De la conférence de presse du ministre de l'Economie et des finances, Salaheddine Mezouar, mardi à Rabat, on retiendra ceci : la sortie du Maroc sur le marché financier international a pour but de financer le déficit budgétaire de 2010. Au-delà du succès de cette opération auprès des investisseurs internationaux, il y a lieu de rappeler que cet emprunt est une nouvelle dette. Comme disent les sages : une dette ça se rembourse et porte intérêt, d'où le problème de l'effet «boule de neige» associé à cette dangereuse facilité dans la vie courante. Et cette logique de recours au marché, en l'occurrence extérieur, pour financer ses besoins, revient à dire qu'on a choisi de reporter les charges liées aux dépenses d'aujourd'hui sur les générations futures. Comme chacun a pu le constater, cette somme est-elle suffisante pour éponger le déficit budgétaire qui est déjà de l'ordre de 16,5 milliards DH, en juillet 2010. Rien n'est moins sûr. Mais le ministre, anticipant ce genre d'interrogations, voudrait rassurer l'opinion publique : La stratégie adoptée dans ce sens vise à assurer le financement du déficit tout en favorisant le développement du marché intérieur de la dette sans effet d'éviction du secteur privé, au meilleur coût possible pour la collectivité, Dixit Mezouar. L'argentier du royaume entendait «réduire les risques associés à cette levée de fonds et de veiller à la soutenabilité de la dette et à la solvabilité du pays». Le ministre a raison de dire que l'emprunt obligataire contribuerait à amortir les «pressions sur les liquidités intérieures et continuer ainsi à satisfaire les besoins d'investissement et de croissance». Or, l'on sait déjà, et le banquier central du pays en premier, le problème de l'assèchement des liquidités bancaires est devenu structurel, depuis trois ans. Autrement dit, l'emprunt obligataire s'apparente parfois à «l'arbre qui cache la forêt». Il faudrait préciser ici que l'opération, en elle-même, est salutaire, en ce sens que le Maroc est désormais dans le champs de vision des investisseurs institutionnels internationaux et que, de ce fait, il représente un placement sans risque démesuré avec rendement garanti. L'emprunt en question pourrait-il au moins être efficace économiquement ? Oui, d'après les partisans de la théorie de John Maynard Keynes. «lorsque l'économie languit, du fait d'une demande insuffisante et que les capacités de production sont sous-utilisées, une relance vigoureuse de l'économie par un programme d'investissements publics est justifiée». La croissance induite par la relance peut permettre de rembourser l'endettement supplémentaire…. Sauf que souvent, la relance par endettement risque de se traduire par une recrudescence de la pression fiscale pour rembourser la dette. Auquel cas, les citoyens vont devoir consommer moins pour supporter le surplus fiscal (sous forme de TIC, TVA, hausse des prix…) In fine, l'effet de relance escompté serait nul. N''anticipons pas. Attendons voir le projet de loi de Finances 2011 pour mieux comprendre les orientations de la politique économique.