la cour des comptes, demeurent partiels ou ineffectifs. Le parlement, l'opinion publique, la société civile ignorent le coût réel (économique et social) de la gouvernance au sein de ces entreprises (hauts salaires des dirigeants, performance, réalisation, privatisation ».