Le parti conservateur a échoué à décrocher une majorité absolue lors des élections législatives de jeudi au Royaume-Uni, et ne peut donc prétendre former automatiquement un gouvernement, selon les résultats officiels publiés dans 615 des 650 circonscriptions. Le parti conservateur est, en revanche, assuré d'occuper le plus grand nombre de sièges de députés à la chambre des Communes. Jusqu'à présent, les sondages sorties des urnes indiquaient que les conservateurs de David Cameron avaient remporté les législatives britanniques sans obtenir la majorité absolue, ouvrant une période d'incertitude institutionnelle car le travailliste Gordon Brown entend se maintenir au pouvoir. Dès la publication de ces sondages à la clôture du scrutin, les travaillistes, arrivés en deuxième position, avaient évoqué la possibilité de discuter d'une coalition avec les libéraux démocrates, troisièmes. Les conservateurs, dans l'opposition depuis 13 ans, leur ont contesté ce droit, prévu par les institutions, en estimant tirer du vote populaire la légitimité à gouverner. «Nous devons attendre les résultats complets pour nous prononcer mais je crois qu'il est déjà clair que le gouvernement Labour n'a plus l'autorité pour gouverner notre pays», a déclaré David Cameron à l'annonce de sa réélection dans sa circonscription de Witney, près d'Oxford (ouest de Londres). Les Tories obtiennent 305 sièges à la chambre des Communes, soit moins que la majorité absolue de 326 députés sur 650 qui leur aurait automatiquement permis de former le gouvernement, selon ce sondage diffusé conjointement par les chaînes BBC, Sky News et ITV. Le Labour du Premier ministre Gordon Brown remporterait 255 sièges. Les libéraux-démocrates, qui avaient effectué une percée dans les sondages grâce à la popularité de leur chef Nick Clegg, obtiendraient 61 sièges. Ce résultat constituerait une déception pour les Lib Dems, qui perdraient deux sièges et feraient beaucoup moins bien qu'attendu. Il les laisserait cependant en position de «faiseurs de roi», susceptibles de soutenir le Labour comme les Tories. Cette configuration d'un parlement «suspendu» (hung parliament), où aucun parti ne détient la majorité absolue, serait une première au Royaume-Uni depuis 1974. Elle n'autorise pas David Cameron à devenir immédiatement Premier ministre et devrait déboucher sur des tractations longues et ardues. Les conventions, en l'absence de Constitution écrite, veulent que le Premier ministre sortant tente en premier de former un gouvernement, sauf s'il estime ne pas pouvoir y parvenir et démissionne. Gordon Brown devrait se tourner vers les Lib Dems pour voir s'il peut conclure un accord de coalition. A eux deux, Labour et libéraux-démocrates disposeraient de plus de sièges (316) que les seuls Tories, sans toutefois décrocher la majorité absolue, selon le sondage. Nick Clegg avait suggéré pendant la campagne qu'il pourrait accepter de travailler avec le Labour, mais aurait du mal à collaborer avec Gordon Brown. Plusieurs ministres travaillistes ont immédiatement laissé entendre qu'ils étaient prêts à discuter avec les Lib Dems. «Evidemment, nous serions prêts à considérer cela», a indiqué Peter Mandelson, numéro 2 du gouvernement. Les discussions devraient être centrées sur la réforme du mode de scrutin souhaitée par les Libs Dems. Les travaillistes y sont favorables, pas les Tories. Réélu dans sa circonscription de Kirkcaldy et Cowdenbeath (Ecosse), Gordon Brown a refusé de concéder la défaite et affirmé être prêt à «jouer (son) rôle pour que la Grande-Bretagne ait un gouvernement fort et stable». Au cas où Gordon Brown n'aurait d'autre issue que de démissionner, David Cameron serait en position d'accéder à Downing Street, soit en passant un accord avec les Lib Dems ou de petits partis comme le Parti unioniste d'Ulster (UUP), soit en formant un gouvernement minoritaire. Le scrutin, qui a connu une forte participation, a aussi été marqué par des anomalies aussitôt dénoncées, dans les principales villes du pays. La commission électorale a annoncé qu'elle allait mener une «enquête approfondie» alors que des centaines d'électeurs n'ont pu voter en raison de longues files d'attente.