La détermination et l'interprétation de ce qu'est la loi et de ce qu'est le règlement résultent en totalité du contenu du texte constitutionnel. Ainsi, et selon la tradition constitutionnaliste marocaine, on peut dégager une définition initiale et approximative, qui a donc besoin d'être précisée, selon laquelle la loi est un texte normatif voté par le parlement, tandis que le règlement est un acte décrété par le gouvernement. En outre, l'article 72 de la nouvelle Charte fondamentale, qui dispose que «Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi appartiennent au domaine réglementaire», donne au règlement une compétence générale, dès lors que la loi jouit d'une compétence d'attribution, puisque les matières y relevant sont limitativement inventoriées, par le texte constitutionnel lui même. Si les Lois fondamentales antérieures, dont celle de 1996, assignaient à la loi un champ de compétence limité, alors qu'elles attribuaient aux titulaires du pouvoir exécutif une compétence de droit commun, dans le cadre de l'édiction réglementaire, la nouvelle Constitution du 29 juillet 2011, bien que fidèle à ce principe, élargit considérablement le domaine de la loi, qui passe de dix matières à plus de 30. Plus de matières appartiennent ainsi au domaine de la loi, et relèvent donc obligatoirement du vote du parlement, ce qui participe clairement à en renforcer les pouvoirs et à en étendre le champ d'action. Il n'existe donc en ce domaine aucune soumission de l'exécutif au pouvoir législatif, en termes de hiérarchie des normes, puisque le premier ne permet pas uniquement d'encadrer l'application des textes de loi, issus du vote du parlement, mais également et en toute autonomie, d'exercer le pouvoir réglementaire, en dehors des champs relevant de la loi. Sur ce fondement, il est donc possible pour le pouvoir exécutif d'édicter des règlements sans qu'il n'y ait de loi précise à exécuter. Ainsi il existe au Maroc un pouvoir réglementaire autonome, qui ne se limite pas à la simple application des textes législatifs, votés par le parlement, mais relève des matières n'appartenant pas au domaine de la loi. Rappelons tout de même que le pouvoir réglementaire, dont le pouvoir réglementaire autonome, appartient conjointement au roi et au chef du gouvernement, et que celui-ci est par définition le pouvoir dont disposent les autorités exécutives de prendre des actes juridiques exécutoires, comprenant des dispositions générales et impersonnelles, et ce, de manière unilatérale, et donc sans l'accord de ceux auxquels s'applique le règlement. L'originalité de la nouvelle Constitution marocaine ne concerne cependant pas le pouvoir réglementaire autonome en lui-même, mais bel et bien sa répartition entre les deux branches de l'exécutif, qui, contrairement aux pratiques en vigueur dans certains Etats, est constitutionnellement déterminée. Ainsi, deux articles distincts de la Constitution énumèrent les matières réglementaires autonomes relevant d'une part, du Conseil des ministres et donc du roi, et d'autre part du Conseil du gouvernement, et donc du chef du gouvernement. De cette manière, il existe également une distribution réelle des prérogatives réglementaires autonomes entre le chef de l'Etat et le chef du gouvernement, qui procède d'une redistribution équilibrée des pouvoirs opérée par la nouvelle Constitution du pays. *(Créé en 2004 à Rabat, le Centre d'Etudes Internationales (CEI) est un groupe de réflexion indépendant, intervenant dans les thématiques nationales fondamentales, à l'instar de celle afférente au conflit du Sahara occidental marocain. La conflictualité structurant la zone sahélo-maghrébine constitue également l'une de ses préoccupations majeures. Outre ses revues libellées, «Etudes Stratégiques sur le Sahara » et «La Lettre du Sud Marocain », le CEI initie et coordonne régulièrement des ouvrages collectifs portant sur ses domaines de prédilection. Sous sa direction ont donc été publiés, auprès des éditions Karthala, «Une décennie de réformes au Maroc (1999-2009)» (décembre 2009), « Maroc-Algérie : Analyses croisées d'un voisinage hostile » (janvier 2011) et « Le différend saharien devant l'Organisation des Nations Unies » (septembre 2011). En avril 2012, le CEI a rendu public un nouveau collectif titré, «La Constitution marocaine de 2011 – Analyses et commentaires». Edité chez la LGDJ, ce livre associe d'éminents juristes marocains et étrangers à l'examen de la nouvelle Charte fondamentale du royaume.