Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a appelé, dans son rapport annuel 2017, à un changement de la culture du dialogue social pour permettre de l'inscrire dans une approche visant à encourager la formation de consensus entre les partenaires et d'élargir son champ au-delà de la négociation des revendications des parties prenantes pour se concerter sur les sujets nécessitant une mobilisation collective. Le dialogue social, traditionnellement conçu comme cadre de négociation entre employeurs et employés sur la base d'un cahier revendicatif, ne peut négliger les transformations nouvelles que connait le monde du travail, et la complexité des nouvelles problématiques liées au marché de l'emploi, relève le rapport rendu public samedi, estimant que le dialogue social devrait élargir son périmètre à la concertation et à l'échange d'informations et de consultation entre les partenaires du monde du travail. L'amélioration des conditions de travail étant l'objectif ultime du dialogue social, une évolution de forme s'impose, note le rapport, précisant qu'une rencontre biannuelle entre les partenaires sociaux ne pourra être à même de répondre à toutes les problématiques en suspens et se résumera de ce fait à une négociation sur les revendications phares des syndicats, de surcroit sans obligation de sortir avec un accord. « Ainsi l'institutionnalisation de ce processus semble indubitablement le moyen d'assurer la tenue du dialogue social de manière ponctuelle, abstraction faite de l'agenda politique qui peut y interférer », ajoute la même source, appelant à réfléchir à une nouvelle gestion du dialogue social adaptée au contexte marocain et élargie aux mutations socio-économiques accélérées et aux nouvelles formes d'emploi qui restent non couvertes par la législation actuelle du travail, outre la mise en place d' outils de suivi de l'application des décisions et recommandations du dialogue social afin d'en assurer la viabilité et l'efficacité. « La territorialisation du dialogue social est également une voie pour permettre aux partenaires sociaux de s'approprier davantage ce processus en le transférant à l'échelle locale », relève le rapport, expliquant que la mise en place d'instances de dialogue social à l'échelle régionale est une réponse aux besoins socioéconomiques à l'échelle locale et un levier d'envergure pour une concertation plus adaptée aux spécificités de chaque bassin d'emploi. Par ailleurs, le CESE fait savoir que le non-respect du code de travail par les employeurs est la cause principale des grèves, relevant que 27,4% des grèves sont dues au non-paiement ou retard de paiement des salaires, 12,5% à la privation des avantages sociaux et 10,6% aux licenciements, ces chiffres n'incluant pas la fonction publique et la cessation collective du travail n'étant cependant pas le seul moyen d'expression de différends entre salariés et direction au sein de l'entreprise. Selon le rapport, les employeurs devraient envisager le dialogue et la culture du consensus au sein de l'entreprise en tant que moyen efficace pour assurer un climat de travail sain alors que les pouvoirs publics devraient renforcer les outils d'intervention pour veiller au respect des droits fondamentaux des salariés, à travers le relèvement des capacités des organes d'inspection et de contrôle pour la résolution des conflits au travail, ainsi que l'encouragement de la mise en place des conventions collectives, dont sept ont été signées en 2017. S'agissant de l'opérationnalisation de la Constitution, le rapport relève le retard accumulé dans la mise en place des textes de lois relatifs à la démocratie participative et à leur faiblesse par rapport aux exigences de la société civile et de l'esprit de la Constitution, mettant l'accent sur l'urgence de mener les réformes économiques et sociales à même de garantir une vie décente pour tous, et sur l'importance de la société civile, des corps intermédiaires et des institutions élues à l'échelle locale pour dialoguer avec la population, apporter des réponses aux besoins et aux attentes économiques et sociales légitimes, et éviter par ce biais que les revendications ne se transforment en sentiments d'injustice sociale, de marginalisation et d'exclusion. Ainsi, le CESE exhorte les pouvoirs publics à travailler de concert avec la société civile à l'échelle locale et la doter des moyens nécessaires pour qu'elle puisse jouer pleinement le rôle qui lui incombe, à savoir accompagner, encadrer, dialoguer et faire adhérer les citoyens à la gestion des affaires locales.