Joe Biden a conclu lundi une visite éclair à Hanoï, qu'il a qualifiée d' »historique », entre discussions économiques, mise en garde à la Chine, et hommage à un héros américain de la guerre du Vietnam. Le président s'est envolé pour une base militaire en Alaska, afin de marquer sur le sol américain le souvenir des attentats jihadistes du 11 septembre 2001. Soit un véritable tour du monde en cinq jours du démocrate de 80 ans, qui entendait faire une démonstration de la puissance américaine sur le pas de porte de la Chine. Il a passé quelque 24 heures dans la capitale vietnamienne, et annoncé entre autres une juteuse commande pour le géant américain Boeing, d'une valeur de 7,8 milliards de dollars (7,28 milliards d'euros). Joe Biden a mis en garde Pékin, de manière implicite, contre « les menaces ou l'usage de la force » en mer de Chine méridionale, dans un communiqué commun signé avec le chef du parti communiste vietnamien Nguyen Phu Trong. Le président démocrate avait rencontré dimanche l'homme fort du régime. Il a été reçu lundi par le président Vo Van Thuong et a participé, avec le Premier ministre Pham Minh Chinh, à une réunion de dirigeants d'entreprises des deux pays. Le Vietnam et les Etats-Unis ont signé un accord de partenariat stratégique renforcé, à forte teneur économique et technologique. La Maison Blanche, dans un communiqué publié dimanche, a vanté « la capacité (du pays du Sud-Est asiatique) à jouer un rôle essentiel pour monter des chaînes d'approvisionnement de semi-conducteurs robustes ». En clair: moins dépendantes de la Chine. L'accord doit garantir aux Etats-Unis que Joe Biden veut réindustrialiser à grande vitesse, des approvisionnements de composants électroniques essentiels. Le Vietnam, lui, peut espérer l'appui des Américains pour développer ses capacités de production. Joe Biden a répété dimanche, lors d'une conférence de presse, qu'il ne voulait ni « isoler » ni « contenir » la Chine, et encore moins lancer une « guerre froide ». Mais il s'est fait un plaisir de souligner les « difficultés » sociales et économiques du géant chinois. Le président américain a conclu son passage à Hanoï par une évocation de la guerre du Vietnam (1955-1975). Joe Biden, qui briguera en 2024 sa réélection, s'est recueilli à l'endroit, marqué d'une stèle, où l'avion de John McCain avait été abattu le 26 octobre 1967. Grièvement blessé, le pilote de chasse avait été fait prisonnier, incarcéré pendant plus de cinq ans et torturé. Le héros de guerre était ensuite devenu une figure du Parti républicain, sénateur et candidat malheureux à la présidentielle contre Barack Obama. John McCain est mort en 2018 d'un cancer du cerveau. « Il me manque, c'était un bon ami », a déclaré le président américain, un centriste très attaché au consensus et au dialogue. Une amitié pareille, entre un démocrate de premier plan et un républicain influent, est difficilement concevable dans l'Amérique d'aujourd'hui, tant la présidence de Donald Trump a creusé les clivages partisans. John McCain a oeuvré pour panser les plaies entre le Vietnam et les Etats-Unis, tout comme John Kerry, lui aussi un ancien combattant. Aujourd'hui principal négociateur américain sur les questions de climat, il était présent dans la délégation de la Maison Blanche à Hanoï. Joe Biden, lui, est resté étranger à ce conflit si marquant pour sa génération. Il n'a pas combattu, exempté pour des questions universitaires et de santé. Il n'a pas non plus manifesté contre la guerre. Son choix de commémorer les attentats du 11 septembre 2001 en Alaska est inhabituel, à défaut d'être complètement inédit. Le plus souvent, le « commandant en chef » se rend ce jour-là à New York ou sur l'un des autres lieux qui avaient été attaqués.