La première Coupe du monde de l'histoire sur le continent africain, remportée dimanche dernier par l'Espagne, fut un triomphe en termes d'organisation pour l'Afrique mais elle a manqué de clinquant au niveau du jeu. Des stades modernes et splendides, une foule enthousiaste et, n'en déplaise aux mauvaises langues, aucun incident majeur... L'Afrique du sud peut être fière d'elle. Malheureusement pour les quelque trois millions de spectateurs (troisième affluence totale de l'histoire) et les milliards de personnes rivées à leurs petits écrans, le tournoi n'a jamais vraiment décollé là où cela compte le plus, sur le terrain. Une pénurie de buts, peu de rencontres réellement inoubliables, un temps hivernal et peu de stars qui répondent présent, la Coupe du monde a globalement déçu. Le manque de buts en est le syndrome numéro un. Le tournoi a commencé avec 28 misérables buts sur les 17 premiers matches et, malgré des phases finales plus prolifiques, le Mondial s'achève avec 145 buts en 64 matches, soit une moyenne de 2,27, la seconde plus mauvaise de l'histoire après les 2,21 buts par match de 1990 en Italie. Le Jabulani, le ballon officiel, et sa tendance à s'envoler très haut dans les airs, a été pointé du doigt mais il faut aussi souligner le manque de qualités techniques de nombreux joueurs. Le facteur principal de la pénurie de buts est ailleurs. Dès les premiers matches, les équipes sont apparues plus occupées à préserver leur solidité défensive qu'à inquiéter l'adversaire et les matches nuls insipides se sont multipliés - six lors des 13 premières rencontres. Où étaient les stars ? Ensuite, les contre-performances des grands noms du football n'ont pas contribué à apporter un peu de folie à la compétition. Qui aurait pu imaginer avant le Mondial que Lionel Messi, Wayne Rooney, Fernando Torres et Kaka traverseraient le tournoi sans inscrire le moindre but ? Et que Didier Drogba et Cristiano Ronaldo n'en compteraient qu'un seul à l'heure de rentrer chez eux ? Faut-il y voir les conséquences sur les organismes d'une longue saison ? Du poids de l'attente ? Du manque de temps pour récupérer de blessures, que ce soit pour Torres ou Drogba ? Un peu de tout cela sans doute. En théorie, le temps hivernal devait être un facteur favorable, permettant aux joueurs de ne pas souffrir de la chaleur et d'exprimer la pleine mesure de leur potentiel physique. En théorie... Si de nombreux grands joueurs ont déçu, plusieurs «grandes» équipes aussi. L'Afrique décevante Pour la première fois de l'histoire, les deux finalistes de la précédente édition - l'Italie et la France - sont sortis par la petite porte dès le premier tour, sans gagner le moindre match. Les Bleus y ont ajouté une crise extra-sportive qui a viré à l'affaire d'Etat. L'Angleterre a fait à peine mieux. Sortie dans la douleur d'un groupe C pourtant facile, elle a sombré en huitième de finale contre l'Allemagne (4-1), ce qui n'a pas empêché Fabio Capello de conserver son poste. L'Amérique du Sud a d'abord brillé, Argentine et Brésil en tête, avant de céder sous les coups de boutoir d'une Vieille Europe toujours verte, qui a remporté son premier titre mondial hors de ses terres. La route des deux poids lourds du football sud-américain s'est arrêtée brutalement en quart de finale, face à l'Allemagne pour l'Albiceleste, contre les Pays-Bas pour la Seleçao. Même l'Afrique, que l'on espérait à la fête avec un record de six participants, n'a guère réussi son Mondial. L'Afrique du Sud restera dans les livres d'histoire du football mondial comme le premier pays hôte éliminé au premier tour. Le Nigeria, l'Algérie, le Cameroun et la Côte d'Ivoire n'ont pas fait mieux. Dès lors, tous les espoirs d'un continent se sont reportés sur le Ghana, tombé avec les honneurs et dans la dramaturgie face à l'Uruguay en quart de finale. La main de Luis Suarez sur sa ligne hantera longtemps encore les nuits d'Asamoah Gyan, dont le penalty de la qualification pour le dernier carré s'est fracassé sur la barre transversale à la dernière seconde de la prolongation. Les rares moments de plaisir footballistique auront finalement été fournis par le jeu de passes léché de l'Espagne, qui a toutefois inscrit très peu de buts, les contre-attaques fulgurantes de l'Allemagne et les coups de patte des génies néerlandais. Une chose est cependant sûre et certaine c'est que l'Espagne, efficace et réaliste, a mérité son premier sacre de l'histoire.