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Régularisation exceptionnelle des étrangers en situation irrégulière au Maroc Amiyeto Marcel, S.G de l'ODT-syndicat des travailleurs immigrés au Maroc
«Cette décision répond à nos revendications, mais...»
La 2e semaine de novembre aura été une semaine des droits de l'Homme pour le Maroc. Le lundi débutait la décision de régularisation des migrants en situation irrégulière du 1er janvier au 31 décembre 2014. Un signe qui augurait l'élection du Maroc à une large majorité au Conseil des droits de l'homme de l'ONU le mardi 12. La campagne de régularisation des migrants irréguliers prévue pour l'année prochaine n'a pas manqué d'être honorée par les acteurs associatifs, mais aussi d'être critiquée pour ses défaillances. Pour Khadija Ainini, vice-présidente de l'AMDH, «cette décision est un pas positif, mais qui demeure insuffisant puisqu'elle contient des critères assez difficiles». Selon la décision ministérielle, il sera procédé à la régularisation de cinq catégories de migrants, notamment les étrangers conjoints de ressortissants marocains justifiant d'au moins deux ans de vie commune, des étrangers conjoints d'autres étrangers en résidence régulière au Maroc (4ans de vie commune), des enfants issus des cas susvisés, des étrangers disposant d'un contrat de travail effectif d'au moins deux ans, des étrangers justifiant de 5 ans de résidence continue au Maroc, des étrangers atteints de maladies graves. Dans des entretiens au journal Al Bayane, l'AMDH, l'ODT-syndicat des travailleurs immigrés et le Conseil des migrants subsahariens au Maroc (CCSM) reviennent sur la décision de «régularisation exceptionnelle» des migrants en situation irrégulière. Amiyeto Marcel, S.G de l'ODT-syndicat des travailleurs immigrés au Maroc «Cette décision répond à nos revendications, mais...» Nous saluons l'initiative des autorités gouvernementales marocaines concernant la régularisation des étrangers en situation irrégulière au compte de l'année 2014. Cette décision répond à nos revendications en faveur des étrangers établis au Maroc, bien que la majorité des sans-papiers ne se retrouve pas dans les critères de cette opération exceptionnelle. Mais nous demeurons optimistes en raison de cette volonté de régularisation des étrangers de la part du Royaume du Maroc. Cependant, quelques défis majeurs émergent de cette décision, notamment la période restreinte sur laquelle s'étend cette campagne de régularisation. Ce qui sous-entend que seule une poignée de migrants sera régularisée. Cette décision doit être ouverte à tout moment afin que la régularisation se déroule de manière automatique. Puisque, les portes du dialogue et des discussions avec les autorités gouvernementales nous sont ouvertes, nous espérons que cette décision profitera dans un futur très proche à tous les sans-papiers. La 2e inquiétude concerne la catégorie «travailleurs migrants» justifiant d'un contrat de travail de 2 ans. Il sera difficile pour certains travailleurs d'en disposer surtout que l'article 516 du code du travail dispose que «tout employeur désireux de recruter un salarié étranger doit obtenir une autorisation de l'autorité chargée du travail». Etant donné ce texte de loi, plusieurs employeurs ne délivrent pas de contrat de travail à leurs employés étrangers. Certains d'entre eux signent des contrats de stage qui ne permettent pas de renouveler la carte de séjour. En outre, ce critère exclut automatiquement les étrangers exerçant dans le secteur informel. Nous discuterons avec le ministre pour que les employeurs soient dépénalisés afin de délivrer des contrats de travail sans encourir une poursuite judiciaire. Par ailleurs, il existe une confusion dans le terme «régularisation de 850 réfugiés». Je crois qu'il ne s'agit pas d'une régularisation des réfugiés, car ceux-ci étaient déjà reconnus comme tels par le HCR (Haut-commissariat des réfugiés). Il ne doit pas avoir d'amalgame. Les réfugiés seront reconnus, pas régularisés. Dans le cadre de cette décision, nous avons sollicité au cours d'une réunion avec le ministre des MRE et des affaires de la migration, Anis Birou, le délégué ministériel des Droits de l'homme, El Mahjoub El Hiba et le représentant du CNDH, Abderrazak El Hannouchi, qu'il soit procédé à un moratoire du 1er au 31 décembre 2013 arrêtant les expulsions des personnes en situation irrégulière et permettant aux employeurs d'établir des contrats de travail aux étrangers. Dans ce même cadre, nous constituerons avec des chercheurs et des acteurs associatifs, un réseau d'associations et d'ONG travaillant sur la migration. Nous espérons qu'avec le nouveau ministre de l'Intérieur, Mohamed Hassad, qui a un esprit plus ouvert, et une collaboration des associations de la société civile, nous parviendrons à de meilleures clauses pour la régularisation de tous les sans-papiers au Maroc. Khadija Ainini, vice-présidente de l'Association marocaine des droits humains « Cette décision est un pas positif, mais qui demeure insuffisant» Cette décision est un pas positif, mais qui demeure insuffisant puisqu'elle contient des critères assez difficiles, surtout en ce qui concerne les catégories les plus vulnérables qui ne travaillent pas dans le formel, qui endurent des maladies atroces depuis des années ou qui ne justifient pas d'ancienneté de travail reconnue légalement. Même ceux qui ont le droit de résidence au Maroc seront confrontés à des obstacles, car certains propriétaires de maisons refusent d'établir des contrats de location à ces personnes puisqu'elles ne possèdent pas de papiers. Concernant la catégorie des travailleurs, il existe aussi quelques défis, car travailler au Maroc requiert des papiers. Pourtant, de nombreux étrangers travaillent, mais ne peuvent pas avoir de contrats de travail, puisqu'ils n'ont pas de papiers. D'autres exercent dans l'informel et ne peuvent pas non plus en disposer. Pour ce qui est des réfugiés, ceux-ci étaient déjà reconnus par le HCR, mais étaient toujours sujets à des violations des droits. L'Etat va reconnaitre le statut de 850 réfugiés en les régularisant, ce qui est limité. Les demandeurs d'asile qui avoisinent à peu près 1600 cas et qui attendent encore des réponses ne seront pas concernés par cette opération de régularisation. Suite à cette décision ministérielle, je ne crois pas que beaucoup va changer. Cette régularisation sera très limitée, car elle ne concernera pas toutes les catégories de migrants, notamment celle la plus touchée et la plus vulnérable. Toutefois, une question se pose : celle de savoir si ces personnes qui seront régularisées bénéficieront d'une réelle protection, puisque malgré la mise sur pieds d'une nouvelle politique migratoire, les mentalités n'ont pas changé. Les étrangers sont toujours victimes de répressions, de violations et de refoulement. Ce qui n'est pas un bon signe. Cette décision est un pas qu'on peut encourager afin que l'Etat puisse l'élargir au plus grand nombre de migrants vivant au Maroc, surtout les migrants en situation irrégulière et les sans- papiers, dont le nombre avancé par le ministère de l'intérieur oscillerait entre 15000 et 20 000. C'est cette catégorie qui doit être la plus concernée par la décision de régularisation. Constantin Ebanda, président du Conseil des migrants subsahariens au Maroc «Le CMSM attendait cette décision de régularisation depuis longtemps» Cette décision de régularisation des étrangers est quelque chose que le CMSM attendait depuis longtemps. Depuis sa création en 2005 à la suite des événements tragiques de Ceuta et Melilla au cours desquels sont morts de nombreux migrants cherchant à rejoindre l'Europe, notamment Espagne, nous avons fait de la lutte pour la régularisation des sans-papiers notre cheval de bataille. La décision de sa majesté du 10 septembre a été un ouff de soulagement pour nous, sauf que jusque-là nous ne connaissions pas vraiment les critères et les conditions ad hoc. Ce n'est que jeudi à l'issu de la réunion avec le ministre des MRE et des affaires de la migration, Anis Birou, le délégué interministériel des Droits de l'Homme et le représentant du CNDH que les choses se sont présentées plus clairement. Et cela m'a beaucoup satisfait. En effet, nous pensions qu'il y'avait une pléthore d'obstacles concernant cette question, mais le ministre a élucidé plusieurs points d'ombre. Concernant, les papiers justificatifs de résidence, il a fait savoir qu'une simple ordonnance médicale suffirait pour prouver la résidence au Maroc ou toute autre pièce justificative. Sachant que certaines personnes ne disposent même pas de simples pièces justificatives, il y aura une intervention des associations des migrants pour cette catégorie. L'implication des associations des migrants dans cette question de régularisation nous réjouit davantage puisque nous voulions vraiment qu'il y'ait une approche participative dans la mise au pied de cette décision. Concernant les réfugiés, leur situation était déjà régularisée du fait qu'ils étaient déjà reconnus par le HCR. Ils échappent ainsi à tous les critères avancés concernant les autres catégories. Ils seront les premiers à obtenir leurs cartes de séjour dès Janvier 2014.