Donné perdant par tous les sondages qui avaient précédé les législatives anticipées du 23 Juillet dernier, le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) de Pedro Sanchez avait recueilli 31,7% des suffrages exprimés et remporté 122 sièges de députés à l'issue de ce scrutin, mais en considérant que son allié de la gauche radicale, SUMAR, avait obtenu 31 sièges, on peut dire que la gauche a obtenu 153 sièges alors que le bloc de droite constitué du Parti Populaire et de VOX dispose de 169 sièges. Mais, bien qu'il ait obtenu un nombre de sièges inférieur à celui de son rival de droite, Pedro Sanchez se trouve dans une situation moins inconfortable que celle d'Alberto Núñez Feijóo dans la mesure où il a, encore, la possibilité de bénéficier de l'appui des Catalans d'ERC et des Basques de Bildu, pour qui Vox fait figure d'épouvantail. Si une telle « configuration » permettrait à Pedro Sanchez de se maintenir au pouvoir en rassemblant autour de lui 172 députés – ce qui serait largement suffisant lors d'un deuxième vote d'investiture par le Parlement car seule la majorité simple est requise – ce soutien n'est pas encore acquis et la « manœuvre n'est pas facile » à en croire le journal de centre-gauche « El Pais » dans la mesure où la formation d'une coalition gouvernementale de gauche reste subordonnée au vote favorable des sept députés de « Junts per Catalunya » (JxCat) de l'indépendantiste Carles Puigdemont. Mais ce parti dont le leader est exilé en Belgique depuis la tentative de sécession de la Catalogne de 2017 ne serait pas prêt à voler au secours de Pedro Sanchez sans contrepartie et notamment avant une amnistie générale pour toutes les personnes sanctionnées pour tentative de sécession et la tenue d'un referendum d'autodétermination. En rappelant, par ailleurs, qu'à la date du 31 Juillet, les blocs de droite et de gauche cumulent chacun 171 sièges au Congrès, le site de gauche « El Salto » affirme d'ores et déjà que le leader du Parti Populaire, Alberto Núñez Feijóo, qui n'est toujours pas parvenu à séduire d'autres potentiels alliés, n'a « aucune chance » d'être investi Premier ministre. De l'autre côté, même s'il n'est pas encore arrivé à obtenir le soutien de « Junts per Catalunya », Pedro Sanchez pouvait encore espérer obtenir, de la part de ce dernier, une abstention qui lui aurait permis d'être élu au second tour à la majorité simple avant que le vote des espagnols de l'étranger ne vienne changer la donne en inversant les résultats d'une circonscription de Madrid au profit du Parti Populaire. Or, le fait que Pedro Sanchez ne puisse plus espérer être élu si les sept députés du parti indépendantiste catalan et l'élu de la Coalition canarienne s'abstiennent a relancé l'espoir dans le camp de la droite si bien que le Parti Populaire s'est dit prêt à renouer le dialogue avec les indépendantistes catalans « tant qu'il reste dans le cadre constitutionnel » ; ce qui n'a que très peu de chance d'aboutir au vu de la fermeté qu'a toujours opposé le PP aux revendications catalanes. Au vu de tout ce qui précède, si d'ici au 17 Août – date à laquelle aura lieu la constitution du prochain congrès des députés – aucun des deux blocs ne parvient à trouver une majorité, l'Espagne, qui a déjà connu quatre élections générales entre 2015 et 2019, va se retrouver dans une situation de blocage politique qui la mettra au-devant de la nécessité d'organiser un nouveau scrutin. En considérant, enfin, que les espagnols ne connaissent pas encore le nom de leur prochain chef de gouvernement, on peut dire qu'à l'heure qu'il est l'avenir politique de l'Espagne est encore incertain mais attendons pour voir... Nabil EL BOUSAADI