Le président yéménite Ali Abdallah Saleh, confronté à une violence grandissante, est exhorté à favoriser le dialogue pour prévenir un “vide politique” que pourrait selon Washington exploiter Al-Qaïda. La tension était vive mardi à Taëz, au sud de Sanaa, où des partisans du régime, barricadés au siège du gouverneur, ont tiré à balles réelles et au gaz lacrymogènes en direction de protestataires, au lendemain de la mort de 17 manifestants dans des heurts avec les forces de sécurité dans cette ville. Deux manifestants ont été tués lundi soir à Hodeida, sur la mer Rouge, selon des protestataires. Les forces de sécurité étaient déployées mardi à Sanaa où les protestataires ont défilé la veille dans les rues proches de la “place du Changement”, épicentre de la contestation, pour réclamer le départ de M. Saleh, selon des témoins. Les Etats-Unis, qui ont toujours considéré M. Saleh comme un important allié dans la lutte contre Al-Qaïda, ont exprimé leur inquiétude de voir le réseau extrémiste profiter d'un “vide politique” au Yémen, exhortant le président yéménite au dialogue pour assurer une transition pacifique du pouvoir. “Nous sommes évidemment inquiets de voir Al-Qaïda et d'autres groupes essayer de profiter d'un vide politique en cette période de violences”, a déclaré lundi le porte-parole de la Maison blanche, Jay Carney. “C'est l'une des raisons pour lesquelles nous plaidons pour le dialogue et le lancement du calendrier de transition dont le président Saleh a parlé”, a ajouté M. Carney lors de son point de presse quotidien. Le 26 mars, le Washington Post avait rapporté qu'Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) serait près d'organiser un attentat, mettant à profit l'agitation politique en cours dans le monde arabe, particulièrement au Yémen. Abandonné par une partie de l'armée et des chefs tribaux et religieux, M. Saleh avait mis en garde contre le risque de chaos au Yémen s'il était contraint à céder le pouvoir, et invité l'opposition à mettre fin au mouvement de contestation pour négocier “un transfert pacifique du pouvoir dans un cadre constitutionnel”. Alors que le New York Times a affirmé dimanche que le gouvernement américain était en train de retirer son soutien au président Saleh et de faciliter son départ, M. Carney s'est borné à affirmer que “nous pensons pouvoir travailler avec le gouvernement yéménite sur ces questions importantes. Nous ne nous concentrons pas sur un individu”. Au département d'Etat, un porte-parole a répété que l'issue de la crise était entre les mains “du peuple yéménite”, et s'est borné à déclarer que Washington poursuivait ses consultations avec toutes les parties. “Il y a un écart entre ce que le président Saleh a dit et ce que les gens ont demandé (et) nous aidons, nous parlons de la façon de réduire cet écart”, a déclaré Mark Toner. “Il doit satisfaire l'opposition”, a ajouté un responsable sous couvert de l'anonymat: “Si cela veut dire partir, cela veut dire partir, mais il doit faire aussi d'autres choses”. Les monarchies arabes du Golfe ont, pour leur part, offert leur médiation entre le pouvoir et l'opposition au Yémen et un porte-parole officiel yéménite a indiqué que son gouvernement accueillait avec satisfaction “une invitation (...) à des entretiens à Ryad en vue d'un règlement de la crise”. “Le gouvernement yéménite est soucieux d'un règlement par le dialogue, à l'abri de la violence, du chaos et du sabotage”, a ajouté le porte-parole, cité mardi par l'agence officielle Saba.