Rarement un tel sujet n'a été abordé dans les débats publics et le mérite revient à une équipe de chercheurs de l'Université marocaine du département de Physique d'initier ce débat dans la perspective de mettre en place des modules de formation à l'avenir. C'est ainsi que lors d'un atelier de travail organisé le 11 mai dernier à la faculté des sciences de Kénitra sur «la sécurité nucléaire dans la formation et la recherche au Maroc» les participants ont présenté tout un argumentaire scientifique dans ce sens. Tout d'abord, au Maroc, l'utilisation des sources radioactives se développe de plus en plus dans l'ensemble des secteurs socio-économiques tels que la santé, l'agriculture, la médecine, l'industrie, l'énergie et la recherche... Ensuite, le Maroc a vu, la mise en service de la première installation nucléaire à travers le réacteur de recherches TRIGA Mark II de puissance 2 mégawatts, du Centre national de l'énergie, des sciences et des techniques nucléaires (le CNESTEN) installé au CENM de la Maâmora dans la région de Kénitra. Enfin, les pouvoirs publics, par le biais de l'Office National de l'Electricité (ONE), continuent de se préparer à l'introduction de l'énergie nucléaire dans le cadre d'un programme électronucléaire, afin de pallier le déficit de ressources énergétiques et soutenir le développement du pays en répondant à ses besoins énergétiques. D'ailleurs, l'option du nucléaire est prévue à l'horizon 2025. Bien sûr, le nucléaire est souvent associé dans les esprits aux risques multiples qu'il comporte et à l'utilisation non pacifique qui pourrait en être faite. Les participants à cette journée de réflexion, en sont conscients. Comme l'a rappelé le Pr Amina Khachraf, cheville ouvrière de cette activité, «les applications pacifiques de l'énergie nucléaire et ce qu'elles promettent à l'humanité sont associées aux problèmes de prolifération des armes nucléaires. Cette association vient du fait que les matières, les connaissances et les compétences nécessaires pour fabriquer des armes nucléaires ne se distinguent pas toujours de celles qui servent à produire de l'électricité ou à faire de la recherche. De là le souci de la communauté internationale de s'assurer que l'énergie nucléaire est utilisée à des fins pacifiques et sans risques». D'où la nécessité d'un accompagnement réglementaire, technique et une politique de formation en sécurité et sûreté nucléaires afin d'assurer la protection de l'homme et de l'environnement. Pour intégrer la sécurité nucléaire dans les cursus de formation universitaire, on ne part pas de néant. Les enseignants- chercheurs concernés ont accumulé chacun de son côté une expérience suffisante non seulement sur les aspects théoriques mais également sur les aspects pratiques à travers des visites de terrain et des séjours d'étude dans quatre institutions américaines renommées en matière de sécurité nucléaire. En outre, l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA) a publié en 2010 un document sous forme de guide qui fournit le programme détaillé d'un master sécurité nucléaire et qui peut constituer une source d'inspiration. En définitive, tous les ingrédients sont réunis pour lancer ce programme de formation afin que notre pays soit en phase avec les exigences du moment et pour ne pas être pris de court et se trouver obligé de «jouer au pompier». Bien sûr, il ya tout un travail de sensibilisation à mener en parallèle à travers les média et les séminaires. Prévenir vaut mieux que guérir... *Professeur à la FSJES Rabat Agdal.