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L'événement
Publié dans Albayane le 17 - 04 - 2020

Il faut se rendre à l'évidence, c'est l'Occident qui crée l'événement et qui continue à faire l'histoire de l'humanité. Depuis sa révolution industrielle, il s'est imposé par ses armes et sa culture. Le moindre de ses gestes imprègne l'univers et touche non seulement le village le plus reculé de la savane et de la forêt vierge mais aussi la tente la plus improbable du désert. Comment cette culture ne serait-elle pas universelle et ne forgerait-elle pas l'esprit de l'humanité entière?
Elle s'impose aux analphabètes aussi bien qu'à nos érudits dans tous les pays du monde. Que l'on soit pour ou contre on réagit par rapport à elle. On construit une culture contre ou comme elle. Elle reste le réfèrent à imiter, où puiser, ou à abattre et à détruire. Tout se construit avec ou contre elle. Tous nos faits et gestes sont pensés par rapport à la culture occidentale : de la politique à la religion, de l'art à la philosophie et de la technologie à l'économie.
Du cinéma muet où Charlot est devenu l'icône, à la musique, avec les Beatles, à la littérature, au théâtre aux arts plastiques, à la télévision, aucun art ne lui échappe. Tous ces Cheikhs qui font leur beurre avec des shows religieux sont des sous-produits des télé-évangélistes des USA. Cette industrie du rêve conquiert les esprits avant de conquérir les territoires. La puissance de l'arme émotionnelle peut rendre le méchant gentil et l'oppresseur justicier. Quand le mensonge s'impose partout, il devient l'unique et seule vérité par la force du nombre et de l'image. C'est à se demander par quel tour de magie et de passe-passe la littérature et le cinéma font que l'opprimé se reconnaisse en son oppresseur et fasse des victoires de son agresseur les siennes. Cette projection sur le vainqueur nie la défaite et par là la mésestime de soi en adhérant au point de vu du plus fort. L'envahisseur se met dans la situation de l'innocent qui ne fait que se défendre et défendre la liberté contre les méchants. Son action violente remet chacun à la place que Dieu, la Liberté, la Civilisation lui ont assigné : la preuve en est que le méchant est toujours puni et l'innocent récompensé. Il est vainqueur comme le veut la morale et le happy end.
Cela s'appelle la mondialisation, l'universalisme ou le cosmopolitisme. Mais ne se fait que dans une seule direction, car, autant Bob Marley est connu dans le monde entier, El Haja El Hamdaouia en est ignorée. D'ailleurs mon correcteur souligne en rouge le nom de la célèbre chanteuse marocaine mais accepte allègrement celui de l'idole du Reggae. Ceci n'est dû ni au hasard ni à la perfection des voix ou des idées des uns et à la vétusté des idées des autres mais à une organisation qui vient de loin. Tous les produits que nous consommons ont derrière eux une histoire, des écoles prestigieuses de commerce, des entreprises de publicités, de distribution et de diffusion, une logistique rodée, un soutien étatique sans failles et une armée.
Ce que l'on oublie et qui n'apparaît pas derrière les produits culturels, c'est leur qualité d'objets industriels et donc commerciaux. L'industrie culturelle ne vend pas seulement des idées et des émotions mais aussi et surtout leur support matériel. La fabrication d'un livre, d'un film, d'un disque (CD ou vinyle) ou tout autre support nécessite une fabrication industrielle autant en amont qu'en aval. La fabrication de la machine qui fabrique l'objet va au-delà du produit lui-même et engage plusieurs processus dans les mines, l'agriculture et enfin la transformation de ces matériaux.
L'Etat bourgeois créée à la suite des révolutions de 1688 et 1789 en Angleterre et en France avaient pour but la participation effective de la bourgeoisie au pouvoir et la fin de la mainmise de l'aristocratie et de l'église sur tous les rouages économiques, politiques et sociaux de ces pays. La rupture entre ces classes de l'ancienne société en Europe n'est pas seulement économique mais elle est aussi culturelle et idéologique. L'Etat au service de la liberté bourgeoise. Les trois éléments importants de cet Etat sont la terre, le peuple et le gouvernement : une nation qui partage une histoire et une langue, vivant dans un territoire délimité par des frontières intangibles et, enfin, tout cela dirigé par un gouvernement qui détient la souveraineté de l'Etat.
Cette souveraineté réside dans les lois que cette classe crée pour frapper la monnaie, défendre par la force des lois ou des armes les intérêts du pays, intérêts qui se confondent souvent avec ceux de la bourgeoisie gouvernante. L'évolution de l'Etat bourgeois était prévisible depuis sa création car inscrite dans la logique marchande de sa naissance: gagner plus et toujours.
L'Etat bourgeois gère un commerce, c'est un Etat entreprise. La politique et les lois ne lui servent qu'à asseoir son pouvoir et assurer la paix sociale pour fructifier son capital. Les forces répressives ne sont là que pour maintenir une paix qui lui assure un droit inaliénable et intrinsèque à son existence, le droit à la propriété et à la liberté. En général la signification de ce dernier terme est occultée. Il ne s'agit pas ici d'une liberté extensive, il s'agit de la liberté des échanges commerciaux dans un système dit, injustement, libéral. Un leurre pour ceux qui ne possèdent rien et qui sont obligés par un système créée de toute pièce de vendre leur temps, leur intelligence et leur savoir faire pour un salaire fixé d'avance. L'Etat identitaire où chaque groupe ethnique garde sa langue, sa religion et sa langue, était la norme avant la création de l'Etat nation où tout est standardisé et centralisé, le pouvoir, les traditions, la religion et les langues.
Les juristes ont remplacé la tribu ou le groupe ethnique par un ensemble hétéroclite de tribus pour former une nation soumise à un chef et aux mêmes lois. La bourgeoisie qui a financé l'aristocratie et l'Eglise a pris le pouvoir pour gérer ses propres biens elle-même. Dès la prise du pouvoir par les marchands la voie de l'Etat était tracée. Le bénéfice, la libre propriété des biens, le libre échange deviennent le droit.
Les failles de cet Etat sont nombreuses et sont révélées par des révoltes des classes défavorisées. Mais chaque émeute, chaque révolte est réprimée dans le sang et sert à l'Etat d'apprendre à s'adapter aux nouvelles situations que les émeutiers, les syndicats ou les difficultés de s'enrichir lui opposent. L'Etat bourgeois a une capacité phénoménale de s'adapter à toutes les situations qui lui font gagner de l'argent. Il peut agir avec tous les moyens dont il dispose et ils sont nombreux. Il ne reculera devant aucune difficulté pour imposer sa politique et son idéologie de la corruption aux assassinats, des guerres aux coups de mains barbouzesques.
L'Etat détient tous les monopoles à l'intérieur des frontières du pays avec ce qui en est les prolongements maritimes et aériens. C'est ce qu'il appelle la souveraineté de l'Etat. Aucune entité qu'elle soit nationale, régionale ou étrangère n'a le droit d'empiéter sur les acquis de la bourgeoisie régnante et qui datent du XVI siècle. Si les grandes révolutions anarchistes, communistes, religieuses ou fascistes ont été matées aux pris de millions de vies humaines les donnes sont en train de changer. Et ce que furent les piliers de l'Etat bourgeois sont, de plus en plus, remis en cause.
Depuis les manifestations estudiantines en 1968, l'ancienne forme de cet Etat qui détenait tous les pouvoirs commence à être battue en brèche. L'une des actions entreprises par des jeunes est la tentative de briser son monopole sur les moyens d'information, la radio en particulier. En détournant l'une des règles sacrées de l'Etat sur la souveraineté territoriale, les jeunes ont pu créer une radio libre qui émettait à partir d'un bateau en haute mer à partir des années 1970.Ces actes qui pourraient paraître bénins, des actes de potaches ont été lourdement punis par des peines de prison et des amendes assez lourdes. L'Etat n'avait aucun droit exclusif sur les eaux internationales. L'opposition à deux prérogatives de la souveraineté étatique: 1-le monopole de l'information à partir d'un service public sur l'étendu de tout le territoire allait entamer des changements très importants dans la politique et l'économie des pays occidentaux. Personne n'avait le droit de s'adresser au peuple sauf l'Etat. Et le plus bizarre est que la radio et la télévision sont créées par les deniers des peuples pour permettre à des dirigeants de les utiliser à leur faveur.
Le choix des programmes, des musiques, des films, des informations ou de toute idée dépendait du bon vouloir d'une administration publique qui était censée être au service de tous. Il y avait même des ministères pour cela: le ministère de la communication, de la culture et de l'information selon les pays. Les gouvernements légitimaient cette situation par le fait d'être élus démocratiquement par le peuple. 2- La tendance du capitalisme sauvage depuis l'accès au pouvoir de Margaret Thatcher et Ronald Reagan dés le début des années 80 est de passer d'une approche politique à une approche technocrate pour régler les problèmes de l'Etat fort et puissant de ses prérogatives non plus démocratiques mais régaliennes. Entre le politique et le technocrate, il y a la fiction. Là où le premier brode autour de tous les aspects humains d'un problème, le second conceptualise et calcule les pertes et les gains aussi bien que les intérêts bruts du projet.
C'était la fin du welfare state ou de l'Etat providence comme si cet Etat donnait quelque chose de ses propres deniers et non des richesses du pays et du travail du peuple qu'il est appelé à gérer. Entre un monde d'échanges humains par la parole et le débat pour atteindre un consensus pour sauvegarder la cohésion sociale- raison pour et par laquelle une société existe-; les technocrates, quant à eux, élimine d'abord tous les risques d'erreurs humaines, calcule les dégâts collatéraux et tente de maximaliser les paramètres de succès sans tenir compte des risques encourus par les gens ni les conséquences du projet sur la nature. Les technocrates visent la rentabilité immédiate et le renouvellement des richesses par un calcule précis des dosages et de résistance des marchandises à l'usage pour atteindre une date de péremption qui sans elle la production cessera. Tout est appelé à s'user et à se renouveler sans tenir compte de la surproduction des déchets ni de la pollution ni de la surconsommation et la surexploitation des richesses de la terre.
Aujourd'hui, les GAFA (Google, Apple, Face book, Amazone) généralisent cette politique en s'attaquant à la monnaie et au territoire, deux autres piliers de la souveraineté classique de l'Etat bourgeois. Les entreprises, en passant par les stades nationales à multinationales, soumises aux lois des pays de résidence, avec les nouveaux moyens informatiques, elles n'ont plus rien de territorial. Elles n'ont même pas une existence matérielle puisqu'elles sont devenues des entités virtuelles. Le passage historique de la monnaie sonnante et trébuchante en or ou en argent à la monnaie purement scripturale n'est plus qu'un souvenir.
La création d'une monnaie virtuelle comme le Bitcoin et un travail virtuel qui n'est régi par aucune loi nationale puisqu'il est confiné dans un ordinateur et non dans une usine ou un bureau aux adresses connues dans des pays connus, tout cela a entamé sérieusement la souveraineté classique des Etats bourgeois. Ces derniers luttent pour s'adapter aux nouvelles idées et au nouvel ordre économico-politique qui s'impose de plus en plus. L'Etat se libère enfin de son obsession de la centralisation des pouvoirs, des équilibres politiques, de la régulation des aides et des services sociaux. Après avoir abrogé les lois contre la banqueroute, favorisé les aides aux établissements bancaires et aux usines en faillite réelle ou stratégique, renfloué les aides aux établissements pour qu'ils recrutent, autorisé les licenciements à volonté, réduits les budgets des écoles et des hôpitaux, privatisés tous les services qui relevaient auparavant de sa souveraineté comme les aéroports ou les usines et les laboratoires des armements ou de la recherche scientifiques et renforcé le pouvoir des actionnaires dans les décisions les plus délicates de l'économie du pays; le chemin est devenu libre pour l'Etat de devenir une entreprise et d'être géré comme une entreprise.
Rabat, avril 2020


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