Le «localier» est le profil et la compétence de base du journalisme dans toutes les expériences de ce métier à travers le monde et à travers ses âges et ses divers contextes d'évolution, depuis «La Gazette» de Théophraste Renaudot au début du 17ème siècle (1631). C'est par cette affirmation ou rappel que M. Jamal Eddine Naji introduisit sa conférence dans le cadre du Forum organisé, tout récemment, par l'Association Zagora pour le journalisme et les médias sous le thème : «les médias de proximité et les défis de développement», en partenariat avec le Conseil régional de la ville, et ce en collaboration avec la Faculté des Lettre et des Sciences Humaines (FLSH) de l'Université Ibn Zohr d'Agadir/Master «Rédaction journalistique et diversité médiatique». Lors de son exposé, le directeur général de la HACA n'a pas manqué de souligner que le rôle des médias consiste à éduquer, divertir et informer les publics, en leur transmettant les valeurs, les connaissances et les codes de conduite qui faciliteront leur intégration/inclusion sociale. C'est dans ce sens qu'il a précisé que le professionnel des médias doit puiser dans le local et dans le réel vécu par la population dans la proximité de son quotidien pour s'enquérir de nouvelles depuis et à travers le citoyen, source première de l'information, après tout pour le journalisme en démocratie où le citoyen est l'artisan premier et le bénéficiaire final de la vie démocratique, de la démocratisation de la gouvernance, locale en l'occurrence, comme de la société, par voie de conséquence. «C'est dans le local que se passe la transmission des valeurs et la négociation des pouvoirs qu'on retrouve à l'échelle nationale», poursuit M. Naji. En tant que chercheur/messager privilégié de la vérité,le journaliste accède plus aisément aux espaces interdits au public, il est donc tenu de fournir, avec exactitude, exhaustivité et honnêteté, une information plurielle et diversifiée et de contribuer ainsi à l'édifice du patrimoine informationnel et à la promotion de la culture locale, ajouta-t-il. Par ailleurs, le directeur général de la HACA a expliqué que le journalisme de proximité est souvent sujet au dévoiement, captif des sirènes de voix trompeuses et, de nos jours, du règne du buzz, sous la pression de la réduction des audiences des médias et la course au «spectaculaire», voire au falsifié et au mensonge potentiellement attractifs, hélas, au plan de l'audience et par conséquent, paradoxalement, générateurs de revenus...publicitaires, par insertions classiques ou au vu des clics et «like»... Ainsi, il est primordial pour le faiseur de l'information, ce journaliste, peu ou prou orienteur/faiseur de l'opinion publique,de respecter les principes de la déontologie professionnelle, en se limitant au rôle et à la mission du journaliste, simple médiateur, mais en toute transparence, avec intégrité et honnêteté,affirma encore M. Naji. Il a également indiqué que l'invasion planétaire des réseaux sociaux, ajoutée à la connectivité qui s'offre de plus en plus aux pays du sud dits «info pauvres», constituent un terrain fertile au pullulement d'informations internationales, aux algorithmes des «GAFA» et des «fake news» planétaires, au détriment des informations locales qui conditionnent la réalité quotidienne des citoyens. Le journalisme d'investigation doit donc poser les médias de proximité au cœur de ses priorités, en offrant au public un produit utile dans la vie réelle de tous les jours et de qualité, en vue de faire face à la mondialisation malsaine d'une information quasi- systématiquement manipulée, y compris entre Etats (dixit la guerre cybernétique avec la Russie qui fait la « une » en ce moment, a-t-il conclu. Il convient de noter que ce Forum s'est décliné en sessions plénières axées sur quatre thèmes principaux: «Les médias et les politiques publiques», «Les médias entre aspects juridiques et dimensions déontologiques», «Les médias et la théorie de proximité» et enfin une table ronde sur «Les expériences médiatiques sous les feux des projecteurs». Rappelons également que les travaux se sont clôturés par la publication de la Déclaration de Zagora*. Dans cette Déclaration, les participants ont mis l'accent sur les rôles des partis politiques, des syndicats, de la société civile et des centres d'études, ainsi que des activités culturelles, dans la garantie du principe de la diversité sociale, politique et idéologique, et la promotion du développement des compétences locales, par le biais de la formation, en leur permettant d'accéder à l'information et d'être en phase avec les affaires publiques. Ils ont aussi encouragé toutes les parties concernées à prendre les médias de proximité comme modèle performant, en vue de concrétiser le principe de la participation des citoyens, et afin de suivre de près leurs affaires et d'ériger une opinion publique avertie et consciente de la réalité sociale. Enfin, signalons qu'ont pris part à cette rencontre les responsables ou représentants du Syndicat National de la Presse Marocaine (SNPM), du CNDH, de l'Association Adala, du CMF-Mena ainsi que des représentants de l'Unesco, des médias et élus de la région, en particulier de Zagora, et des universitaires de la FLSH de l'Université Ibn Zohr.