Romancier, poète, peintre et essayiste allemand puis suisse. Hermann Hesse a obtenu le prix Bauernfeld en 1905 et le Prix Nobel de littérature en 1946. Né en 1877 et mort en 1962, il est l'écrivain des déchirements de l'existence humaine. Il se plaît à décrire des destinées hors du commun ; vagabonds, solitaires, contestataires, mais tous à la recherche de sens pour leur vie… L'ascèse, la sensualité et l'art sont les voies habituelles empruntées par ses héros. Mais, entre la chair et l'esprit, l'oscillation demeure incertaine. Hermann Hesse a toujours posé un regard sévère et inquiet sur la naissance de la société industrielle. Lors de la première guerre mondiale, ses prises de position pacifistes créent une rupture avec son public, mais ses œuvres, ‘Demian' et ‘Siddhaartha', brillants plaidoyers sur ses inquiétudes face aux nouveaux conflits internationaux, remportent un franc succès. Les premières œuvres de Hesse restent dans la tradition du XIXe siècle : son lyrisme doit tout au Romantisme, et il en est de même de la langue et du style de Peter Camenzind, un livre que son auteur présentait comme un roman initiatique dans la lignée du Henri le vert de Gottfried Keller. Sur le fond, Hesse s'opposa à l'industrialisation croissante et à l'urbanisation, ce par quoi il rejoignit une tendance des mouvements de jeunesse allemands. Hesse abandonna plus tard cette tradition néo-romantique de la forme et du fond. En revanche, la structure antithétique de Peter Camenzind, avec le contraste entre ville et campagne et l'opposition masculin-féminin, est encore présente plus tard dans les chefs-d'œuvre de Hesse (par ex. Demian et Le Loup des steppes). La connaissance des archétypes décrits par le psychologue Carl Gustav Jung eut une influence déterminante sur l'œuvre de Hesse, visible à partir du roman Demian : le chemin d'une jeune personne vers soi-même devint l'un de ses thèmes de prédilection. La tradition des romans initiatiques se poursuit également avec Demian, mais dans cet ouvrage (comme dans Le Loup des steppes), l'histoire ne se déroule plus sur un plan réel, mais dans un « paysage spirituel » intérieur. Un autre aspect essentiel de l'œuvre de Hesse est la spiritualité, particulièrement présente dans le roman Siddhartha. La thèse principale de Siddharta avance que la plénitude spirituelle ne peut être trouvée ni dans le renoncement aux réalités du monde ni dans la doctrine de Bouddha, mais dans l'expérience des sens. Les syncrétismes religieux (christianisme, bouddhisme) et intellectuels (Nietzsche, Jung) qui s'y expriment sont la profession de foi de Hesse, fondée sur l'ouverture au monde, sur la découverte d'une transcendance où s'unissent la vie et l'esprit. L'auteur reprendra ces éléments dans une ébauche de théologie (Ein Stückchen Theologie) et dans le texte Mein Glaube (Ce que je crois). Tous les ouvrages de Hesse comportent une part autobiographique, particulièrement visible dans Le Loup des steppes, qui est précisément un modèle de « roman de crise existentielle ». Cette caractéristique ne disparaît que dans ses œuvres tardives. Dans les romans apparentés, Le Voyage en Orient et Le Jeu des perles de verre, Hesse traita un thème qu'il avait déjà abordé dans Peter Camenzind : l'opposition entre vie active et vie contemplative. En partant du contexte de son époque, Hesse conçut dans « Le Jeu des perles de verre » une utopie pour l'humanité et pour l'âme, les deux éléments s'équilibrant dans un jeu d'échanges dialectiques. Bien qu'écrivant encore un roman initiatique « classique », il le fait de façon moderne, inversant les termes de la problématique maître/esclave hégélienne et nietzschéenne (dont il était un lecteur fervent) et répondant à distance au roman de Goethe, « Les Années d'apprentissage » de Wilhelm Meister , qu'il considérait comme le chef d'œuvre de la littérature allemande. En effet, le héros de Goethe s'appelle “Meister” (le “maître”), tandis que celui de Hesse se nomme “Joseph Valet”, ceci de façon délibérée, Hesse considérant que seuls l'humilité et le “lâcher prise” étaient des « solutions » pour l'âme humaine, et l'esprit allemand en particulier (ce en quoi il s'oppose à Thomas Mann).