Nabil El Bousaadi Après la fuite, le 9 Juillet, du président Gotabaya Rajapaska, dit le «Terminator», qui dirige le Sri Lanka depuis Novembre 2019, et la démission envoyée, par ce dernier, de Singapour le surlendemain et entérinée par le Parlement le 15 Juillet, il a été procédé le 20 Juillet à l'élection de son successeur en la personne de Ranil Wickremesinghe, âgé de 73 ans. Mais, loin de calmer la contestation qui secoue le pays depuis près de quatre mois, et qui reproche au président-démissionnaire, qu'elle qualifie de «lâche» ayant «ruiné» le Sri-Lanka, l'élection de celui que la rue désigne comme étant un allié du clan Rajapaksa dès lors qu'il avait déjà été son Premier ministre, n'a fait qu'attiser un brasier fumant car, en affirmant vouloir poursuivre leur lutte, les manifestants ont refusé de quitter le secrétariat de la présidence qu'ils occupent depuis le 9 Juillet. Mal leur en prit car il n'en fallait pas plus pour que le nouvel homme fort du pays n'use de menaces en déclarant, à l'adresse des récalcitrants, que, pour lui, «essayer de renverser le gouvernement, occuper le bureau du président et celui du premier ministre, ce n'est pas de la démocratie, c'est hors-la-loi». Aussi, même si l'«Aragalaya», ce mouvement citoyen qui a poussé le président Gotabaya Rajapaska à la fuite puis à la démission, avait déjà évacué plusieurs symboles du pouvoir, le refus d'obtempérer manifesté par les occupants du secrétariat de la présidence a donné au nouveau chef de l'Etat, l'occasion de faire sa première démonstration de force et, en conférant aux forces armées et à la police des pouvoirs étendus, l'état d'urgence, instauré depuis le début de la semaine, était là pour compliquer une situation déjà fort explosive. Ainsi, vingt-quatre heures à peine après la prestation de serment du nouveau président, les évènements ont pris une tournure dramatique car vendredi, vers 1 h du matin, les forces de sécurité, en tenue anti-émeutes, ont délogé, sans ménagement, les manifestants qui se trouvaient aux abords et à l'intérieur du secrétariat présidentiel ; un assaut qui a fait dire à une manifestante, encore sous le choc : «nous dormions dans le secrétariat, transformé en bibliothèque quand les forces de l'ordre ont commencé à nous frapper (alors même que) nous nous apprêtions tous à partir dans l'après-midi». «Nous nous sommes mis à genoux, les suppliant de ne pas nous frapper mais ils l'ont fait malgré tout», dira un jeune photographe qui se trouvait à l'intérieur du secrétariat présidentiel. Le lendemain matin, plusieurs manifestants portaient encore les marques de ces violences et l'un d'eux, blessé au visage et à la main dira : «nous savions à quoi nous nous exposions lorsque nous avons entamé ce mouvement mais l'arsenal déployé est celui que l'on réserve généralement aux terroristes». Enfin, en dépit de la démission et du départ de l'ancien président Gotabaya Rajapaska à Singapour où «il n'a pas demandé l'asile politique» du moment qu'à en croire certaines sources proches de la sécurité sri lankaise, il se préparerait à effectuer un exil doré aux Emirats Arabe Unis, rien, pour l'heure, n'indique que le pays se prépare à reprendre une activité normale mais attendons pour voir...