Grâce Royale au profit de 1.304 personnes    Rabat International Fashion Fair 2025 : La mode mondiale débarque à la capitale    Vignette : le paiement électronique est gratuit (DGI)    Tourisme: L'ONMT entame une tournée régionale pour fédérer les acteurs clés du secteur    Ould Errachid souligne l'importance de la dimension parlementaire dans la dynamique des relations maroco-françaises    Rougeole : 47 cas d'infection recensés dans neuf établissements pénitentiaires    CHU Ibn Sina, l'ouverture en 2026 est-elle réalisable ?    Taxis vs VTC : Les syndicats ouverts au dialogue [INTEGRAL]    Artisanat : publication de dix enregistrements de marques déposées auprès de l'OMPIC    Maroc-Azerbaïdjan : L'accord de coopération militaire approuvé par le président Aliyev    Football : Opération réussie pour Yahya Attiat-Allah après sa blessure    Le Roi félicite Joseph Aoun pour son élection à la présidence du Liban    RNI: Aziz Akhannouch préside une réunion du bureau politique    Moroccan Actor Saïd Taghmaoui's Los Angeles home lost to fires    Spain honors Moroccan relief teams in ceremony celebrating solidarity after devastating floods    La croissance au Maroc s'établirait à 3,2 % en 2025, selon l'ONU    Réunions des commissions chargées de la révision des listes électorales    Casablanca. La diversité culturelle au cœur des célébrations d'Id Yennayer 2975    Paris. Le caftan à l'honneur    Histoire : Caligula a tué le roi romain de Maurétanie à cause d'un manteau de pourpre    Températures prévues pour le samedi 11 janvier 2025    CDM (f) U17 Maroc 25: La CAF dévoile son programme qualificatif    Côte d'Ivoire: M. Ouattara affirme ne pas avoir pris de décision au sujet de sa candidature à la Présidentielle de 2025    L'influenceur Doualemn expulsé puis renvoyé en France : «L'Algérie cherche à humilier la France», clame Bruno Retailleau    Le chinois Jingye Group rejoint le gazoduc Afrique atlantique    CCAF : Un arbitre burundais pour Lunda-Sul vs RSB.    Découverte des épaves de deux navires archéologiques au large d'El Jadida    Sao Tomé-et-Principe. Carlos Vila Nova nomme une nouvelle Première ministre    L'Afrique du Sud et l'Algérie vont adorer cette décision américaine    Le Jardin Zoologique National : 6 millions de visiteurs en 13 ans    Des experts US s'informent à Rabat de l'expérience marocaine en matière juridique et judiciaire    Cour des comptes : El Adaoui au Parlement mercredi    A Scandal Tarnishes Mandela's Legacy... His Grandson, the "Icon" in Algeria, Accused of Theft and Crime    19th-century shipwrecks discovered off El Jadida coast    LDC: Le Raja sans ses supporters face à l'AS FAR    Football: La FRMF et les Ligues Nationales tiendront leurs AG le 13 mars prochain    Le régime algérien refuse de reprendre ses "porte-paroles" de la France... Un pays qui jette ses citoyens au-delà de ses frontières    Los Angeles : Saïd Taghmaoui témoigne du cauchemar des incendies    Poutine "ouvert au contact" avec Trump sans condition préalable    Air Arabia inaugure un nouveau vol direct Rabat-Oujda    La CGEM réitère l'importance de la promulgation de la loi sur la grève    Air Arabia lance une ligne Rabat-Oujda à 350 dirhams    Marrakech. 15.000 marathoniens attendus le 26 janvier    La FRMF et les Ligues Nationales tiendront leurs Assemblées Générales le 13 mars prochain    PLF 2024 : Lekjaa annonce une réduction du déficit budgétaire à 4 % du PIB en 2024    La décision du Ghana de rompre ses relations avec le "Polisario" suscite un large intérêt dans la presse italienne    FLAM 2025 : Un festival du livre ouvert sur l'Afrique, pour connaisseurs et non-initiés    Adieu L'artiste...    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



« ...et même là où l'on tolère l'attrait, c'est par la forme seule que les couleurs obtiennent leur noblesse. »
Publié dans Albayane le 24 - 11 - 2022


Abdessamad Bouysramne
Kant, « Critique de la faculté de juger », paragraphe 14.
La couleur parlante
La couleur recèle un monde infini à explorer, par quoi tout s'offre et existe. Dans le sens de l'infinité des possibilités de son emploi et des explorations qu'elle permet et qui est le fondement de l'art pictural. Ce que Deleuze a coutume d'appeler les « blocs de couleurs » pour désigner le sujet/objet de l'art de peindre. Chaque artiste y va de sa palette rendant compte de ses potentialités expressives. C'est la première chose qui nous fait face chez lui et qui nous le fait connaître. On peut construire une peinture autour d'une seule couleur comme de plusieurs dizaines. Question de maîtrise fédérée à l'état d'âme, à l'emballement spirituel du moment. Ce que je crée part de moi et emprunte mes outils et mes choix.
Dans le travail de Bouysramne axé sur le monochrome, cela est d'une évidence certaine par le choix d'une certaine réduction du chromatique, dépouillée de ce qui est encombrant, existant par ce qui émane de lui, mais dont le pouvoir de suggestion est très fort. Cela permet au regard de palper plus aisément non pas le sens mais l'affect inspiré qui est derrière. Dans un premier temps, bien sûr. Car il y a une disposition, un emplacement, une réitération remarquable d'une donnée propre à lui dans ses travaux artistiques. C'est abstrait et assez minimaliste. Pas de référence au réel et avec du peu. L'artiste institue une surface principale couvrant toute la toile, puis deux formes minuscules y sont déposées : l'une assez grande et l'autre plus minuscule à côté, décalée. Un même espace donc, celui du tableau les réunit, chacune ayant sa propre couleur. Or tout cela n'est que le vu, le visible, le donné. Le monde exprimé par ces trois étages de couleurs dialoguantes, se répondant, font valoir ce qui est plus englobant, ce fond premier, qui est d'une présence incontournable, une base en même temps.
Le dit de la trace
De quoi s'agit-il au juste ? Là, se dessine l'apport, qui est la particularité agissant comme ajout et comme différence : la lettre, celle de la calligraphie arabe qu'il avait déjà investie artistiquement et librement lors d'une première expérience dans des toiles d'un esthétisme épuré et transparent et où il a excellé et obtenu un prix national. Dans cette expérience nouvelle, l'artiste peint la lettre à l'infini, pour créer un bain coloré à la tenture unique. La lettre arbitraire mais actuelle par sa présence neutre s'écrit autrement, loin de son attribution première qu'est d'être dans la signification de ce qui peut être déchiffré ou épelé, dans la lecture, mais où elle disparaît pour ainsi dire. Sa répétition par l'artiste en soubassement renforce cela et constitue un enchevêtrement équilibré et presque plein, car elle accapare le plus de surface et reçoit les deux formes citées ci-haut. C'est une construction en strates dont la base est comme matricielle, générant ce qui s'adosse à elle. La lettre est à la base de l'écriture qui est à la base de la pensée. Lettres et formes prises dans une esthétique de couleur dont on ne peut qu'être doublement sensible.
La grande fonctionnant comme présence et effacement : un aplat dense, criant, consistant de la même couleur que le fond à lettres. L'autre employée comme un signe, accent ou comme une ponctuation qui arrête la marche du regard déjà aiguisé, dans son voyage au sein de la toile. On est transporté en une alchimie forme/couleur, cette relation dont le poète Oscar Wilde dit : « l'art est plus abstrait que nous l'imaginons, la forme et la couleur nous parle de forme et de couleur, et tout s'arrête là ». Autrement dit, tout est exprimé là. Le carré du fond et les aplats et les petites taches nous parlent le langage de l'émotion. On passe du noir, du rose, du bleu, du violet, du marron vers, un pour chaque couleur citée, du blanc, du jaune du vert ou du rose en, plus petit. Tout est clair, net, qui célèbre la beauté pure du geste créateur. Un mouvement à trois étapes qui donne vie à l'œuvre et la fait entrer dans une esthétique réactive intérieurement, d'elle-même.
Le remplissage patient et soucieux d'un accomplissement bien fait qui ne laisse rien au hasard comme lorsque l'on écrit un texte. Ici muet, insensible, tant que le deuxième geste n'est pas entrepris, celui de faire passer un pinceau large et sûr au milieu, un grand cri, une semblant de rébellion tranquille, rejoint tout de suite par un point (final ou marqueur d'une suspension momentanée). Une référence textuelle qui convient bien à ce travail qui détourne, pour une réception différente de l'acte de la création.
La matière/réceptacle
Une autre expérience artistique confirme ce choix, celle des installations. Elle est en contact direct avec la matière. Les symboles et les signes, chiffres ou lettres sont tracés à même la terre mouillée malléable au creusement, déjà circoncise et limitée par une géométrie intentionnelle éclatée à certains endroits. Ici, il s'agit de la matrice première, qui donne et accueille la vie, entre l'apparition première et l'aboutissement final. Ne demeurent que les marques laissées par le passage, elles-mêmes provisoires. On voit dans cette expérience l'existence flagrante et voulue d'un pas ici ou là. Trace d'un pied nu, d'une sandale bizarrement affichant une couleur bleue, l'immersion préméditée de l'artiste sans doute pour dire, signer ou expliciter la pensée qui gère la réalisation artistique. Ce qui n'est que vrai. Tout art provient de recherches assidues, guidé par l'idée qui les nourrit. Nicolas Poussin n'a-t-il pas dit : « de la main du peintre ne doit sortir aucune ligne qui n'ait été formée auparavant dans son esprit ».
Abdessamad Bouysramne offre ici un bel exemple de réalisation plastique gorgée de talent et suscitant à bon escient des réflexions tant esthétiques qu'intellectuelles.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.