Tajeddine Husseini, professeur des relations internationales, considère qu'il serait difficile de parler d'une transition démocratique, au cas où Moubarak quitterait le pouvoir. Car la révolution actuelle n'a pas été menée par les partis politiques. En fait, ces derniers ont profité de l'occasion pour surfer sur la vague, précise-t-il. Mais, cela n'empêche, selon Husseini, qu'il est temps que les Etats arabes renforcent les mécanismes de la démocratie, de la transparence et lutter acharnement contre la corruption, procédant d'abord à une répartition juste et équitable des richesses. Comment expliquez-vous cette pression des pays occidentaux, notamment l'union européenne sur le régime égyptien afin qu'il y aurait une transition au sein du pouvoir ? Tajeddine Husseini : la pression ne vient pas seulement de l'Europe, mais aussi des Etats-Unis, à telle enseigne que Barack Obama a prononcé un discours, juste après celui du Hosni Moubarak. Mais, ce qui constitue une première, c'est que le Sénat américain a adopté jeudi soir une résolution pour que le président égyptien forme un gouvernement intérimaire. Bref, cela nous rappelle l'ère du colonialisme, quand les puissants Etats interviennent par la force dans les affaires internes des Etats faibles. Pourquoi alors tout cet intérêt ? La réponse est simple, l'Egypte par sa géographique et la grandeur de sa superficie occupe une position stratégique dans le Proche-Orient. En fait, c'est un pays qui se trouve au centre névralgique du monde arabe. Ce pays a toujours été leader du panarabisme et demeure aussi le berceau de l'islamisme (Les frères musulmans) et, aussi, du mouvement Al-Qaïda ( Ayman al-Zawahiri ) , ce qui provoque la crainte de l'Occident, qui veut maitriser systématiquement le processus de la transition du pouvoir. Le scénario tracé est clair. D'abord Omar Sulaiman qui va diriger la prochaine étape, puis on passe à « l'étape démocratique », selon une vision des Etats occidentaux. Ces Derniers, estiment que si Moubarak reste au pouvoir, les islamistes s'empareront du pouvoir. Pensez-vous, qu'au cas où Moubarak partirait, la tâche sera facile pour une «transition démocratique» ? Difficile de parler d'une transition démocratique, car la révolution n'a pas été menée par les partis politiques. En fait, ces derniers ont saisi l'occasion pour surfer sur la vague, hormis les frères musulmans, qui sont une Jamaâ bien structurée, ayant une influence dans la rue. Grosso modo, les analystes envisagent trois scénarii. Le premier considère que s'il y aurait des élections démocratiques, ce seront certainement les dernières élections dans l'histoire de l'Egypte. Et pour cause, les islamistes vont s'accaparer du pouvoir et instaurer un régime à l'instar des chiites en Iran. Le deuxième scénario, teinté d'un certain optimisme, envisage une démocratie sur mesure, et ce au cas où les partis d'El Wafd, Al Karama, et Al Ghad, plus le mouvement des jeunes s'allieraient pour barrer la route aux islamistes. Et le troisième concerne l'institution militaire au cas où elle monopolise le pouvoir, tout en procédant par des méthodes de bonne gouvernance. Il faut souligner que l'Occident en particulier les Etats-Unis, veut instaurer une démocratie qui répond à leurs attentes. Quel impact sur les pays de la région en cas où Moubarak, à l'instar de Ben Ali, quitterait le pouvoir ? Il n'en demeure pas moins que les événements d'Egypte ont influencé presque tous les Etats musulmans et arabes. Surtout, dans les pays totalitaires, gouvernés par un parti unique, ou les Etats qui sont régis par un pouvoir absolu. Déjà, plusieurs Etats ont commencé à revoir leur politique. En Jordanie, le roi Abdellah a eu l'intelligence de désigner un nouveau gouvernement. En Syrie, le gouvernement a créé un fonds national pour l'aide sociale, quant au président Abdellah Saleh, il a promis de ne pas briguer un nouveau mandat… Soulignons que chaque pays a sa propre histoire, ses propres spécificités culturelles,… donc, il ne faut pas croire qu'il y aurait des protestations comme celles de l'Egypte ou de la Tunisie. Aussi, il est temps que les Etats arabes renforcent les mécanismes de la démocratie, de la transparence, et lutter acharnement contre la corruption, procédant d'abord à une répartition juste et équitable des richesses.