Le Premier ministre a eu raison de rappeler un fait colonial dont la gestion entre le Maroc et l'Espagne est sujette à des quiproquos qui n'en finissent pas. Il n'a pas eu tort de faire ressortir le caractère anachronique de l'occupation de Sebta, Mellilia et des îles qui s'y rattachent. Comme il a eu la présence d'esprit en rappelant à nos amis espagnols qu'il est temps de «mettre sur la table» des discussions un contentieux vieux de plusieurs siècles en vue de le régler à l'amiable. Faisant en cela ressortir une constance qui a marqué la démarche diplomatique marocaine dans l'approche de ce dossier qui cristallise des passions nationalistes des deux côtés du Détroit de Gibraltar. Nul besoin de rappeler, à ce sujet, que le bon voisinage exige d'engager, dans la sérénité, un dialogue dépassionné autour des présides marocains. Car l'Histoire, tout comme la géographie, donnent raison au Maroc. L'affaire n'est pas dénuée d'intérêt à l'heure où le Royaume tente de clore définitivement le conflit factice qui entoure le dossier saharien. En proposant ce qui s'est révélée comme la meilleure alternative crédible et réaliste, à savoir une large autonomie aux Provinces méridionales. Car il serait temps de «clore» définitivement un dossier qui s'apparente à un souffre-douleur pour les deux parties. En imaginant, peut-être, un statut intérimaire favorisant la récupération par le Maroc de ses villes tout en préservant les intérêts espagnols. Ceux-là qui, valeur aujourd'hui, en s'accommodent plus du diktat du pavillon pour aller s'installer là où il fait bon pour prospérer. D'ailleurs, nul besoin de rappeler que les deux pays sont condamnés à s'entendre pour que les liens qui les unissent puissent s'exprimer au mieux des potentialités offertes pour un commerce équitable et donc éminemment avantageux pour les deux parties. Le Maroc devant servir de prolongement naturel à l'essor d'une Espagne qui tente, vaille que vaille, à sortir de la crise dans laquelle elle semble installée. On n'oublie pas que l'Espagne est le deuxième investisseur dans le Royaume. Que des groupes espagnols s'investissent dans le développement des courants d'affaires entre les deux pays. Et que le développement de plusieurs activités en Espagne contribue à canaliser un flux migratoire appelé à se consolider au-delà des conditions inhumaines que génère le commerce des humains des deux côtés de la rive de la Méditerranée. La pérennité de tout cela est certainement tributaire d'une entente des plus cordiales entre Rabat et Madrid. Une entente qui ne saurait être que renforcée davantage par le retour des villes occupées dans le giron national qui est le leur. Loin de toute tergiversation et de tout autre manœuvre dilatoire. Car différer une telle progression, la seule stratégiquement porteuse pour les deux pays, c'est alimenter les frustrations qui s'expriment avec une violence inouïe dont la région peut faire l'économie. N'oublions pas que bien des groupuscules obscurantistes qui sévissent tant au Maroc qu'en Espagne, nourrissent leur littérature à grand renfort de repères historiques qui renvoient, tous, à Al-Andalous. Dès lors, fermer les yeux face aux multiples signes émis par le Royaume et se boucher les oreilles dès lors que Rabat parle des Présides ne représentent aucunement la solution appropriée à un bon commerce que le Maroc se fait fort de revendiquer l'effectivité. Les Marocains, dans leur ensemble, savent qu'ils ont l'Histoire pour eux. Mais rien n'empêche Madrid de brusquer les événements en prenant en charge le dossier des Présides qui empoisonne épisodiquement le climat entre les deux pays. La voix de la raison l'exige. Elle vient de tonner au niveau des deux chambres. Et la réaction du chef de la diplomatie espagnole qui s'inscrit contre la marche de l'Histoire ne saurait en rien atténuer le degré d'attachement du Maroc à ses territoires. Sur cette affaire, «el pueblo unido, jamas sera vencido» sonne vrai… A nos amis espagnols d'en tirer les conclusions qui s'imposent.