Au lendemain de l'annonce impromptue et unilatérale de la décision du département de tutelle de suspendre l'impression et, par conséquent, la diffusion des journaux imprimés, les professionnels qui opèrent encore dans cette branche de la profession ont été pris de panique. Cette crise sanitaire sonnera-t-elle le glas du très noble et vieux journal papier ? Après plusieurs années de résistance, le coup de grâce de la mère nourricière du journalisme moderne viendra-t-il de l'extérieur et non de l'intérieur d'un écosystème ingrat ? Ce que ni la radio ni la télévision et encore moins l'Internet n'ont pu réussir, sera-t-il l'œuvre d'un vilain virus ? Ces interrogations et ces craintes sont légitimes. Et pour cause, depuis près de deux décennies les apprentis sorciers et les nouveaux faiseurs d'illusions ne cessaient de prédire la mort du creuset du journalisme : le journal papier. Même certains journalistes professionnels qui ont usé leurs fonds de pantalon dans les rédactions traditionnelles se laissent emporter par cette maléfique prophétie, certains appelant même à son euthanasie à travers la suppression de l'aide publique aux entreprises de presse. Face à une crise inédite due à l'effritement du lectorat au profit des journaux électroniques et le rétrécissement de la manne publicitaire, les journaux imprimés galèrent depuis longtemps et vivent, en fait, la période la plus sombre de leur existence. Toutefois, face à toutes ces prédictions morbides, le journal papier fait preuve d'un exceptionnel instinct de survie. Au Maroc, tous les journaux imprimés ont manifesté, depuis le début de cette épidémie, une solidarité exceptionnelle. Après la suspension administrative de l'impression, Ils ont, non seulement continué à s'acquitter de leur mission, à travers les canaux électroniques, mais aussi ils se sont dressés avec force et foi contre les méfaits dévastateurs des fake news et contre les marchands des clics. Ils ont fait preuve, tout le monde en témoigne, d'un haut niveau de responsabilité, de professionnalisme, de patriotisme et de dévouement. Aujourd'hui, à la veille de la fin de cette malheureuse parenthèse, ils se préparent au retour du papier avec l'intime conviction de ne jamais céder. Pour ce faire, à travers leurs organes représentatifs légitimes ou le Conseil National de la presse, ils lancent leur énième combat : celui d'inciter les gens à acheter et à lire les journaux. Car, le seul moyen pour sauver et encourager les journaux et le journalisme de qualité reste encore de les acheter et de les lire. La crise est là, mais la résistance s'organise. Pour faire le tour de la question, Al Bayane a donné la parole à une brochette des professionnels et experts.