Comme suite à la réaction déterminée du Maroc à la décision négative de la Cour de justice européenne au sujet de l'accord agricole euro-marocain, des analystes anti-marocains sont vite allés en besogne en imaginant des scénarii extrêmes, du genre : «le Maroc va laisser carrément tomber l'accord» ou encore «le Maroc va renégocier un autre accord sans ses provinces du sud». Ni l'un ni l'autre des scénarii n'ont résisté plus d'une semaine. L'Union Européenne (UE) a vite réagi, démontrant avoir reçu le message marocain, en dépêchant rapidement à Rabat sa responsable européenne des affaires étrangères; de même que le Conseil de l'Union Européenne afait appelde la décision de la Cour. Aussi, certains journalistes se sont-ils mis, aussitôt, à raisonneren termes de perdant et de gagnant et en langage de pressions réciproques, confondantle court et le moyen et long termes (MLT), et oubliant qu'il n'est pas sûr que la partie gagnante à court terme, le soit forcément à MLT.Et que la métaphore du «pot de fer contre le pot de terre» n'est pas toujours opérante. Et puis en diplomatie comme en communication en général, il y a la tactique et la stratégie.Stratégiquement, entre le Maroc et l'UE, le partenariat est solideet ne peut être remis en causesur un coup de tête. Même si, bien entendu, rien n'est jamais acquis pour toujours.Tactiquement, il y a eu des signaux envoyés de part et d'autre.L'UE a mis fermement en exergue la séparation entre son Exécutif et son Judiciaire. Quant au Maroc, il a mis en « contre ‘exergue », non moins fermement, l'erreur d'appréciation manifeste commise par ses juges aux plans juridique, économique et politique. C'est vrai, la conjoncture actuelle et les divers défis que confronte l'Europe pourraient faire penser à une pression européenne pour influencer les positions du Maroc sur certains dossiers, notamment des migrants clandestins et de la sécurité. Mais, en général, les diplomates se gardent de ne pas mélanger les dossiers. En tout cas ils devraient. Surtout sachant que le comportement franc et loyal du Marocà l'égard de son allié européen ne date pas d'aujourd'hui. C'est pourquoi, et en clôture rapide de cette passe de conjoncture, l'UE et le Maroc travailleront, certainement, ensemble, pour faire accepter l'accord dans sa forme actuelle, signé qui plus est, de longue date. La balance des intérêts réciproques est chargée de part et d'autre etles exportations marocaines agricoles à partir des provinces du sud ne sont pas dominantes dans le volume d'affaires concerné ; loin de là. Et puis, il n'y a qu'à voir le montant des dépenses marocaines dans ses provinces du Sud, comparé à celui des ressources réduites que dégagent cette zone pour s'assurer, si besoin est, de la grande sensibilité de la question de l'intégrité territoriale pour tout le Pays, et de son fort engagement pour équiper les régions retardataireset dynamiser leur économie, en faisant même du sud un modèle de développement pour les autres régions. En tout cas, les marocains originaires de l'une des zones que le Protectorat considérait comme« Maroc inutile »,ne peuvent que se réjouir des bouchées doubles que le Maroc fait actuellement pour rattraper les retards socio-économiques accumulés dans ces territoires. Ceci étant, côté européen, les diplomates devraient apprécier à leur valeur nos contraintes, et se rappeler que cet accord agricole, dans sa globalité, est loin d'être équitable pour nous. Et côté marocain, nos diplomates gagneraient davantage à être plus vigilants, proactifs et attentifs aux fines mutations que le monde, y compris l'Europe d'après 2008, connait inexorablement. Aussi, notre «système» d'intelligence a, dans ce cas d'espèce, un sujet de réflexion?