Sous la pression de la rue, le 11 Avril dernier, le président soudanais Omar El Béchir avait été renversé par son armée après trente années à la tête du pays. Refusant, toutefois, que le pouvoir ne reste détenu par le Conseil Militaire de Transition qui a perpétré le coup d'Etat, les soudanais ont réclamé que cette instance se dessaisisse du pouvoir au profit d'une entité civile qui sera chargée de diriger le pays jusqu'à l'élection d'un nouveau président dans un délai maximum de trois ans. Mais, faute d'entente sur la composition de cette institution de transition, les pourparlers entre les deux parties ont été suspendus le 20 Mai dernier et, pour marquer leur désapprobation, les soudanais ont décidé d'organiser un sit-in devant le Quartier Général de l'armée. Cette décision n'ayant point été du goût du Conseil Militaire de Transition, des soldats sont intervenus le 3 juin pour disperser les campeurs. Or, cette intervention ne s'est pas faite sans heurts puisque, d'après un comité de médecins proche de la contestation, en l'espace d'une semaine, à Khartoum, ce sont 118 personnes qui seraient tombées sous les balles des forces de sécurité et plus de 500 autres qui auraient été blessées. Aussi, pour faire face à cette sanglante répression et maintenir la pression sur les généraux au pouvoir, une campagne de désobéissance civile a été lancée à partir de dimanche par l'Alliance pour la Liberté et le Changement (ALC), fer de lance de la contestation ; ce qui a quasiment paralysé la capitale durant trois journées si bien que, mardi soir, Mahmoud Drir, le représentant la médiation éthiopienne menée par le premier ministre Abiy Ahmed a annoncé que les deux parties avaient accepté de revenir à la table des négociations à l'effet de trouver une issue à la crise. L'ALC a aussitôt appelé les soudanais à «reprendre le travail mercredi» et, «dans un geste de bonne volonté», le Conseil militaire de transition, au pouvoir depuis la destitution du président Omar El-Béchir «a accepté de libérer tous les détenus politiques». Condamnant fermement la violence qui sévit au Soudan depuis l'éviction de l'ancien président, le Conseil de Sécurité des Nations Unies, soulignant l'importance du respect des droits humains, a exigé, dans un communiqué, la fin immédiate des violences contre les civils et appelé les deux parties à «œuvrer pour trouver une issue à la crise». Aussi, ce mercredi, à Khartoum la vie a commencé à reprendre, peu à peu, son cours normal malgré une très forte présence des forces de l'ordre. Et même si plusieurs habitants préfèrent encore rester chez eux du moment qu'Internet n'a pas encore été complètement rétabli – ce qui complique le travail de bureau – et que certaines entreprises ont préféré prolonger, jusqu'à la fin de la semaine, les congés de l'Aid El Fitr qui marque la fin du ramadan, plusieurs magasins ont levé leurs rideaux et les bus ont commencé à sillonner la ville pour emmener leurs passagers vaquer à leurs occupations. Ce dégel, bien qu'étant encore précaire au vu de la forte présence militaire dans les rues de la ville, marquerait-il, enfin, la fin du bras-de-fer entre le Conseil Militaire de Transition et la population civile soudanaise ? Espérons-le et attendons pour voir…