Quand on demande à Ahmed Laaroussi Chater pourquoi il écrit, il répond : « parce qu'on m'a appris ». Le passé intérieur, son tout premier recueil de nouvelles , paru aux Editions Marsam, dénote le même esprit caustique. C'est un regard sans complaisance sur notre société …intérieure. Il y a là le Maroc d'hier, celui d'aujourd'hui et, dans une certaine mesure, le Maroc du jour d'après. Le Soldat et Le fusil, deux des textes les plus fournis, appartiennent au passé proche. Une beuverie est une affaire de justice qui a mal tourné dans le Maroc actuel. Le chien, a, quant à lui, les accents d'une annonce de lendemains qui chantent faux. S'il marie les temps avec bonheur, l'auteur manie également bien les modes. En particulier, cette tradition orale qui préside à la communication de masse dans notre société et, qu'il place en amont de nouvelles comme Aicha Kandicha, Assif, Le mouton ou le mendiant. Ce sont des histoires familières, mais Ahmed Laaroussi Chater les narre à sa manière, c'est-à-dire un peu comme ces conteurs des places publiques d'antan, qui faisaient rêver en cercle, jusqu'à ce que le muezzin appelle à faire place nette à la prière . Ils sont de plus en plus rares, ces contes du crépuscule. C'est une tradition qui se perd même à Jamâa Alfna. S'il ne devait avoir qu'un seul mérite, Le passé intérieur pourrait valablement prétendre à celui-là. Mais ce recueil est également composé de nouvelles dont certaines ne laissent pas d'intriguer. Ainsi de ce revenant qui importune son ami à le rendre malade, ainsi de ce chien qui annonce la fin de l'humanité. Il y a dans ces textes de l'éthique, de l'esthétique et sans doute aussi, un cri d'alarme. Le passé intérieur ? Un florilège de nouvelles à lire, avant la parution de ce Présent du subjectif que l'auteur nous promet pour bientôt.