* Le dossier de la réouverture des frontières entre les deux pays doit être dissocié de la question du Sahara * Le groupe 5+5 décide d'intensifier la lutte contre le terrorisme et le crime organisé Le ministre de l'Intérieur, Mhand Laenser, a souligné mardi à Alger que «le Royaume du Maroc est animé d'une volonté sincère de promouvoir les relations avec l'Algérie». Pour y parvenir, a-t-il affirmé, il est souhaitable de dissocier le dossier de la fermeture des frontières entre les deux pays de la question du Sahara, dont le règlement est confié à l'Organisation des Nations Unies. Il faut «laisser l'ONU régler la question du Sahara», s'est-il exclamé. S'exprimant lors d'une conférence de presse conjointe des ministres ayant pris part à la 15e conférence des ministres de l'Intérieur du groupe 5+5, le ministre de l'Intérieur a précisé qu'«il n'y pas de double langage dans notre discours», insistant sur la volonté du Maroc de «promouvoir les relations avec l'Algérie, malgré le différend sur la question du Sahara». Le Maroc et l'Algérie sont unis par la «géographie, l'histoire et la lutte contre le colonialisme», a-t-il rappelé. Le ministre de l'Intérieur avait auparavant insisté dans une intervention présentée à l'ouverture de cette conférence sur la nécessité de développer une réflexion commune pour dégager une vision partagée sur la lutte contre les menaces terroristes sous toutes leurs formes. «Notre espace régional est plus que jamais menacé par la montée du phénomène terroriste. C'est pour ces raisons que nous insistons, plus que par le passé, sur la nécessité d'une réflexion commune et sur une vision partagée sur les meilleurs moyens de faire face à ces menaces multiformes», avait affirmé Laenser. Selon le ministre, les événements en cours dans la région montrent que «le risque terroriste s'inscrit désormais dans la durée, se nourrit des foyers de tension, trouve ses sources de financement dans la connexion avec les trafics de tous genres et profite du développement technologique croissant». Pour le Maroc, a dit le ministre, l'approche « de lutte contre le terrorisme doit prendre en considération cette complexité et développer notre capacité d'anticipation, d'action et de réaction». Pour la réussite d'une telle entreprise, il est nécessaire de développer l'échange d'informations opérationnelles entre les services de sécurité des pays du groupe en matière de lutte contre le terrorisme, a indiqué Laenser, qui a fait savoir que les tentatives des groupes terroristes au Mali de se doter d'une base territoriale sanctuaire montrent que ces groupes nourrissent des projets déstabilisateurs de tous les pays de la région. Dans cette optique, a-t-il dit, le Maroc appelle les pays membres de la conférence à réfléchir sur les moyens d'apporter une assistance technique aux pays du Sahel et à mettre à leur disposition les ressources et l'expertise nécessaires dans ce domaine. Le ministre a ainsi réitéré la disposition du Royaume à agir dans ce sens, dans le cadre d'une coopération triangulaire, impliquant les organisations internationales spécialisées, l'Union européenne et le Etats concernés. Evoquant la migration, le ministre a indiqué que la gestion des flux migratoires doit être pensée dans le cadre d'une stratégie globale et concertée, traitant les véritables causes du phénomène et dépassant le cadre purement sécuritaire. Cette approche est appelée à fédérer aussi bien les pays émetteurs que ceux de transit et de destination, dans le cadre d'une responsabilité partagée conforme à l'esprit de la Déclaration de la Conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement de juillet 2006, a-t-il poursuivi. «A notre sens, cette gestion passe par des partenariats profitables aux populations des pays d'origine, partenariats politiques, économiques et financiers capables de favoriser l'émergence de zones de prospérité partagée pour fixer les potentiels migrants dans leurs pays d'origine», a-t-il estimé. Le ministre a par ailleurs fait savoir que le trafic des stupéfiants constitue un «grave» problème qui appelle à la conjugaison des efforts de tous pour y faire face. Il a affirmé à ce propos que la lutte du Maroc contre le trafic de stupéfiants s'inscrit dans le cadre d'une stratégie nationale intégrée et volontariste, une «stratégie programmée dans la durée et prend en ligne de compte l'ensemble des dimensions de ce fléau. Ces efforts ont valu au Maroc une reconnaissance sur le plan international», a-t-il rappelé. Le groupe 5+5 décide d'intensifier la lutte contre le terrorisme et le crime organise A l'issue de la réunion d'Alger, note-t-on, les ministres de l'Intérieur des pays de la Méditerranée occidentale (groupe 5+5 : Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Mauritanie, Portugal, Espagne, France, Italie, Chypre) ont convenu, dans une déclaration adoptée lors de leur 15e Conférence tenue mardi à Alger, d'œuvrer en faveur d'une approche globale de lutte antiterroriste, fondée notamment sur l'Etat de droit, la justice sociale, la lutte contre la pauvreté, la prévention et le règlement des conflits. Ils ont également réitéré leur décision prise en mai 2008 lors de la conférence de Nouakchott visant la mise en place d'une stratégie commune de lutte contre le terrorisme. Les ministres de l'Intérieur ont décidé d'intensifier la coopération en matière de sécurisation des frontières, notamment à travers les échanges d'expertises, d'expériences, d'informations, d'analyse et d'évaluation ainsi que la tenue des réunions entre les points de contact et experts, l'organisation de cycles de formation spécialisée, l'assistance réciproque dans les domaines techniques, le transfert de technologies et la modernisation des systèmes de contrôle et de la sécurité des documents de voyage. Ils ont aussi convenu de renforcer davantage de l'échange des informations en rapport avec des activités terroristes entre les services de sécurité et les forces de police compétents dans le respect de la législation et la réglementation nationales, ainsi que de poursuivre la lutte contre la radicalisation, notamment à la lumière des travaux menés dans les différentes enceintes de coopération auxquelles participent les pays membres de la Conférence des ministres de l'Intérieur des pays de la Méditerranée occidentale, à l'instar de la Fondation euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures et la stratégie des Nations Unies relatives à la lutte contre le terrorisme. Les ministres ont recommandé d'unir leurs efforts en vue de lutter contre la cybercriminalité, de renforcer la coopération dans le domaine de la lutte contre le financement et le soutien logistique aux organisations terroristes et de s'interdire autant que possible et en ce qui concerne les compétences des ministres de l'Intérieur au paiement de rançons aux groupes terroristes lors des prises d'otages, afin de tarir les sources de financement du terrorisme. Les ministres ont également décidé de renforcer la coopération afin de prévenir les menaces d'origine chimique, biologique, radiologique, nucléaire et explosive, de lutter efficacement contre le trafic illicite des matières sensibles et d'atténuer les risques de terrorisme, liés à l'utilisation d'armes de destruction massive. Les recommandations portent en outre sur l'interdiction, sur la base des instruments juridiques pertinents des Nations Unies et des législations nationales, de donner refuge aux terroristes et sur l'intensification des efforts pour empêcher l'usage des médias électroniques, sans porter préjudice à la liberté d'expression, en particulier, ceux liés aux nouvelles technologies, pour faire l'apologie du terrorisme. Intensification de la lutte contre le crime organise Dans cette déclaration, les pays de la Méditerranée occidentale ont également réaffirmé leur détermination à renforcer leur coopération pour prévenir et combattre le crime organisé, à travers l'adoption d'actions de coopération entre les organes de sécurité en matière de prévention et de répression des activités liées au crime organisé et la mutualisation des ressources pour la lutte contre la criminalité transfrontalière notamment par l'organisation de patrouilles mixtes au niveau des frontières, la réalisation d'enquêtes conjointes et l'échange d'officiers de liaison, dans la limite des prérogatives des ministres de l'Intérieur. Les ministres ont recommandé pour ce faire l'échange d'informations sur les activités et les mouvements des éléments et des réseaux et filières de la criminalité organisée, leurs méthodes, moyens d'action et source de financement. Ils se sont engagés aussi à renforcer la coopération en matière de lutte contre la traite des êtres humains, notamment des femmes et des enfants, et de l'intensification de l'identification, la recherche, l'arrestation des commanditaires du crime et leurs relais, dans l'objectif de leur mise à la disposition des autorités judiciaires. Les ministres se sont décidés à poursuivre la lutte contre le trafic illicite de drogue, des substances psychotropes et des produits précurseurs par le renforcement des capacités des Etats membres, en particulier en matière de contrôle aux frontières maritimes, terrestres et aériennes. ils ont convenu aussi d'intensifier la lutte contre le trafic illicite d'armes, de munitions, d'explosifs et d'autres matières sensibles, de renforcer l'échange des méthodes d'enquêtes opérationnelles entre les pays membres en matière de suivi, de gel et de confiscation d'avoirs d'origine criminelle et de développer les dispositifs de lutte contre cette menace. Les ministres de l'Intérieur ont également convenu de l'amélioration de la sécurité des réseaux internet et la lutte contre la cybercriminalité outre la poursuite de la lutte contre le phénomène du trafic et la contrefaçon de biens culturels et d'œuvres d'art. Respecter les droits des immigres Ils ont adopté, mardi à Alger, une série de mesures en matière de circulation des personnes, de migration, de protection civile et de coopération entre les collectivités locales. Ils ont en effet réaffirmé leur conviction de la nécessité du traitement de la question migratoire dans le cadre d'une approche globale, concertée et équilibrée consacrée dans les précédentes réunions ainsi que dans les instances régionales et internationales traitant de la migration. Dans la déclaration d'Alger, les ministres de l'Intérieur se sont engagés à respecter les droits légitimes des migrants légaux, à appuyer les efforts de développement dans les pays de la rive sud de la Méditerranée et à renforcer la lutte contre les réseaux liés aux migrations irrégulières à travers l'échange d'informations utiles sur leur mode opératoire et la coopération bilatérale en matière de réadmission, afin d'assurer un meilleur contrôle aux frontières. Ils ont également convenu de mettre en place des mécanismes techniques de coopération opérationnelle, sur le plan bilatéral, en tant que moyen pour consolider la sécurité régionale, de promouvoir la coopération technique et le partage des informations et du savoir-faire, notamment en matière de sécurisation des titres de voyage et de faciliter les procédures de délivrance des visas au profit des ressortissants des pays de deux rives. S'agissant de la coopération dans le domaine de la protection civile, les ministres ont convenu de la mise en place d'une stratégie commune pour la réduction des risques et la gestion des catastrophes naturelles et d'origine humaines, ainsi que l'organisation d'exercices pratiques de recherche, de sauvetage et de gestion des urgences. Pour ce faire, ils ont décidé d'intensifier les échanges d'informations sur l'utilisation des innovations technologiques les plus récentes appliquées à la protection civile concernant les systèmes d'information géographique, la cartographie du risque et l'utilisation de l'imagerie satellitaire pour l'évaluation de la réponse aux catastrophes. Les ministres ont souligné dans le même ordre d'idées l'importance de la coopération décentralisée en tant que facteur d'échange et de développement des deux rives de la méditerranée. Ils se sont engagés dans ce cadre à encourager la coopération transfrontalière dans le respect des spécificités nationales et à promouvoir l'échange d'expériences et de bonnes pratiques dans les différents modes de gestion des villes.