Des eaux qui redeviennent claires à Venise, soulagées du trafic fluvial des embarcations touristiques. Des dauphins qui s'enhardissent jusqu'au port de Cagliari en Sardaigne, tirant profit de l'absence des ferrys. Ou encore, le chant des oiseaux que l'on redécouvre dans les milieux les plus fréquentés de nos villes, désertées par les voitures… En parallèle de la crise sanitaire provoquée par la propagation du coronavirus dans le monde, le confinement offre à l'environnement un petit moment de trêve, et la nature reprend, par endroits, ses droits. C'est l'effet étonnant de cette crise sanitaire mondiale. En Chine, et à présent en Italie, on constate une forte baisse de la pollution de l'air, selon une étude diffusée par le site Carbon Brief. Les mesures drastiques visant à contenir la propagation de l'épidémie de Covid-19 en Chine « ont fait chuter les émissions de dioxyde de carbone (CO2) du géant asiatique d'au moins 25% », relève cette même étude réalisée par l'organisme Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA) basé en Finlande. « Si le virus continue de se propager sans limite, l'économie de chaque nation en serait affectée et éventuellement une baisse de la pollution due à la réduction de la combustion des énergies fossiles », indique à la MAP Leo Hickman, rédacteur en chef et directeur de Carbon Brief. Cependant, quand l'épidémie aura reflué, de nombreux pays voudront stimuler leur économie et, comme le montrent plusieurs exemples de l'histoire, la pollution va à nouveau repartir à la hausse, explique t-il, notant que « le grand défi actuel est de connaître si les économies peuvent être relancées sans utiliser le même degré de dépendance aux combustibles fossiles ». Par ailleurs, dans certaines villes d'ordinaire assombris dans la pollution, les habitants peuvent discerner le ciel bleu. Le Covid-19 a déjà entraîné un bref répit précieux pour la planète. « Une amélioration de la qualité de l'air de 20 à 50% a été ressentie dans les grandes villes, telles que Paris, New York, Milan, Madrid ou Wuhan en Chine, selon les organismes mondiaux de mesure de la qualité de l'air « , affirme Mohamed El Mehdi Saidi, professeur de climatologie à l'Université Cadi Ayyad de Marrakech. Selon cet expert marocain, le confinement observé depuis le 20 mars « changerait évidemment les choses, comme partout dans le monde (…) mais en l'absence de données chiffrées de la qualité actuelle de l'air dans les villes marocaines, on ne peut qu'estimer l'amélioration cette qualité à partir du vécu actuel et du nouveau quotidien ». « On ressent en effet un air pur et plus agréable, on redécouvre les étoiles dans le ciel et la pollution sonore a diminué laissant place aux gazouillis des oiseaux », dit-il dans un entretien accordé à la MAP. Evidemment en ces périodes de confinement dues au Covid-19, la fréquentation quasi nulle des lieux publics, des voies de circulation, des usines, etc…fait baisser fortement la production de bruits ambiants extérieurs dans chaque ville, chaque campagne, chaque pays atteint. « Cette impression de calme participe à l'amélioration de notre bien-être: détente, plaisir, meilleure concentration… alors que le bruit impacte négativement la santé des individus, notamment l'usure ou la lésion du système auditif, l'augmentation du rythme cardio-vasculaire ou le stress », explique dans une déclaration similaire, Sébastien Lazzarotto, orthophoniste et docteur en santé publique en France. Cependant, cela ne résout absolument pas les comportements individuels à l'intérieur de chaque foyer confiné, à savoir le temps d'écoute de produits numériques (radio, TV, playlists, jeux vidéo, réseaux sociaux), alerte ce spécialiste des troubles auditifs à Marseille. Pendant cette période de confinement, ce docteur précise que les individus vont se rabattre sur une surconsommation de sons via leur smartphone ou tablette pour faire passer le temps, avec des écouteurs, pour ne pas gêner les autres membres de la famille, s'exposant sans le savoir à des durées et à des niveaux d'intensité non maîtrisés, le jour, la nuit, en dormant… « Nous savons que le couple +intensité et durée d'exposition+ peuvent créer des lésions irréversibles dans l'oreille interne », poursuit-il. Ces « bienfaits » du confinement profitent transitoirement la nature, tandis que des spécialistes mettent en garde contre la reprise acharnée de notre civilisation qui inflige chaque jour à la planète des dommages inestimables, lesquels augmentent d'ailleurs les risques de pandémies. Et si cette crise sanitaire était la secousse psychologique tant attendue pour que l'être humain prenne au sérieux son empreinte sur l'environnement?