Au delà du style des uns et des autres; il apparaît, de plus en plus clairement, que deux approches politiques semblent se mesurer dans l'arène politique nationale: l'une prônant la continuité du processus de transition démocratique initié depuis les années soixante-dix du siècle dernier, l'autre prenant acte de son «décrochement», au sens géologique du terme, après les élections du 25 novembre 2011, et voudrait à sa manière le rétablir dans ce qu'elle croit être la bonne direction. Pour les uns, la situation politique actuelle du Maroc s'est constituée par le cumul d'un certain nombre d'actions entreprises en leur temps pour assurer la transition démocratique, dépasser les effets des «années de plomb» et consolider la stabilité du pays. Cela devrait inciter, en ce moment, l'ensemble des partenaires politiques à aller de l'avant dans la réforme afin d'édifier une société moderne, démocratique et juste. Cela ne signifie aucunement que l'ensemble des acteurs du champ politique partagent la même vision ou la même appréciation ou analyse de l'ensemble des affaires publiques mais qu'un «minimum» est établi pour constituer la plate-forme gouvernementale dont le respect et la promotion s'imposent à tous. La majorité ainsi constituée devrait s'atteler à dépasser les «états d'âme» pour assumer sa responsabilité et l'opposition devrait servir le pays par ses critiques et aussi ses propositions. Cela d'autant plus, qu'une réforme constitutionnelle s'est effectuée et que la consultation populaire l'a concrétisée en respectant le fonds et la forme et en ouvrant des perspectives pour la mise en place d'une politique autrement structurée que par le passé. Pour les autres, l'échec du fumeux «G8» lors des dernières élections législatives et la constitution du gouvernement Benkirane constitue un «accident» dont il faut s'en sortir au plus vite en plombant l'action gouvernementale par une faconde sur les compétences qui font défaut aux uns, leurs nouvelles responsabilités partisanes et leurs adéquations avec les fonctions ministérielles, et l'arithmétique du partage en lorgnant sur des ministères pour rétablir ce qu'ils estiment être «l'eau de leur visage» et rester «bien logés et en bonne santé». On se trouve loin du respect de l'intérêt national et du développement du consensus nécessaire à la mise en œuvre des conditions politiques pour le Maroc du futur. La mise en œuvre des lois organiques prévues par la constitution, la réforme fiscale, la juste répartition des richesses et le combat contre la pauvreté et l'exclusion (qu'il s'agisse des personnes ou des territoires), l'approche genre dans tous les domaines, l'éducation, la santé, l'emploi, le logement et la culture pour tous, la consolidation des libertés individuelles et collectives, l'état de droit, la protection de notre environnement, tout cela et d'autres chantiers nécessaires à notre développement économique et social ne peuvent souffrir de l'attentisme frileux du gotha politique au détriment de l'immense majorité de notre peuple qui vit son calvaire, chacun dans son «Golgotha». La crise multiforme qui sévit dans la région doit inciter les Marocaines et les Marocains à plus de ferveur dans la recherche du consensus indispensable à la conduite du changement dans la sérénité pour l'établissement, dans le respect de nos fondamentaux, de l'Etat national, démocratique et moderne et préserver notre pays de l'infantilisme printanier et l'obscurantisme dévastateur. La nuisance n'a jamais constituée une politique; elle est à celle-ci ce que le racket est au commerce. Autrement dit; si la démocratie est un combat quotidien, il ne peut aboutir que par le peuple et pour le peuple, loin des calculs politiciens où les vessies sont prises pour des lanternes. Faut-il le rappeler que c'est notre loi électorale, notre constitution, qui ont fait que le gouvernement actuel s'est constitué. Ils se trompent ceux qui croient que le «décrochement» s'effacera suite à leurs manigances faussement stratégiques, au moment même où sa base lui reste fidèle et s'agrandit. Ceux qui souffrent, et ceux qui souffrent car d'autres souffrent, veulent que le changement aboutisse afin qu'ils vivent dans la dignité et la prospérité. C'est dans l'expression de leur droit de vote qu'ils l'ont fait. A chacun de savoir raison garder.