Quarante-cinq dirigeants européens se sont réunis jeudi en sommet en Moldavie avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, défiant le président russe Vladimir Poutine dans ce petit pays frontalier de l'Ukraine et qui vit aussi dans la crainte de la Russie. Les participants au sommet se retrouvent ainsi à seulement 20 km de l'Ukraine pour envoyer un message de soutien à ces deux anciennes républiques soviétiques, alors qu'une nouvelle attaque aérienne a frappé Kiev tôt jeudi matin, tuant au moins trois personnes dont un enfant. La Russie multiplie depuis début mai les attaques de drones et de missiles sur Kiev, souvent de nuit. L'Ukraine accuse Moscou de vouloir « terroriser » la population civile tandis que la Russie affirme toucher des cibles militaires. Parallèlement, une ville de la région russe de Belgorod, frontalière de l'Ukraine, a été visée dans la matinée par des « frappes ininterrompues » qui ont fait huit blessés. La Russie a annoncé l'évacuation de centaines d'enfants en raison de l'intensification des bombardements dans cette région. « Je suis heureux d'être ici », a lancé le président ukrainien devant les caméras, avant de remercier le peuple moldave « d'avoir accueilli de nombreux réfugiés depuis la premier jour de la guerre ». Les chefs d'Etat et de gouvernement ont été conviés au château Mimi, un domaine viticole dans le village de Bulboaca, à 35 km de la capitale Chisinau, pour la deuxième réunion de la Communauté politique européenne (CPE). « Nous allons confirmer de nouveau notre soutien à l'Ukraine qui résiste face à l'agression russe », a souligné la présidente moldave Maia Sandu. Comme lors de sa première édition à Prague en octobre, la CPE donnera lieu à une « photo de famille ». La réunion compte cette fois un absent de marque, le président turc Recep Tayyp Erdogan, réélu dimanche. Prise dans ce village proche de la Transdniestrie, région séparatiste pro-russe de 300.000 habitants dans l'Est du pays, la photo soulignera l'isolement de Poutine. « La Russie de Poutine s'est exclue elle-même de cette communauté en lançant cette guerre contre l'Ukraine », a souligné le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell. « J'espère que la présence de tant de dirigeants ici, tout près de l'Ukraine, enverra un message fort sur l'unité de nombreux Etats, pas seulement de l'Union européenne, pour défendre l'ordre international », a-t-il ajouté. Rassemblement beaucoup plus large que l'UE (20 pays ont été invités en plus des 27 membres du bloc), la CPE, imaginée par le président français Emmanuel Macron, réunit des pays aux profils et parcours très différents: Arménie, Géorgie, Islande, Norvège, Suisse, Turquie, Royaume-Uni, Serbie, Azerbaïdjan… Pour la Moldavie comme pour l'Ukraine, c'est l'occasion de redire leur impatience de rejoindre l'UE. « La place de la Moldavie est dans l'Union européenne », a déclaré mercredi Maia Sandu. Elle a reçu le même jour un message d'encouragement de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen qui a loué les « progrès énormes » du pays dans ses réformes. L'Ukraine et la Moldavie ont obtenu ensemble le statut de candidat officiel en juin 2022. Mais la route est encore longue. Emmanuel Macron a appelé l'UE à repenser sa gouvernance et à « inventer plusieurs formats » pour répondre à ces aspirations. Les dirigeants devraient aussi évoquer jeudi la sécurité de l'Ukraine alors que les chefs de la diplomatie des pays de l'Otan sont rassemblés à Oslo pour répondre à la demande de Kiev d'adhérer à l'Alliance atlantique. « Nous avons toujours dit qu'il devait y avoir des garanties pour un ordre de paix après la guerre et l'Allemagne y contribuera. Nous devrons discuter de leur forme concrète », a déclaré le chancelier allemand Olaf Scholz. La CPE sera aussi l'occasion de quelques discussions bilatérales ou en formats restreints entre dirigeants. Elle pourrait aider à faire baisser les tensions dans le Nord du Kosovo, où des violences ont éclaté le week-end dernier entre manifestants serbes et policiers, faisant 30 blessés parmi les soldats de la force de l'Otan déployés sur place. Emmanuel Macron doit rencontrer jeudi, avec Olaf Scholz, la présidente kosovare et le président serbe lors de deux réunions distinctes. Par ailleurs, les dirigeants arménien et azerbaïdjanais, en pleine négociation pour mettre fin à leur conflit, doivent aussi se rencontrer sous l'égide d'Emmanuel Macron, d'Olaf Scholz et du président du Conseil européen Charles Michel. Erevan et Bakou s'affrontent depuis des décennies pour le contrôle de la région azerbaïdjanaise du Nagorny Karabakh peuplée majoritairement d'Arméniens. Les négociations entre Arménie et Azerbaïdjan se sont intensifiées et semblent avoir enregistré des progrès ces dernières semaines, sous l'impulsion de l'UE et des Etats-Unis.