Turquie-Maroc Les relations entre le Maroc et la Turquie ont toujours été frappés du sceau de l'excellence, qui confère aux deux pays un atout de taille, leur permettant de s'engager dans un partenariat stratégique privilégié, de nature à faciliter le raffermissement, encore plus fort, de leurs relations de coopération notamment dans les domaines économiques et commerciaux. Rabat et Ankara, qui ont établi leurs relations diplomatiques en 1956, ont mis en place un cadre juridique qui permet des consultations politiques bilatérales et régulières, afin d'inscrire leurs relations de coopération dans la continuité et la concordance de vue. Le volet économique est un point important dans les relations entre le Maroc et la Turquie, liés depuis janvier 2006 par un accord de libre-échange, qui a largement contribué à promouvoir les échanges commerciaux bilatéraux, bien que ces derniers restent en deçà des potentialités des deux pays. Ces échanges ont atteint, selon les statistiques de l'office des changes, quelque 6,25 milliards de dirhams, en 2010, en hausse d'environ 40% par rapport au niveau enregistré une année auparavant, soit environ 4,5 milliards. La part des échanges commerciaux avec la Turquie ne représente cependant qu'environ 1,4% du total des transactions extérieures du Maroc, avec une balance commerciale constamment déficitaire au détriment du Maroc, malgré l'existence de l'accord de libre-échange. Le déficit commercial Maroc-Turquie s'est élevé en 2010 à 1,9 milliard de dirhams, contre 2,42 milliards, selon l'Office des changes. Le Maroc exporte vers la Turquie essentiellement de l'acide phosphorique, des voitures industrielles, de la pâte à papier et des phosphates, alors qu'il en importe des «fils, barres, palplanches, profilés en fer et acier», du «fer et acier en blooms et ébauches», des voitures industrielles, des réfrigérateurs domestiques et des tracteurs et «machines et outils» agricoles. Concernant les investissements et malgré la présence au Maroc d'hommes d'affaires turcs, notamment dans les secteurs des BTP, de l'énergie, de la distribution et des pêches, le flux des investissements turcs dans le Royaume n'est pas à la hauteur des énormes opportunités d'affaires offertes par le Maroc, qui attire des investisseurs de renom venant d'autres contrées. La visite du Premier ministre turc, M. Recep Tayyip Erdogan, 3 et 4 juin au Maroc s'inscrit parfaitement dans cette logique de préparation du terrain pour que les relations économiques et commerciales prennent un nouvel élan, à travers notamment le renforcement des investissements directs turcs au Maroc et des échanges commerciaux entre les deux pays. Dans ce cadre, le chef du gouvernement turc sera accompagné d'une forte délégation d'hommes d'affaires, qui manifestent de plus en plus un intérêt particulier pour le Maroc, un pays arabe stable qui offre un modèle sain dans une région qui vit des transitions profondes sur tous les plans. Forte de plus de 300 opérateurs économiques, la mission économique turque accompagnant M. Erdogan comprend des industriels et des exportateurs représentant des secteurs aussi variés que le textile, l'agro-alimentaire, la machinerie, l'automobile, l'énergie, l'agriculture, le tourisme, les biens d'équipement et la construction. Une coopération plus accrue dans des secteurs comme l'énergie, l'agroalimentaire, les infrastructures et la construction permettra également de hisser encore plus haut les relations économiques entre le Maroc et la Turquie, deux pays qui ont tout à gagner en s'engageant dans une coopération triangulaire avec l'Afrique. Le Royaume dispose, en effet, d'une longue et riche expérience en Afrique, qui pourra intéresser la Turquie, pays qui cherche à se faire une place de choix dans le Continent noir et tirer le meilleur profit de son fort potentiel de croissance dans le cadre d'une nouvelle stratégie visant à diversifier ses partenaires commerciaux et trouver de nouveaux débouchés surtout en ses temps de crise, qui secoue l'Europe, principal partenaire aussi bien de la Turquie que du Maroc. La visite au Maroc de M. Erdogan intervient après plusieurs échanges de visites des opérateurs économiques marocains et turcs, qui, à l'occasion de chaque rencontre, répondent massivement présents et viennent explorer les opportunités d'affaires mutuellement fructueuses. Plus de 100 chefs entreprises marocains avaient fait le déplacement en janvier 2011 à Istanbul pour rencontrer environ 200 sociétés turques dans le cadre du Pont de commerce Turquie-Maroc, initié par la Confédération des hommes d'affaires et des industriels turcs (TUSKON). Aussi, le Conseil d'affaires Turquie-Maroc, créé au sein du Conseil des relations économiques extérieures (DEIK), a été réactivé et a élaboré une feuille de route qui accompagnera les hommes d'affaires des deux pays dans leur quête de marchés et d'opportunités d'investissement. Cet intérêt pour le Maroc de la part des opérateurs économiques turcs a été clairement démontré par l'Association indépendante des industriels et entrepreneurs (MUSIAD), un puissant regroupement d'industriels turcs, qui a décidé de tenir cette année dans le Royaume son Forum économique, l'international Business Forum (IBF), qui attire chaque année plus de 5.000 hommes d'affaires des quatre coins du monde. Pour sa part, l'Agence marocaine de développement des investissements (AMDI) a accompagné ce dynamisme dans les relations maroco-turques par la signature, en novembre 2011 à Istanbul, d'un mémorandum d'entente avec son homologue turque, l'ISPAT. Les initiatives officielles de ce genre se sont multipliées ces dernières années. Après la tenue en mars 2011 de la 9e commission mixte économique intergouvernementale Maroc-Turquie, le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, a effectué une visite au Maroc les 15 et 16 novembre dernier, durant laquelle il a procédé avec son homologue marocain à la signature de plusieurs accords de coopération. Il s'agit de l'accord de coopération scientifique et technologique, de l'accord relatif à la reconnaissance réciproque des permis de conduire, de l'accord de coopération dans le domaine de la pêche maritime et de l'aquaculture, du protocole de coopération dans le domaine de la jeunesse et des sports et du mémorandum d'entente entre l'Institut des standards turcs et l'Institut marocain de normalisation. M. Ahmet Davutoglu a participé également aux travaux de la 4e édition du Forum arabo-turc, organisée à Rabat, le 16 novembre 2011. Cette visite au Maroc du chef de la diplomatie turc a été aussitôt suivie par une visite officielle effectuée en mars 2012 à Ankara par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, M. Saadine El Othmani, au cours de laquelle les deux responsables ont procédé à une évaluation globale des relations de coopération bilatérale dans tous les domaines, avant de souligner avec satisfaction la concordance de vue du Maroc et de la Turquie concernant les questions régionales et internationales. Cette visite a été suivie par un déplacement en Turquie du ministre chargé des relations avec le parlement et la société civile, M. El Habib Choubani, et du ministre d'Equipement et des Transport, M. Aziz Rabbah, et de plusieurs missions parlementaires des deux chambres marocaines. Par ailleurs, le Premier ministre turc, M. Recep Tayyip Erdogan avait effectué une visite officielle dans le Royaume en mars 2005, une année après le déplacement en Turquie de M. Driss Jettou, alors Premier ministre, qui a été marquée par la signature de l'Accord de libre-échange Maroc-Turquie. Dans l'ensemble, les relations entre le Maroc et la Turquie sont sur la bonne voie et tout indique qu'elles sont promises à un avenir meilleur aussi bien sur le plan politique et diplomatique que sur celui de l'économie et du commerce. La visite du chef du gouvernement turc dans le Royaume tombe à point nommé et ne manquera pas de jeter un nouveau jalon dans le socle du partenariat stratégique privilégié qui lie les deux pays.