De son exil lithuanien, Svetlana Tikhanovskaïa, l'opposante numéro un au régime d'Alexandre Loukachenko – celle qui avait galvanisé les foules durant la campagne électorale et qui revendique la victoire à l'issue du scrutin contesté du 9 Août dernier – a lancé ce mardi, sur les réseaux sociaux, un ultimatum au chef de l'Etat exigeant que ce dernier se dessaisisse du pouvoir au plus tard le 25 octobre prochain ; faute de quoi, elle appellera ses concitoyens à une grève générale. «Nous avons dit, à plusieurs reprises, que nous étions prêts au dialogue et aux négociations. Mais parler de derrière des barreaux de prison n'est pas un dialogue (...) Si nos demandes ne sont pas satisfaites d'ici le 25 octobre, tout le pays descendra pacifiquement dans la rue et, le 26 octobre, une grève nationale de toutes les entreprises commencera, toutes les routes seront bloquées, les ventes dans les magasins d'Etat s'effondreront». Tels furent, en substance, les termes du message par lequel Svetlana Tikanovskaïa, dénonçant la «terreur d'Etat» en Biélorussie, a donné treize jours au vieux Loukachenko pour annoncer sa démission après 26 années de présidence, mettre fin à la dispersion des manifestations par la force et libérer tous les «prisonniers politiques». La mobilisation populaire, exceptionnelle, par son ampleur, dans cette ancienne république soviétique enclavée de l'Europe de l'Est où les élections se tenaient généralement, « pour la forme », confirme que les biélorusses ont soif de changement après vingt-six années d'un règne sans partage d'Alexandre Loukachenko, surnommé «Batka» (petit-père en biélorusse), toujours déterminé à ne pas céder sa place en dépit des critiques que lui a valu sa gestion controversée de la pandémie du Covid-19 et les irrégularités ayant entaché le dernier scrutin présidentiel. Le message lancé ce mardi par la figure de proue de l'opposition biélorusse fait suite à la répression très violente avec laquelle, en faisant usage de canons à eau et de grenades assourdissantes, les autorités avaient dispersé le grand rassemblement hebdomadaire de dimanche dernier à Minsk, arrêté un grand nombre de manifestants et menacé, dès le lendemain, de mater les protestataires en recourant à des tirs à balles réelles «si nécessaire». Pour rappel, depuis le «scrutin truqué» du 9 Août dernier, les biélorusses sont soumis à une très forte pression de la part des autorités à telle enseigne que toutes les principales figures de l'opposition – journalistes, responsables de mouvements politiques ou d'organisations syndicales – sont soit sous les verrous soit en exil à l'étranger. Le dernier d'entre eux, Sergueï Dylevski, membre du «conseil de coordination» formé par l'opposition, «craignant pour sa sécurité», aurait fui le pays, ce lundi, selon des médias locaux. Mais l'appel lancé, ce mardi, par la jeune candidate de l'opposition va-t-il être entendu aussi bien par celui qui règne sur le pays d'une main de fer depuis vingt-six ans que par la population alors qu'une répression féroce s'est abattue sur le mouvement pro-démocratie ? A cette question, Anna Zadora, professeure à l'Université de Strasbourg et spécialiste de la Biélorussie, répond que «les gens de tous horizons sociaux vont continuer à sortir et à manifester et Svetlana Tshikhanovskaïa compte sur çà» alors, attendons pour voir...