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Endogénéité des connaissances et structure de la recherche
Publié dans Albayane le 23 - 05 - 2012

Aborder les problèmes que soulève la recherche en sciences économiques, pour l'ensemble des pays faisant partie de ce qu'on appelle le Tiers Monde n'est pas une tâche aisée. Et d'abord à cause de la grande diversité des situations concrètes existant dans les différents pays, en liaison avec leur degré de dépendance vis-à-vis
de l'extérieur, le niveau de transformation de leurs structures économiques internes (notamment le niveau d'industrialisation atteint), l'ancienneté plus ou moins grande de leur accession à leur souveraineté politique, le caractère des liens établis ou non entre les institutions universitaires et l'environnement socio-économique, etc.
Ainsi, pour situer cette diversité, on peut relever une assez nette différence, à l'heure actuelle, entre l'état auquel est parvenue la recherche socio-économique dans beaucoup de pays latino-américains, qui est loin d'être négligeable en termes quantitatifs et qualitatifs, et la grande pauvreté dans laquelle elle se débat dans bon nombre de pays arabes et africains. A cette différence correspond certes une explication d'ordre historique, qui est l'ancienneté des indépendances latino-américaines et donc de l'implantation d'institutions universitaires nationales, mais elle est à chercher aussi dans une plus grande diversification des structures économiques latino-américaines, comparées à celles des pays arabes et africains, créant une «demande de la recherche» de la part d'instances publiques et privées, et des conditions relativement plus favorables à son développement. Dans un monde où l'information a acquis une importance décisive au point de devenir un vecteur essentiel de la dynamique du capital dans les grands pays industrialisés qui la monopolisent de plus en plus, étant donné l'énormité de leurs moyens, l'information économique sous toutes ses formes est appelée à jouer un rôle de plus en plus marquant. Cela est plus vrai encore s'agissant de sociétés dont la connaissance propre qu'elles ont d'elles-mêmes et sur elles-mêmes demeure très limitée... Le champ de la recherche économique et sociale appelée à satisfaire les besoins de la connaissance et de l'information est encore en grande partie en friche et commande la mise en œuvre de grands moyens ainsi que la mobilisation de véritables armées de chercheurs. Pour s'en tenir aux besoins du secteur public (planification, mise en œuvre de politiques économique, sociale et culturelle, évaluation de l'impact de ces politiques sur l'économie et la société, etc.), la demande potentielle qui devrait être satisfaite par la recherche socio-économique est énorme et requiert la définition d'une politique de la recherche repensée en fonction des données de l'expérience. Si l'objectif historique des sociétés du Tiers Monde doit être la maîtrise de leur développement, entendu comme un processus cumulatif et continu de croissance des forces productives, englobant l'ensemble de l'économie et de la population, à la suite de mutations profondes permettant l'émergence de forces et de mécanismes internes d'accumulation et de progrès, la voie donnant accès à cette maîtrise passe nécessairement par une stratégie de la recherche en général, et de la recherche économique en particulier.
Des entraves et blocages de nature diverse
La concrétisation d'une telle vision se heurte à des entraves et blocages divers, que nous allons tenter de citer de façon aussi précise que possible.
Dans l'environnement
Si, au niveau de la plupart des universitaires, l'acuité du problème de la recherche économique est généralement ressentie, il n'en est pas de même du côté des «décideurs» : pouvoirs publics, responsables d'offices et d'entreprises publiques, dirigeants d'entreprises privées, etc. Ces «décideurs», engagés dans les problèmes de la gestion quotidienne, n'éprouvent pas le besoin de se doter de « cellules de réflexion» à même de les aider à définir une politique à long terme, et utilisant des travaux de recherche d'un certain niveau. Dans plusieurs cas, aux prises avec un problème d'une certaine importance, ils préféreront «commander» une étude auprès d'une société étrangère avec tous les inconvénients que cela comporte : faible connaissance des réalités locales, «non-engagement d'apparence techniciste», difficulté d'utilisation de l'étude dans la mesure où des nationaux n'y ont pas été associés dès le départ, coût financier élevé, etc. La logique de la dépendance se manifeste également dans un domaine où elle pourrait être battue en brèche à peu de frais. Le comble du paradoxe est atteint lorsque certaines de ces sociétés d'étude étrangères se contentent d'exploiter des sources et travaux déjà réalisés par des nationaux, et de les « resservir » sous une autre enveloppe aux commanditaires. La grave sous-estimation de l'importance de la recherche économique par les « décideurs » ne se traduit pas seulement par un comportement d'indifférence de leur part à l'égard des impératifs du développement de la recherche nationale, mais elle aboutit très souvent dans la pratique à une attitude de méfiance et de rétention systématique de l'information économique et de la documentation. Une telle situation, poussée à l'extrême, risque d'aboutir à une véritable asphyxie de la recherche nationale, qui se verrait de plus en plus marginalisée parce que n'ayant pas de points d'appui sur le concret, sur les réalités et la pratique économiques et sociales. Non seulement la dépendance se perpétue dans ce domaine, mais aussi le contenu de l'enseignement supérieur, qui doit être une pépinière de chercheurs, ne peut s'enrichir et se renouveler par l'apport de la recherche, ce qui crée un grave cercle vicieux. Dans de telles conditions, les flux de connaissances et de théories en provenance de l'extérieur fonctionnent à sens unique, de façon asymétrique, confortés par des maisons d'édition prestigieuses, sans que souvent le débat puisse s'engager autour de ces travaux, en vue d'en développer une appréciation critique.
Dans la formation des «candidats-chercheurs»
En plus des obstacles que nous avons tenté d'identifier plus haut, il y a également la responsabilité du contenu et des méthodes d'enseignement des sciences économiques. Très souvent, il s'agit d'un enseignement qui fait une large place au «cours dicté», présenté de façon dogmatique, dont la sanction principale est un examen périodique, basé en grande partie sur la mémorisation. Les programmes et les manuels utilisés sont principalement branchés sur des théories et politiques s'inspirant des problèmes des pays industrialisés, plus spécialement des pays capitalistes industrialisés. Qu'il s'agisse de l'histoire économique ou de la pensée économique, de la théorie de la firme, de la répartition, de la monnaie, des problèmes de croissance ou de relations économiques internationales, l'éclairage théorique principal et sa conceptualisation leur sont intimement liés. On constate ainsi un hiatus très grave entre la masse des connaissances répercutées sur les étudiants et le vécu économique et social de ces mêmes étudiants, dont la réflexion autonome risque d'être bloquée par une accumulation de connaissances livresques. Bien souvent, la relation entre ces connaissances et leur environnement économique, social et culturel n'est pas perçue.
Les programmes universitaires d'enseignement de l'économie, souvent copiés sans discernement sur ceux des universités occidentales, et basés sur les mêmes manuels, comportent parfois une partie relative à l'analyse des problèmes du «sous-développement» et du développement. L'organisation de cet enseignement, en liaison avec l'objectif de parvenir à une formation adéquate de cadres, et à l'enrichissement du potentiel de réflexion et de recherche du pays, soulève plusieurs questions. Lorsqu'on examine les manuels et la littérature consacrés aux problèmes du «sous-développement», les thèmes les plus fréquents qu'on peut repérer sont : cercle vicieux de la pauvreté, absence d'entrepreneurs, rôle des innovations et du progrès technique, existence d'un chômage massif, déséquilibre entre épargne et investissement, etc. Ces thèmes, débouchant sur des propositions de politiques économiques et sur l'élaboration de modèles de croissance, résultent le plus souvent d'une transposition d'instruments d'analyse empruntés à des théories qui, à l'origine, étaient étrangères aux problèmes du « sous-développement ». Depuis A. Smith jusqu'à Schumpeter s'était élaborée une théorie du développement, mais cette théorie était en fait consacrée au seul développement d'un petit groupe de pays occidentaux en cours d'industrialisation. A partir de la fin du XIXe siècle sont apparues des études visant spécialement les pays colonisés. Certains auteurs (à la suite notamment de Leroy-Beaulieu) se sont interrogés sur la rentabilité des possessions coloniales pour les métropoles, d'autres (après Hobson) ont analysé la colonisation, et plus généralement l'impérialisme, comme une tare du développement capitaliste. Dans les deux cas, il y avait une certaine description des économies dominées, mais le principal objet de l'analyse restait la situation des pays avancés (défense de la rationalité de la colonisation ou au contraire explication de la survie du capitalisme et mise en relief de ses effets néfastes). Ainsi, jusqu'à une époque récente, l'existence des pays «sous-développés» dans l'analyse économique n'était intégrée que par le biais des relations qu'entretenaient avec eux les pays développés.
A l'issue de la seconde guerre mondiale et en liaison avec l'émancipation des peuples du Tiers Monde, les études consacrées au «sous-développement» vont se multiplier. Les premières, partant d'une dénonciation de la misère et de la faim, mettent l'accent sur le manque de capitaux, l'absence d'esprit d'entreprise, la non-réalisation du plein-emploi ; par la suite, l'axe se déplace-vers une certaine description des phénomènes concrets et la reconnaissance du caractère spécifique de la situation de «sous-développement» ; enfin, à partir dés années 6o, divers auteurs, partant du bilan de quelques expériences locales, ont tenté d'élaborer des politiques de développement qui seraient spécifiques des pays «sous-développés». Le rappel de ces tendances générales décelables dans l'évolution de la littérature consacrée au «sous-développement» était nécessaire pour mettre en relief un problème fondamental dans le domaine qui nous préoccupe : celui d'un décalage historique considérable entre théories générales et connaissances concrètes. Certains économistes considèrent que la théorie économique existante peut rendre compte de façon valable et satisfaisante du phénomène du «sous-développement». L'analyse de celui-ci est intégrée dans les théories existantes, et les économistes des pays développés proposent le transfert de leurs expériences et de leurs techniques de développement dans les pays en développement, en s'efforçant de démontrer que l'appareil théorique qu'ils utilisent reste valable (moyennant parfois certaines adaptations). D'autres auteurs, prônant le rejet de la «théorie économique traditionnelle», ont critiqué cette attitude et considèrent que seule une théorie nouvelle, fondée «sur une recherche de science sociale empirique, étendue et approfondie», peut expliquer l'originalité du phénomène'. Dans l'immense documentation aujourd'hui disponible sur les problèmes du sous-développement, les considérations purement théoriques ne sont pas très fréquentes; et beaucoup d'auteurs se sont attachés plutôt à la description des phénomènes et à la définition des politiques. L'objet et la méthode d'analyse sont souvent très mal cernés. La démarche critériologique fréquemment adoptée souffre de nombreuses - faiblesses dans sa tentative de représenter un phénomène réel complexe, dont les éléments (économiques et non économiques, sociologiques, culturels et politiques) sont profondément imbriqués, par un nombre limité de caractères isolés. La simple juxtaposition de données baptisées «critères» n'est pas satisfaisante, d'autant plus que ces critères s'appliquent à des objets très différents' : mesure du niveau de vie matériel et du genre de vie (type de consommation, logement, etc.) ; mesure dé quantités globales ou leur valeur moyenne par habitant (revenu, capital, épargne, investissement) ; mesure de certains phénomènes structurels (population employée dans l'agriculture, «chômage déguisé», structure des exportations et des importations) ; représentation approximative d'un phénomène qualitatif par des indices quantitatifs imparfaits (le degré de mécanisation par la consommation d'énergie mécanique, l'importance et le degré d'organisation du marché par le volume du commerce par habitant).
Ce qui est présenté comme «caractéristiques» du sous-développement par différents auteurs ne constitue très souvent que la réunion sous ce vocable de trois espèces différentes : des données statistiques, des observations générales et des conclusions d'analyse 3. Les données statistiques utilisées comme base de la critériologie (revenu, épargne, capital, commerce, consommation, taux d'analphabétisme, rendements agricoles, etc.) non seulement sont souvent contestables quant à leur exactitude 4, mais, présentées sous formes de moyennes nationales, elles risquent de masquer davantage les réalités, notamment l'hétérogénéité des modes et des rapports de production, la profondeur du fossé entre les classes sociales, les formes d'extraversion et de dépendance de l'économie, etc. Les jugements de valeur portés à partir de critères passés sous silence se présentent sous forme d'«observations générales», dont la signification est bien imprécise : pauvreté, faiblesse, arriération, etc. Certaines conclusions se présentent également comme un troisième type de critères, par exemple le « chômage déguisé dans l'agriculture », mais ce critère suppose une définition nouvelle du chômage déguisé, différente de celle des pays capitalistes industrialisés, définition qui est tributaire d'une analyse approfondie des modes et rapports de production prévalant dans l'agriculture, de leur évolution historique, du fonctionnement du secteur «tertiaire», etc. De même, présenter l' «utilisation irrationnelle du capital» comme un critère valable n'est possible qu'à partir d'une analyse théorique des formes d'articulation du capital international et du capital local, et d'une vision théorique de l'orientation optimale des investissements en économie sous-développée.
La méthode empirique, présentée comme une garantie d'objectivité, se résout en une liste de critères établis par des économistes originaires des pays occidentaux développés, qui leur ont donné la forme d'un catalogue des principales différences observées par rapport à leurs pays d'origine 5. Mais, d'une part, la juxtaposition de critères ne permet pas d'analyser les liens de causalité, d'interférence et d'interdépendance qui les unissent, et, d'autre part, le choix des critères suppose chez l'auteur une certaine conception du sous-développement, un ensemble d'hypothèses préalables, souvent implicites 6.
Ce type d'approches a été critiqué par divers auteurs qui ont cherché à élaborer une formulation théorique des causes du sous-développement dans un cadre historique et structurel permettant d'en cerner les mécanismes fondamentaux, notamment l'échange inégal et la dépendance, qui aideraient à définir les vecteurs principaux de stratégies de développement efficaces 7. L'apport de ces auteurs à une meilleure connaissance et conceptualisation du «sous-développement» est indéniable, et il a marqué toute une génération d'économistes. Toutefois, certaines de leurs formulations ou hypothèses générales demandent à être vérifiées, la dimension sociale et historique n'est pas toujours correctement intégrée dans l'analyse, les stratégies de développement proposées ou suggérées restent trop vagues et non opérationnelles. Si l'on s'achemine vers une analyse théorique et une conceptualisation capables de rendre compte de l'extrême complexité du phénomène de «sous-développement» et des problèmes de développement, il faut reconnaître que, d'un point de vue scientifique, nous n'en sommes encore qu'aux débuts de cette analyse fondamentale, alors que, d'un point de vue politique, ces problèmes se projettent de plus en plus sur la scène historique contemporaine. Cet état et ces contradictions dans le procès d'analyse et de connaissance des sociétés du Tiers Monde se reflètent évidemment sur le profil de formation de nos étudiants et chercheurs. Ils conditionnent leurs propres capacités d'analyse et de progression intellectuelle et ils conduisent surtout à une réflexion critique permettant d'entrevoir et d'agir sur les axes de déblocage, en vue de mieux définir la perspective méthodologique et théorique de la recherche.
L'absence d'enseignement de l'histoire sociale et culturelle
Dans les programmes actuels et les manuels couramment utilisés, la liaison entre l'enseignement des sciences économiques et l'histoire sociale et culturelle de nos sociétés est très souvent absente, ou bien elle fait seulement une apparition quelquefois timide dans un cours d'histoire des faits économiques, ou dans un autre consacré à la genèse et la; formation du « sous-développement ». On ne soulignera jamais assez l'importance de l'enseignement et de la recherche dans le domaine de l'histoire économique, sociale et culturelle des pays du Tiers Monde, où existe jusqu'à maintenant un « trou immense» qui ne peut être comblé que par un travail considérable mettant en œuvre l'apport d'historiens, de sociologues, d'économistes, etc. Il s'agit de reconstituer par l'analyse socio-historique les structures et les institutions socio-économiques de leur passé, d'étudier le procès de leur déstructuration-transformation jusqu'au stade actuel, d'identifier les séquelles des modes de production antérieurs dans les structures actuelles, et leurs imbrications avec les nouvelles formes de production, sans perdre de vue les relations entre «base économique» et «superstructure» de la société, notamment le contenu et l'évolution des valeurs éthiques et culturelles.
Déséquilibre dans l'orientation de la recherche
Un déséquilibre flagrant apparaît dans l'orientation de la recherche et des connaissances produites (chiffrées ou non) concernant les économies du Tiers Monde : la polarisation sur le secteur dit moderne. Cette polarisation n'est pas due seulement au fait que ce secteur apparaît comme «commandant» le développement de toute l'économie, à cause de la structure même de la dépendance, mais elle relève d'autres causes, notamment la faible «sensibilisation historico-économique» des chercheurs. Tout ce qui relève des séquelles des modes de production antérieurs et de leur fonction actuelle dans la formation sociale est scientifiquement mal perçu et comme marginalisé par la pensée économique, même s'il ne l'est pas dans la réalité économique 8. De ce fait le secteur pseudo traditionnel est très peu connu et analysé, seules les «résistances» qu'il offre à la «modernisation» sont quelquefois répétées en termes généraux et technicistes, ce qui ne permet pas d'avancer beaucoup non seulement dans l'identification des véritables freins 9, mais aussi dans l'élaboration et la formulation de pratiques adéquates permettant de dépasser ces contradictions. L'économie de la petite production marchande artisanale, des secteurs agricoles non capitalistes, des relations entre villes et campagnes, entre secteur moderne et secteur pseudo traditionnel, les structures sociales et formes de production et d'intégration des secteurs non capitalistes ou semi-capitalistes, l'économie des bidonvilles, etc., ne bénéficient pas d'un attrait particulier de la part des chercheurs nationaux, bien que souvent la majorité de la population y soit regroupée. Certes les recherches portant sur ce qu'on nomme le secteur moderne sont apparemment plus faciles ; il y a toujours un minimum de documentation disponible et de statistiques plus ou moins aisément exploitables. La recherche concernant des thèmes tendant à une meilleure connaissance des réalités et des problèmes du secteur dit moderne (croissance des produits, formes de la dépendance par le commerce extérieur, la technologie, les investissements, effets des investissements, formes et problèmes de l'industrialisation, etc.) avance quelque peu, bien qu'elle puisse achopper sur des blocages déjà signalés, et sur des difficultés tenant à la conception des techniques quantitatives de connaissance économique, actuellement utilisées dans beaucoup de pays.
Les lacunes des techniques quantitatives
A cause de leur caractère trop global, les techniques actuelles de comptabilité nationale ne permettent pas de cerner facilement des aspects importants de la réalité économique : il en est ainsi par exemple de l'important problème de la répartition des revenus ; par ailleurs, dans les pays où le secteur public joue un rôle important et parfois décisif par ses dépenses, ses investissements, ses entreprises, la population active qu'il emploie, etc., son impact réel et précis sur les diverses branches et activités ne peut être cerné avec suffisamment de précision. Le développement de la recherche sur l'économie des secteurs pseudo traditionnels se heurte à des difficultés objectives : les informations chiffrées ne sont pas très fréquentes, et, pour pouvoir les obtenir, il faut souvent procéder à des enquêtes ; celles-ci ne sont pas faciles à réaliser dans des milieux sociaux peu préparés, de par leur mentalité, à comprendre l'utilité de répondre à des questions d'ordre socio-économique, et qui opposent spontanément une attitude de méfiance à ce genre d'investigation. Mais aussi, la progression de ce type de recherche - absolument indispensable si l'on veut avancer dans la connaissance économique - est entravée par le problème de la communication entre chercheurs et populations ; en d'autres termes, le profil de la formation des étudiants et chercheurs, auquel nous avons fait allusion plus haut, ne les prépare pas à des formes de communication avec les populations des secteurs pseudo-traditionnels, dont ils ne comprennent pas les mentalités, la psychologie sociale, la vision du monde, et qui utilisent un langage propre, bien différent de celui des universitaires. L'apprentissage des techniques de l'enquête doit intégrer une initiation à la psychologie sociale des milieux enquêtés, et une «médiation» entre le langage des universitaires et celui des milieux populaires.
Réagir contre l'étroite spécialisation
L'étroite spécialisation instituée dans l'enseignement économique est à remettre en cause dans le profil de formation des étudiants à tous les niveaux. En d'autres termes, il faut réintégrer l'analyse des réalités socio-économiques dans l ensemble de la totalité sociale, en s'attachant à dégager les interférences entre facteurs économiques et non économiques 10. Le fil conducteur principal à l'élaboration des programmes d'enseignement des sciences économiques doit prendre en considération le fait central que toute formation sociale «sous-développée» constitue une totalité en mouvement, au sein de laquelle se tissent ou se défont des séries de relations dialectiques entre la « base économique» de la société et sa «superstructure». Le problème global du développement étant essentiellement un problème de changement social, il est important de comprendre ces relations, leur entrelacement, leur rôle dans le maintien du «sous-développement» ou au contraire dans la création des moyens capables de l'éliminer. Ce qui implique le recours à des méthodes d'approche et d'analyse globalisantes, c'est-à-dire à la fois socio-économiques, socioculturelles, sociopolitiques, psychosociologiques, etc.
- Non seulement une large place doit être accordée à l'étude de l'histoire économique et sociale de ces pays, à une initiation aux disciplines de la sociologie et leur application aux sociétés en question, mais un effort particulier doit être poursuivi dans deux directions (qui définissent également des axes de recherche) : L'éthique économique des religions dominantes. Ainsi, par exemple, dans les pays arabo-musulmans, il ne saurait être permis aux économistes travaillant sur ces pays d'ignorer l'éthique économique de l'Islam, qui, malgré la pénétration capitaliste, reste encore présente d'une certaine façon, au moins dans les secteurs pseudo traditionnels. La proposition acquiert une acuité particulière à un moment où des projets de société, dans certains pays musulmans, prétendent se réclamer de l'éthique économique de l'Islam. L'histoire des techniques et du développement de la pensée technologique dans les pays du Tiers Monde. Il y a là un vaste champ de recherche, encore très peu abordé”, qui permettrait de prendre une plus juste mesure des voies et moyens du dépassement de la dépendance technologique actuelle dont souffrent ces pays.
Intégrer l'apport des penseurs du passé
La présentation de l'histoire de la naissance et du développement mondial de la pensée économique et sociale doit également être revue et corrigée, en vue d'y intégrer l'apport propre et original de penseurs originaires de ces pays.
Il est hautement significatif que tous les manuels d'histoire de la pensée économique publiés en Occident ignorent systématiquement l'apport souvent génial de certains de ces penseurs. Il en est ainsi, par exemple de celui d'Ibn Khaldoun 12, grand penseur arabe et maghrébin-du XIVe siècle, considéré actuellement par de nombreux historiens comme un précurseur de génie des sciences sociales modernes. L'intérêt d'intégrer l'apport de penseurs comme Ibn Khaldoun dans les enseignements de sciences sociales, dans les pays de civilisation arabe, est double : d'un côté, cela permet de réagir contre certaines formes d'aliénation culturelle, malheureusement trop répandues dans - les milieux intellectuels et universitaires de ces pays, et, de l'autre, de stimuler une réflexion et une recherche créatrices et autonomes sur leur propre histoire économique, sociale et culturelle, en partant des acquis produits par leur civilisation, combinés à une relecture critique de l'histoire façonnée par la civilisation occidentale.
Endogénéité des connaissances et structure de la recherche : Historiciser l'enseignement des théories économiques
La nécessité de relativiser et d'historiciser l'enseignement des théories économiques apparaît de plus en plus comme une précaution importante. . Ce qui implique la démonstration des liaisons qui unissent ces théories à l'environnement social, idéologico-culturel et économique-qui les a vu naître, et le développement d'une approche critique qui permette de distinguer entre les acquis éventuels qu'elles contiennent et les insuffisances et limites qu'elles comportent. Beaucoup plus que l'enseignement des théories proprement dites 13, il s'agirait de parvenir à la mise à nu des fondements méthodologiques des démarches d'analyse présentées, qui permettent de tester leur capacité de rendre compte des réalités économiques et sociales complexes des pays du Tiers Monde et de fournir des éléments théoriques d'appui à l'élaboration de stratégies opérationnelles de développement.
La nécessaire réévaluation des politiques de développement
La crise des politiques de développement appliquées dans la plupart de ces pays depuis vingt à trente ans mériterait une analyse particulière, qui ne saurait être conduite seulement en termes économiques, telle que, par exemple, la démarche qui tente d'établir une liaison mécanique entre les taux de croissance du produit global et l'investissement pensé en termes financiers ou physiques. L'aggravation indéniable de la situation économique et sociale dans beaucoup de pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine - du fait notamment des retombées que provoque sur eux la crise actuelle du capitalisme - rend de plus en plus difficile la poursuite des schémas et politiques de croissance qu'ils ont engagés depuis une vingtaine d'années,--et qui les conduisent à une certaine forme d'impasse. D'où l'exigence d'une réévaluation de ces politiques, à travers leurs résultats et leurs implications économiques, sociales, politiques et culturelles.
Il y a là, en puissance, un vaste programme de recherches, susceptible de mobiliser les capacités et les ambitions de nombreux intellectuels et chercheurs de ces pays, qui seraient appelés à disséquer les expériences de développement entamées jusqu'ici dans divers - pays, et d'en analyser minutieusement les effets économiques, sociaux et culturels. Un tel travail devrait être sous-tendu par la volonté de mettre en relief les capacités internes de développement et les conditions générales à remplir qui faciliteraient leur émergence et leur affirmation. Cette investigation permettrait de faire apparaître les principales failles des stratégies actuelles, notamment au niveau des relations entre les politiques de santé, d'éducation et de formation, et le système productif, des facteurs de «dynamisation» des populations des secteurs pseudo traditionnels, des voies et moyens de dépassement de la dépendance technologique, des canaux susceptibles d'encourager le sens de l'initiative au lieu et place de l'inhibition, des liens entre productivité du travail, motivation des producteurs et environnement social, etc. Mais tout cela demeure conditionné par une prise de conscience de la part des acteurs actuels et potentiels de cette recherche socio-économique, ce qui renvoie encore une fois au profil de leur formation, à la conception des programmes universitaires d'enseignement -et de recherche.
Les précautions relatives à l'outil mathématique et statistique
Nous avons précédemment fourni un certain nombre d'éléments qui nous paraissent essentiels dans la révision du profil des étudiants-chercheurs. Il s'agit maintenant d'attirer l'attention sur l'usage de l'outil mathématique et statistique dans le domaine qui nous préoccupe. L'utilité de cet outil dans les sciences économiques est incontestable et peut enrichir la connaissance, mais à condition que son usage soit entouré de précautions concernant les degrés d'exactitude possibles, les dangers des extrapolations abusives de tendances, les limites des modèles macro-économiques intégrant uniquement des variables quantitatives, l'immunisation à l'en-contre de la « mécanique des quantités globales », etc. La formation statistique des chercheurs peut être utilement renfor¬cée par l'apprentissage de l'utilisation de la statistique multidimensionnelle et la prise de conscience de l'importance des indicateurs socio-économiques. La statistique multidimensionnelle a pris de l'importance durant les dernières années, tant dans les sciences exactes que dans les sciences humaines. Elle permet de synthétiser l'information contenue dans des tableaux volumineux de données. Le point commun des méthodes relevant de l'analyse des données (analyse de correspondances, classification automatique, analyse en composantes principales) est l'absence de toute hypothèse à priori dans leur démarche. D'un autre côté, les éléments sur lesquels porte l'analyse sont saisis au niveau de tous les descripteurs qui les caractérisent, aucun descripteur n'étant privilégié au détriment d'un autre. A côté d'aspects positifs, la comptabilité nationale comporte un défaut grave qui est celui d'agréger les informations, ce qui diminue leur potentiel : elle ne permet pas de faire ressortir la diversité qui existe entre les branches et les secteurs, les régions, les catégories sociales. L'orientation trop économique des informations fournies produit la description d'une situation souvent différente des conditions sociales réelles. Ainsi une forte croissance économique annuelle, en termes de produit, peut s'accompagner d'une aggravation dans le niveau de vie d'une partie de la population, ce qui n'apparaîtra pas dans les résultats annuels. Les indicateurs socio-économiques doivent permettre de réagir contre une telle orientation. Leur étude en est encore à ses débuts, malgré les travaux entrepris dans un certain nombre de pays, ainsi que par l'Organisation des Nations Unies, l'Unesco, le BIT, l'OMS et d'autres institutions- internationales. Ils permettent d'acquérir une vision plus humaine et plus dynamique du développement, en éclairant des domaines tels que la santé, l'habitat et l'urbanisme, la répartition et les niveaux de vie, le degré d'adaptation au changement, la femme et le développement, le niveau de participation populaire, etc. La planification du développement économique et social pourra prendre un autre sens si elle arrive à intégrer une batterie suffisamment significative d'indicateurs socio-économiques 14. L'initiation à la recherche devrait commencer à se faire au niveau du 2e cycle. Elle pourrait prendre diverses formes permettant de réagir contre une conception figée et dogmatique de l'enseignement. Un simple changement des programmes dans le sens que nous avons indiqué plus haut ne suffirait pas, s'il n'était accompagné d'une refonte profonde des méthodes pédagogiques tendant à stimuler la réflexion personnelle de l'étudiant. Par exemple, à ce niveau, le profil de la formation des étudiants devrait comporter obligatoirement la pratique de petites enquêtes, préparées et réalisées en groupe, destinées à les tremper dans leur environnement socio-économique, et les entraînant à tester la validité des connaissances acquises.
Pour un financement autonome de la recherche
Mais les handicaps que nous avons énumérés et qui entravent le développement de la recherche socio-économique dans cette partie du monde ne sont malheureusement pas les seuls. On ne peut faire abstraction du poids écrasant des sociétés d'études étrangères qui-accaparent souvent l'essentiel des commandes passées par l'administration et les entreprises publiques. Ce poids n'est pas dû seulement au fait que ces sociétés d'études seraient mieux outillées que des universitaires nationaux pour mener à bien ces recherches - ce qui reste à prouver dans beaucoup de cas - mais aussi au peu de confiance que manifestent souvent les pouvoirs locaux envers les chercheurs nationaux, pour des raisons essentiellement politiques. Tout cela entraîne comme conséquence le fait qu'un financement autonome de la recherche universitaire ne peut naître et se développer. II en découle que la publication de travaux de recherche universitaire de qualité ne peut souvent se faire faute de moyens. Pour surmonter ce handicap, une solution possible pourrait être l'encouragement de centres de recherche autonomes, regroupant des universitaires et non-universitaires, capables de conclure des contrats leur permettant d'acquérir des moyens financiers, afin de pouvoir lancer leurs propres programmes de recherches et leurs propres publications. Ces centres autonomes contribueraient à alimenter les universités, dont les programmes et les méthodes pourraient ainsi être rénovés par un apport neuf et enrichissant, qui représenterait pour elles un sang nouveau dont le besoin n'est contesté par personne.
La confrontation et l'échange entre chercheurs du Tiers Monde
On ne saurait sous-estimer non plus l'effet négatif de l'ignorance dans laquelle se trouvent les chercheurs appartenant aux différents pays du Tiers Monde concernant les travaux et les conclusions auxquels ils parviennent dans différents domaines. L'information sur ces questions circule très peu entre eux, et encore moins la confrontation et l'échange d'idées et d'opinions ; pourtant l'organisation de cette information et de cette confrontation, par exemple à travers des centres relais, ne manquerait pas de stimuler le développement et la rigueur de cette recherche, qui prendrait véritablement sa dimension collective. La mise sur pied de tels centres relais pourrait être grandement facilitée par l'aide de certaines organisations internationales comme l'Unesco.
Notes
1. En particulier Gunnar Myrdal dans Théorie économique et pays sous-développés, p. 117-123 et 185-190, Paris, Presses universitaires de France, 1968.
2. J. Freyssinet, Le concept de sous-développement, p. 15-18, Paris/La Haye, Mouton, 1966.
3. Benjamin Higgins, Economic development, p. t 3 et suiv., éd. rév., New York, N.Y, W. W. Norton Inc., 1968.
4. Gunnar Myrdal, dans Procès de la croissance à contre-courant, affirme son scepticisme quant à l'exactitude de nombreuses statistiques de pays sous-développés (Paris, Pres¬ses universitaires de France, 1978, traduit de l'américain).
5. Le caractère relatif de ces critères est marqué par le vocabulaire employé : «fort», «faible», «insuffisant», «défectueux», «inadapté», etc. Ces adjectifs soulignent non pas les caractères essentiels des espaces sous-développés, mais ce qui les différencie le plus visiblement des espaces développés.
6. «Bien entendu, le fait qu'un auteur considère ou non quelque chose comme une caractéristique, dépendra en partie de sa conception du problème des zones
Endogénéité des connaissances et structure de la recherche arriérées.» H. Leibenstein, Economic backwardness and economic growth, p. 39, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1964.
7. Dans cette lignée, on peut situer notamment les travaux de Samir Amin («L'accumulation à l'échelle mondiale, critique de la théorie du sous-développement», Anthro-pos, 2e éd., Paris, IFAN, Dakar, 1977), d'A. Emmanuel (L'échange inégal, Paris, Maspéro, 1966), d'A. G. Franck (Capitalisme et sous-développement en Amérique latine, Paris, Maspéro, 1964).
8. Il y a, bien sûr, les formes de «marginalisation» (et surtout d'exploitation indirecte de la force de travail) des secteurs pseudo traditionnels par le secteur moderne capitaliste, mais leur «marginalisation intellectuelle» chez beaucoup d'économistes dépasse de loin ce qui existe dans la réalité.
9. Qui sont moins techniques que sociaux nature des structures sociales et des rapports de production, moyens de transformation disponibles) et culturels (analphabétisme, perception aliénante de la culture occidentale, etc.).
10. Voir A. Belal, Développement et facteurs non économiques, Rabat, Editions Smer, 198o.
11. Si l'on excepté le monumental travail du savant anglais G. Needam sur-l'histoire des techniques dans la Chine ancienne.
12. Ibn Khaldoun (1332-1406). Né à Tunis, il passa la plus grande partie de sa vie au Maghreb. Auteur d'ouvrages sur l'histoire de l'Afrique du Nord, et surtout de la Mou¬qaddima ou «Prolégomènes», œuvre monumentale dans laquelle il s'affirma comme le précurseur des sciences sociales modernes (histoire, sociologie, économie polique, etc.). En langue française, on peut consulter la traduction de la Mouqaddima par V. Monteil (Paris, Presses universitaires de France, 1953). Voir également G. Bousquet, Les textes économiques et sociologiques de la Mouqaddima, Editions Rivière, 1960. Sur les aspects économiques de la pensée khaldounienne, voir A. Belal, «La pensée économi-que d'Ibn Khaldoun», Bulletin économique et social du Maroc, Rabat n°108, 1977.
13. Dont souvent un des défauts majeurs est constitué par une vision euro-centriste ou occidento-centriste du mouvement socio-historique.
14. Voir A. Cherkaoui, Indicateurs socio-économiques du Maroc, Casablanca, 198o.
Article paru dans un ouvrage collectif intitulé “Sciences économiques et développement endogène” publié par l'UNESCO en 1986


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