A peine a-t-elle clos ses 70 ans, Feue Zoulikha Nasri a tiré sa révérence, laissant dans toutes les mémoires et sur toutes les lèvres le souvenir d'une femme patriotique, militante dans l'âme qui, par ses qualités humaines et intellectuelles et son parcours aussi riche qu'atypique, fait honneur à la Femme marocaine. Lauréate de la prestigieuse Ecole nationale d'administration (ENA) ce qui relevait de l'exploit pour une femme à l'époque -, la défunte se verra confier plusieurs postes de haute importance dont certains ont été jusque-là l'apanage des hommes. Directrice des assurances au ministère des finances à partir de 1994 puis secrétaire d'Etat à l'Entraide nationale dans le gouvernement d'Abdellatif Filali faisant partie des quatre premières femmes entrées dans l'Exécutif à l'initiative de Feu SM Hassan II, feue Zoulikha Nasri a inscrit son nom en lettres d'or dans les annales de l'histoire marocaine après avoir été nommée conseillère royale par le regretté Souverain - une première pour une femme-, poste qu'elle gardera jusqu'à son décès. A la faveur de l'abnégation, de l'efficacité et surtout de l'humanisme avec lesquels elle a accompli les différentes missions qui lui ont été confiées, Mme Nasri a été nommée à la tête de hautes institutions à forte vocation sociale, en l'occurrence la Fondation Mohammed V pour la Solidarité (1999) et la Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus (2002). Sous sa direction, les deux Fondations sont devenues des acteurs de premier plan dans le secteur social grâce à une batterie de projets et de programmes ciblés et généreusement financés qui ont sauvé des centaines voire des milliers de Marocains de différentes régions du Royaume des affres de la pauvreté, de la criminalité et de l'exclusion. Pour Feue Zoulikha Nasri, tout projet social, abstraction faite de sa taille, a de l'intérêt pourvu qu'il soit efficace, viable et adapté aux besoins. «Les projets s'apprécient à leur efficacité, à leur durabilité et à la qualité de la réponse aux besoins exprimés. Tous les projets petits ou grands, ont leur intérêt. Toujours est-il qu'on constate avec bonheur que la typologie de plusieurs projets et les concepts développés par la Fondation sont dupliqués par différents acteurs et qu'à ce titre, on peut affirmer que, dans plusieurs domaines, elle constitue une référence», souligne-t-elle dans une interview à la MAP en août 2012 à l'occasion de la fête de la Jeunesse. Tout le monde se souvient encore de l'abnégation, du courage et du volontarisme dont elle a fait preuve suite au tremblement de terre qui a frappé Al Hoceima en 2004. A peine quelques heures après le drame, la regrettée a accouru sur les lieux et a été aux premières loges pour prêter, avec dévouement, bravoure et énergie, une main-forte et une oreille attentive aux sinistrés et leur distribuer vivres, denrées et tentes. Cet engagement envers les personnes en situation de précarité n'avait d'égal que son implication dans la promotion des droits des femmes, une cause qui lui tenait à coeur et qu'elle a toujours défendue avec verve tout en faisant preuve de réalisme, de sagesse et d'esprit méthodique. Femme d'esprit et de terrain, la défunte a joué un rôle déterminant dans la réforme du Code de la famille qui a abouti à l'adoption de la Moudawana, un texte progressiste, novateur et inédit au Maroc et dans le monde arabo-islamique qui a fait du Royaume une référence et un exemple fréquemment cité en la matière. En fine connaisseuse de la société civile et à la faveur de sa capacité d'écoute et de son esprit de synthèse, Mme Nasri a chapeauté les concertations avec les ONG ainsi qu'avec les juristes et les représentants des médias et autres, afin de recueillir leurs avis, observations et propositions concernant le projet de la Moudawana qu'elle a qualifiée, lors d'une de ces rencontres, d'«événement distingué qui reflète l'émergence d'un projet moderniste basé sur l'attachement au référentiel islamique et à la démocratie». Du social au politique, des rouages de l'administration et du pouvoir au travail de terrain, au Maroc et à l'étranger Feue Zoulikha Nasri a été de tous les combats et son empreinte a été visible et grandement appréciée dans tous les chantiers où elle s'est investie. Peu de femmes ont été aussi plébiscitées aux hautes sphères de décision. Durant son long parcours auréolé de succès, Feue Zoulikha Nasri a toujours travaillé avec la rigueur, la discrétion et l'abnégation d'un soldat, l'engagement et la détermination d'une militante, la sensibilité et la méticulosité d'une femme. Une grande femme qui, par son savoir-faire, sa sagesse et son dévouement, a mérité et honoré la confiance placée en elle par SM le Roi Mohammed VI, et avant Lui, par Son auguste père, Feu SM Hassan II.