Ennahda sur la sellette La Tunisie enterrera aujourd'hui, dans des funérailles où la grande foule sera certainement au rendez-vous, l'avocat et homme politique Chokri Belaid, assassiné deux jours auparavant devant son domicile et à l'intérieur de son véhicule par des extrémistes islamistes. Un assassinat qui a soulevé une vaste réprobation internationale, surtout en Europe et au Maghreb. Les funérailles d'aujourd'hui risquent fort de se dérouler dans un climat de tensions politiques, d'autant qu'une journée de grève générale risque de paralyser le pays tout entier. En attendant, le mouvement islamiste, majoritaire au sein de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et du gouvernement actuel, a été pointé du doigt par plusieurs partis politiques locaux - de gauche et du centre -, mais aussi par de nombreux manifestants qui, depuis deux jours, dénoncent dans toutes les grandes villes du pays ce qu'ils appellent la violence de la «dictature religieuse». Un ras-le-bol parfaitement compréhensible, quand on sait que du temps de la dictature de Ben Ali, on arrêtait, emprisonnait et torturait certes à tout bout de champ les opposants politiques de tous bords, mais nul n'a jamais eu le culot de les assassiner en pleine rue et en plein jour pour avoir exprimé librement leurs idées. Une méthode terroriste s'il en est, caractéristiques des extrémistes religieux dont la seule manière de dialoguer est d'étaler dans le sang leur capacité violente de nuisance. Autrement dit, un terrorisme politique et à visage découvert que les forces vives tunisiennes condamnent unanimement aujourd'hui, avec un soutien international sans faille, particulièrement en Europe et au Maghreb. C'est dans ce cadre que le Maroc, par la voix de son ministère des Affaires étrangères et de la coopération a «vigoureusement » condamné l'assassinat de Chokri Belaid, le qualifiant d'«acte terroriste dangereux et sans précédent dans la Tunisie de la Révolution», tout en exprimant son «rejet de la violence et de l'assassinat politiques, quels qu'en soient l'origine». Il faut dire que, malheureusement, en Tunisie, et depuis la chute de la dictature benalienne, les artistes et journalistes mais aussi les tenanciers de galeries d'arts, de bars et restaurants, les chaînes de télévision et les radios sont devenus la cible quotidienne des nouveaux tenants de la dictature religieuse. Et, qui plus est, d'une frange qui n'a en rien contribué ni à l'éclatement de la Révolution du Jasmin ni à sa réussite historique. Ces ouailes de la dernière heure ont même eu l'outrecuidance de dresser une longue liste de personnalités tunisiennes à abattre, car accusées de gauchisme et/ou de laïcité. C'est ce que vient de confirmer hier Ahmed Nejib Chebbi, président du haut comité politique du parti Républicain tunisien, qui a déclaré que son nom figurait «sur une liste de personnalités à assassiner», mais que lui au moins bénéficie de la protection officielle du ministère de l'Intérieur. Ce dernier est au courant de cette liste établie par les commandos de la Ligue de la protection de la Révolution, une milice d'Ennahda, composée pour l'essentiel des sbires de l'ancien système benalien ! Condoléances du PPS Le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) s'incline devant la mémoire du regretté Belaid Chokri, assassiné lâchement et froidement suite à son opposition déterminée aux forces obscurantistes. La douleur ressentie après la mort de ce militant des Droits humains et de la justice sociale sera le moteur de la lutte de l'ensemble des démocrates et des patriotes afin d'établir les fondements d'un Etat national et démocratique en Tunisie. Le parti du Progrès et du Socialisme présente ses condoléances les plus attristées à l'ensemble de la famille de Chokri Belaid, comme à l'ensemble du peuple tunisien. M. Labraimi