«Historique», «une exhibition»: après la très large victoire contre l'Allemagne mardi (6-0) pour accéder au dernier carré de la Ligue des Nations, l'Espagne est séduite par le projet du sélectionneur Luis Enrique, qui met en lumière sa prometteuse jeunesse, à sept mois de l'Euro. Luis Enrique a gagné son pari: critiqué pour le manque de résultats après avoir profondément remanié et rajeuni la Roja, le technicien a apposé un grand point d'exclamation à son projet face à la Mannschaft, pour finir par rallier tout un pays à sa cause. Revenu sur le banc de l'Espagne il y a un an (le 19 novembre 2019) après le décès de sa fille Xana (à 9 ans des suites d'un cancer des os), Luis Enrique a repris en mains une équipe qui gagnait, certes, mais sans identité de jeu. Roberto Moreno, son ex-bras droit et ami, avait réussi à qualifier la Roja pour l'Euro pendant son intérim, mais n'était pas parvenu à séduire sur le fond. Tout le contraire de «Lucho»: depuis son retour, l'Espagne gagne moins (3 victoires, 4 nuls, 1 défaite), mais convainc plus. Un vent de fraîcheur qui rassure les Espagnols, avant l'Euro (11 juin-11 juillet). Car le groupe de 23 joueurs convoqué pour cette dernière fenêtre internationale de 2020 compte pas moins de 16 joueurs âgés de moins de 25 ans. Sans compter le prodige du FC Barcelone Ansu Fati (18 ans), blessé au genou gauche et absent jusqu'au printemps. Et parmi eux, deux jeunes hommes de moins de vingt ans, les joueurs de Manchester City Eric Garcia (19 ans) et Ferran Torres (20 ans), qui ont tout deux brillé mardi à Séville. Garcia a remplacé le capitaine Sergio Ramos au pied levé (41e), quand ce dernier a dû quitter la pelouse en grimaçant, victime d'une «gêne musculaire aiguë au biceps fémoral droit», d'après la Fédération espagnole. Et que dire de la soirée de rêve de Torres ? Le jeune ailier, formé à Valence, a inscrit le premier triplé de sa carrière professionnelle mardi soir (33e, 55e, 72e), qui plus est sous le maillot de la Roja, et a gonflé son total de buts en équipe nationale à 4 réalisations en 7 sélections, pour donner raison à son sélectionneur. «Ferran Torres a été le grand magicien d'une soirée remplie d'art et de métier», a encensé le journaliste Tomas Roncero dans le journal espagnol As, mercredi. Son association avec Ansu Fati sur le front de l'attaque espagnole, en concurrence avec les très prometteurs Dani Olmo, Mikel Oyarzabal, Adama Traoré voire Marco Asensio, fait déjà rêver. Et le festival offert par cette jeunesse espagnole à Séville a enchanté la presse nationale, qui a amplement savouré ce succès historique (la Mannschaft n'avait plus perdu un match par six buts d'écart depuis 1931 contre l'Autriche, 6-0). «Exhibition historique !», «mémorable raz de marée», a titré Marca, le quotidien le plus vendu d'Espagne, ce mercredi à sa Une. «Raclée historique», a célébré As. «Le spectacle enthousiasmant de la Roja est un coup de boost total pour le projet de Luis Enrique en vue du prochain Euro», a résumé le journal catalan Sport. «J'étais optimiste avec ce que je voyais, et encore, il y a des joueurs sur le côté qui peuvent venir nous apporter des choses. J'espère que cette victoire sera un nouvel élan», a souhaité l'ancien technicien du Barça en conférence de presse d'après-match, mardi soir. «Luis Enrique nous a prouvé à nous, les sceptiques, que son chemin mène bien à un but : à jouer comme ils ont joué hier», a approuvé le réputé journaliste et observateur espagnol Alfredo Relaño dans As, ce mercredi. Est-on en train d'assister à la renaissance de l'illustre équipe d'Espagne, auteur du triplé Euro-Mondial-Euro en 2008, 2010, 2012 ? Réponse à l'Euro dans sept mois, puis au «Final four» de Ligue des Nations, où la Roja pourra croiser les Bleus.