A deux semaines du Sommet mondial de Marrakech, qui verra l'adoption du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, la liste des pays réfractaires à ce texte, censé favoriser une gestion coordonnée et harmonieuse de la migration à l'échelle internationale, s'allonge. Près de 10 pays pour l'instant, américains et européens, concernés principalement par la question migratoire, ont décidé de ne pas se présenter à Marrakech, du 10 au 11 décembre prochains, pour signer ce texte qui a été finalisé en juillet dernier. En plus des USA qui se sont retirés de ce Pacte en fin 2017, bien avant même les rounds de négociations qui ont débuté en février 2018, d'autres pays ont rejoint la liste des grands absents de Marrakech. Il s'agit de la Hongrie, l'Autriche, l'Australie, la Pologne, Israël, la Tchéquie, la Bulgarie, l'Estonie…. Certains pays censés approuver sans difficultés ce texte, comme la Suisse, qui a pris part à sa rédaction, ont reporté sine die leur décision de signer le pacte, étant donné l'opposition de certaines commissions parlementaires. Il faut dire que le revirement de plusieurs Etats sur le Pacte alerte sur la controverse autour dudit texte, malgré qu'il ait été finalisé en juillet dernier. Face à ce rejet massif du Pacte par plusieurs pays européens, le directeur général de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), Antonio Vitorino, a déclaré le week-end dernier qu'«il est de l'intérêt des pays européens de soutenir les Nations Unies pour l'adoption du pacte mondial sur la migration en décembre prochain à Marrakech». «Les Européens doivent aplanir leurs différends et dépasser leurs divergences pour parler d'une seule voix», a-t-il souhaité. Si les raisons varient d'un pays à l'autre, les différents pays, qui ne se présenteront pas à Marrakech, avancent que le Pacte encourage les flux migratoires et ne permet pas aux Etats d'exercer leur souveraineté. Ainsi, l'Australie, qui s'est retiré du Pacte le 20 novembre, redoute que le Pacte « puisse encourager les entrées illégales et remette en cause les succès durement acquis par l'Australie dans son combat contre le trafic des passeurs». Dans un communiqué, le gouvernement a âprement critiqué le texte, déclarant qu'il «ne fait pas de distinction entre les gens qui entrent en Australie illégalement et ceux qui viennent de la bonne manière, en particulier en ce qui concerne la fourniture des prestations sociales et autres aides». Israël, a jugé, pour sa part que «cet accord contient des éléments incompatibles avec les intérêts du pays. Par exemple, la réunification familiale pour les migrants». «Nous sommes un petit pays avec une situation géographique compliquée. Nous ne sommes pas comme l'Allemagne, qui peut absorber des millions de gens», a déclaré une source diplomatique du pays. En plus du rejet par certains Etats, plusieurs pétitions ont été lancées en ligne par des individus ou des associations pour contrer la signature par leur pays de ce Pacte. A titre d'exemple : «Non au pacte de l'ONU pour les migrants» initiée par L'Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN). Même dans l'Hexagone où le Pacte est soutenu, notamment par le président Emmanuel Macron, une pétition a été lancée par l'association «Renaissance Française». En effet, le Pacte mondial de la migration va du principe que la migration est un facteur de «prospérité, d'innovation et de développement durable», d'où l'importance de mieux la gérer. Même si le texte n'est pas contraignant pour les Etats, il promeut, notamment l'encouragement de la migration et non son contrôle. Il vise également à faire évoluer les perceptions sur la migration. Seuls quelques pays européens comme la France, l'Allemagne… défendent becs et ongles le Pacte. La crainte serait de s'acheminer vers une signature du Pacte essentiellement par les Etats africains, tout comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles de 1990, qui n'a été ratifié à ce jour par aucun pays européen. Ce qui ne permettrait pas d'avancer sur la résolution du sujet au niveau international.