Le Lymphome est une maladie sournoise. Cette hémopathie maligne, encore méconnue du grand public, frappe chaque année près de 2.000 personnes au Maroc. A la faveur des importants progrès thérapeutiques, ce cancer est souvent guérissable pour peu qu'il soit pris en charge à temps. Fièvre, toux, fatigue, démangeaisons, sueurs nocturnes ou encore gonflement de ganglions sont autant de symptômes du cancer du système lymphatique, le principal élément du système immunitaire de l'organisme. Ces premiers signes risquent de passer inaperçus chez le patient le faisant penser à d'autres pathologies, ce qui est en défaveur d'un dépistage précoce pourtant essentiel pour garantir une prise en charge optimale de la maladie. «Les chances de guérison augmentent lorsque la maladie est prise en charge rapidement et à temps. Autant le malade que le médecin sont concernés par un diagnostic précoce», insiste Abdellah Madani, professeur d'hématologie à la Faculté de médecine de Casablanca et hématologue, oncologue pédiatre au CHU Ibn Rochd à Casablanca, dans un entretien à la MAP. Au Maroc, près de 2.000 nouveaux cas seraient diagnostiqués annuellement souvent à des stades trop avancés, estime Pr Madani, également président de la Société marocaine d'hématologie (SMH). Pour lui, la Journée mondiale du lymphome, célébrée le 15 septembre de chaque année, constitue une occasion pour «sensibiliser les citoyens, les médecins et les responsables sur cette pathologie». La SMH mène plusieurs actions dans ce sens, notamment l'organisation régulière de rencontres et de congrès, ainsi que des déplacements dans plusieurs villes du Royaume en vue d'échanger avec les praticiens locaux sur les différents aspects de la maladie. Le professeur Abdellah Madani explique que le lymphome se caractérise par une multiplication anarchique des lymphocytes (globules blancs) qui s'accumulent et forment des tumeurs dans les ganglions dans 50 pc des cas. Contrairement à d'autres formes de cancers, notamment du sein ou du poumon, «le lymphome peut toucher différents organes comme le cerveau, la peau, le tube digestif ou encore les poumons, ce qui veut dire que tous les médecins, aussi bien des généralistes que des spécialistes d'organes, peuvent être amenés à diagnostiquer cette pathologie», fait-il remarquer. «Les signes cliniques diffèrent en fonction de la localisation du lymphome. Quand il s'agit des ganglions lymphatiques, la maladie se manifeste par des adénopathies (ganglions gonflés) qui peuvent être de volumes variables», poursuit le professeur. C'est un groupe de maladies très hétérogène. «On en distingue actuellement une cinquantaine de types de gravité différente», fait-t-il observer, ajoutant que certains lymphomes peuvent être «très bénins», tandis que d'autres sont «particulièrement agressifs» et requièrent une prise en charge thérapeutique très contraignante. Les lymphomes peuvent toucher toutes les tranches d'âge, avertit Pr Madani, précisant que les sujets âgés sont toutefois les plus exposés à cette maladie. «Les lymphomes de l'adulte sont un groupe très hétérogène avec des traitements et des résultats thérapeutiques variables. En revanche, les lymphomes de l'enfant sont particuliers avec une symptomatologie, des localisations et un traitement spécifiques» et des chances de cure à plus de 70%. S'agissant du traitement des lymphomes, d'importants progrès ont été réalisés depuis le début des années 2000. «En effet, cette maladie a bénéficié de l'introduction dans son arsenal thérapeutique des thérapies ciblées», affirme le président de la SMH. «A côté de la chimiothérapie classique qui reste encore de mise, poursuit-il, de nouvelles molécules ont été développées grâce à une meilleure connaissance des voies moléculaires de développement des cancers». Le traitement des lymphomes a également bénéficié de l'identification de facteurs pronostiques permettant une individualisation et une personnalisation du traitement. Pr Madani insiste sur la nécessité pour les patients porteurs de lymphome d'être pris en charge par des médecins spécialistes, car en cas d'échec ou de rechute, «les chances de guérison deviennent très faibles». Bien que le lymphome soit peu connu au Maroc, son traitement demeure possible si la prise en charge du patient intervient à temps, avec bien entendu un accès aux produits thérapeutiques et aux soins et une sensibilisation qui mobilise à la fois le corps médical, les médias et la société civile.