Soutien aux secteurs sinistrés par Covid19 Mohamed Oueld Alfadel Ezzahou «La responsabilité d'assurer la réalisation du droit à la sécurité sociale incombe globalement et principalement à l'Etat». «Observation générale n°19» adoptée par Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l'ONU en 2007. Une crise économique mondiale sans précèdent a été déclenchée par la pandémie Covid19. Des mesures ont été prises pour prévenir la propagation du virus, entre autres : la fermeture des écoles, des entreprises non essentielles, la distanciation sociale, ainsi que les restrictions des déplacements et la fermeture des frontières. Ces mesures vitales, ont freiné l'activité économique et plongéles économies dans une crise la plus marquée et la plus généralisée depuis celles en 1929 et 1847. Au Maroc, selon le HCP, près de 142000 entreprises, soit 57% de l'ensemble des entreprises, ont déclaré avoir arrêté définitivement ou temporairement leurs activités. Sur ce total, plus de 135000 entreprises ont dû suspendre temporairement leurs activités tandis que 6300 ont cessé leurs activités de manière définitive. Par catégorie d'entreprises, les TPE (très petites entreprises) représentent 72%, les PME (petites et moyennes entreprises) 26% et les GE (grandes entreprises) 2% des entreprises en arrêt d'activités de façon temporaire ou définitive. Le 10 juin dernier, le Chef de gouvernement a annoncé un certain nombre de mesures de relance économique Post-Covid19, à court et moyen terme. Etant donné qu'il s'agira de l'argent du contribuable marocain et afin de sortir du paradigme capitaliste : «Privatiser les profits et nationaliser les pertes», l'analyse sera focalisée, dans ce qui suit, sur la mesure qui consiste, selon le chef de gouvernement, en l'allocation des budgets dédiés aux secteurs sinistrés tels que le tourisme, pour en proposer un mode d'emploi afin de de mieux orienter l'aide publique. Protection sociale des travailleurs : Maillon faible du tissu économique national La crise COVID 19 a révélé que notre tissu économique et social est très fragile et que les performancesaffichées de notre croissance économique cachentune réalité «La croissance par la précarité». Cette réalité est souvent décrite par des instances publiques (HCP)et constitutionnelles (CESE) dans leurs études et rapports, sans que personne ne réagit. Ainsi, la lecture du rapport du CESE 2018, fait ressortir les constats alarmants suivants * Un assuré sur dix cessant d'être déclaré à la CNSS avant l'âge de la retraite, * Un quart de l'effectif global était en mouvement d'entrée ou de sortie. * L'évolution en moyenne annuelle (entre 1996 et 2016) du solde entre les déclarations et les cessations de déclaration au régime de sécurité sociale s'établit à 2,2%. * Dans le secteur agricole, un salarié sur deux est déclaré pour une durée inférieure à six mois sur douze à la CNSS ; il faudra donc deux fois plus de temps pour qu'un salarié régulier puisse obtenir le droit à une pension de retraite. * Seules 15% de femmes dans ce secteur et 37% d'hommes sont déclarés 12 mois sur 12. * Tous secteurs confondus, seuls 49% des actifs étaient déclarés à la CNSS durant les 12 mois de l'année. * Un quart des assurés,est déclaré pour une période moyenne inférieure à six mois * Le nombre de jours annuel moyen déclaré en 2016 pour les actifs des autres secteurs était de 220 jours pour les hommes contre 209 jours pour les femmes, soit 217 jours pour l'ensemble de cette population. * Nombre de mois moyen de déclaration est 9.1 sur 12 et dans les secteurs agricoles est 6.9 mois sur 12 avec un salaire moyen déclaré de 2063Dhs. * 62% des entreprises, déclarent moins de 4 salariés, et 86% des entreprises déclarent moins de 10 salariés, seule une entreprise sur cent (1%) déclare plus de 200 salariés. * Près d'une entreprise sur deux (45%), déclare une masse salariale annuelle inférieure à50 000 Dhs. * 40% des actifs, a perçu des salaires mensuels moyens inférieurs à 2 565 dirhams (SMIG) * La moitié des assurés (50%), perçoit un salaire inférieur à 2 798 dirhams, * Seuls 14% des assurés, ont été déclarés pour un salaire mensuel supérieur au plafond (6 000 Dhs). A tout cela s'ajoute, entre autres, le chiffre inquiétant annoncé par le HCP dans ses notes sur l'emploi, prèsde deux salariés sur trois (62,9%) ne bénéficie pas de contrat de travail et cette proportion atteint 89,4% dans le secteur des BTP. Ces constats préoccupants, nous interrogent tous, sur l'effectivité des lois et des règlements, les responsabilitésdeleurs protecteurs et sur l'utilité de soutenir des entreprises qui sont loin d'être socialement responsables vis-à-vis de leurs forces de travail, de la communauté et de la règlementation. 1. Soutien public aux entreprises sinistrées : vers une reconnaissance des bons élèves De ce qui précède, et à quelque chose malheur est bon, les mesures de relance, Post Covid19 proposées par le gouvernement, est une occasion pour assoir un tissu économique sur des bases solides dont le mot d'ordre est «Un Etat de droit dans le domaine social». Cette crise a montré que l'Homme doit être au centre toute politique publique. Le budget alloué pour soutenir les secteurs sinistrés, doivent avoir double objectif :sauver les entreprises concernées tout en levant les constats alarmants suscités. Pour y parvenir, et afin de combattre la non ou la sous déclaration,on propose d'adopter des clés de répartition de l'aide qui prennent en considération les variables suivantes : * Une moyenne de la masse salariale déclarée (sur 2 au trois ans) ; * Une moyenne des effectifs déclarés ; * Une moyenne des salaires déclarés ; * Une moyenne des nombres de mois par an déclarés (m/12). Cependant, pour les entreprises qui font appel aux entreprises de travail temporaire, et vu la nature de leurs activités, ou car il s'agit d'une culture de son de mangement RH, ces clés de répartition peuvent être déplacées à la société d'intérim, sous les conditions suivantes : * Le contrat d'intérim ou de travail temporaire doit être conclu avec une société autorisée par le Ministère du Travail selon la législation en vigueur (sachant que, seulement près de 50 qui sont autorisées sur plusieurs centaines qui exercent dans l'informel) ; * Les clés sus-mentionnées seront vérifiées chez l'entreprise d'intérim pour que les entreprises clientes et sinistrées bénéficieront de l'aide ; Par ailleurs, deux variables serviront de paramètres de contrôle et permettront de juger aussi l'assiduité des futurs bénéficiaires de l'aide publique : une moyenne des Chiffres d'Affaires annuels déclarés et l'IS déclarés. Puisqu'il est inconcevable qu'une entreprise présumée sinistrée et l'historique de son IS fait ressortir qu'elle a été déficitaire pendant des années avant Covid19. Le Maroc aujourd'hui, et à travers son exécutif et les autres protagonistes, doit faire de ce plan de relance Post Covi19, un instrument, conjugué avec d'autres, pour faire son grand pas vers l'instauration d'un Etat de droit dans le domaine social qui est la seule et la vrai issue vers une croissance inclusive et durable longuement attendue et espérée par le citoyen marocain.