La prestance aventureuse du Nasser Zefzafi dans le «Hirak» d'Al Hoceima interpelle aujourd'hui aussi bien l'appareil pluriel de l'Etat que la classe politique du pays. Quel enseignement peut-on tirer de cette déchéance dont les dérives s'avèrent incontrôlées et cruellement préjudiciables? En effet, durant plus de sept mois, au lendemain du décès tragique de Mohcine Fikri, broyé par les lames de la benne des ordures, les populations rifaines, abattues par l'horreur et l'indécence, étaient littéralement livrées à elles-mêmes. Les diverses institutions élues dont une prédominance partisane privilégiée s'était larguée de mettre un terme aux calvaires de la région, s'étaient soustraites des épreuves de décrispation des tensions, comme si cette mission ne les concernait pas. Les départements administratifs de l'Etat non plus ne pipaient mot devant cette avalanche émeutière qui grossissait, au fil du temps. Les plupart des partis politiques étaient constamment convertis au néant depuis qu'on s'attelait résolument à la «dépolitisation» de cette zone sensible et marginalisée, au profit des bonnets du trafic de la came… L'acte irréfléchi et aventurier de l'Etat ne pouvait alors aboutir qu'à l'émergence fatale des «justiciers» à la Don Quichotte, exerçant un tel magnétisme sur les grandes foules que, à la longue, nul ne peut maîtriser. Le traitement démocratique qui devait régner, au préalable, dans ces lieux enclavés, à travers toutes les institutions en place, est actuellement remplacé par La manière forte, dans la panique et La précipitation. «La nature a horreur du vide !», disait la maxime, dans de telles circonstances. Ce qui devait donc arriver, arriva ! On tente alors de colmater les brèches en dépêchant, à la hâte, un cortège ministériel, au risque de provoquer des « envieux » dans d'autres régions du royaume aussi miséreuses que vulnérables, dans l'espoir de combler des doléances cumulées pendant des années et auxquelles on aurait dû se pencher sans être soumis à la pression dégénérée. Il est alors bien clair que l'Etat assume de lourdes responsabilités dans ce qui se passe, en particulier au Rif, à l'heure actuelle. L'approche excursionniste et sécuritaire qu'Il avait prôné, des décennies durant, dans ces recoins historiquement laissés pour compte, a occasionné, d'une manière inévitable, la plantation des bombes à retardement, détenues par des rebelles, d'ailleurs souvent «manipulées», à des fins de déstabilisation interne. L'Etat joue avec du feu ! Dorénavant, il n'a plus d'autre issue que de revoir pour de bon, son déficit déplorable, en s'activant à valoriser et démocratiser le champ politique et institutionnel, à travers des échéances électorales saines et transparentes, à subvenir aux attentes et aux besoins des citoyens et des citoyennes et à déclencher un climat de confiance et de sérénité dans les milieux populaires. Car seules des institutions fortes, responsables et autonomes peuvent enrayer les dérapages nocifs qui se créent dans le vide ambiant!