Dans un suivi, le weekend dernier par Al Bayane, des meetings électoraux en Espagne, la politique extérieure n'a pas eu le moindre espace dans les discours exaltés des leaders du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE - majorité sortante), Alfredo Perez Rubalcaba, et du Parti populaire (PP - opposition de droite majoritaire), Mariano Rajoy. Les deux dirigeants paraissent avoir signé un pacte de ne pas mentionner les relations avec les pays voisins, l'immigration ou les menaces d'une récession économique européenne. Pourtant, l'Espagne ne peut se permettre de vivre isolée du reste du monde ni les deux candidats à la présidence du futur gouvernement d'ignorer les contentieux en suspens avec le Maroc, pays avec lequel les échanges économiques et humains sont en nette croissance. A l'approche du jour de vote, le 20 novembre, les préoccupations des deux candidats paraissent diamétralement opposées. Rubalcaba est confronté au défi de rééditer les bons résultats du PSOE lors des deux dernières élections générales (2004 et 2008). Son programme demeure toutefois plombé par une série de statistiques défavorables. Il est appelé à faire des propositions pour remédier que l'Espagne cesse d'être le malade de l'Union Européenne et lutter contre le chômage qui affecte près de 22% de la population active. Son obsession est de mobiliser à l'extrême l'électorat de la gauche et inciter les indécis à appuyer sa candidature. En face, Rajoy se trouve dans une situation confortable accompagnée des favorables sondages d'opinion et des médias, dont la majorité est propriété de la droite conservatrice et de l'église. Les résultats des baromètres, publiés dans la presse du dimanche, le plébiscitent comme futur président de gouvernement et accordent en même temps la majorité absolue au PP. Dans leurs meetings, Rubalcaba et Rajoy ont ressassé les mêmes slogans qui vont dans le sens de la persuasion d'un public déjà acquis à leur cause. Pourtant, aussi bien durant le mandat du conservateur José Maria Aznar (1996-2004) que celui du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero (2004-2001), aucun des grands contentieux avec le Maroc n'a été résolu. D'ailleurs, le royaume avait dû retirer à deux reprises son ambassadeur à Madrid (Baraka en octobre 2001 et Azziman en novembre 2007) pour manifester son mécontentement pour le traitement réservé en Espagne à l'égard de certaines questions touchant sa souveraineté territoriale. De nombreux contentieux sont encore en suspens que le futur gouvernement, sorti des urnes le 20 novembre, devra aborder avec extrêmement d'habileté. Le futur des villes de Sebta et Melilla, la délimitation des espaces maritimes et l'attitude de la classe politique et de la société civile espagnoles à l'égard de la question du Sahara sont des thèmes récurrents de l'agenda diplomatique. L'Espagne, asphyxiée par une crise économique et une saturation du secteur immobilier est appelée à prospecter à l'extérieur de nouvelles opportunités pour son entreprise. A ce titre, le marché marocain, en plein essor, pourrait se convertir en un espace idoine pour la délocalisation d'une partie des activités des grandes entreprises espagnoles en crise. Les deux candidats devaient, en fait, faire des propositions plus concrètes en vue de sensibiliser l'opinion publique espagnole à l'importance de développer une relation stable et mutuellement bénéfique avec le voisin du sud. Ceci passe inéluctablement par la solution des conflits bilatéraux, la création d'un climat sain d'entente et l'éradication de tous les motifs de tension. A cinq jours du jour du scrutin, les deux candidats sont appelés à faire des propositions qui vont dans le sens d'assainir les rapports entre le Maroc et l'Espagne, promouvoir l'idée de création d'une zone de complémentarité économique en Méditerranée Occidentale et collaborer dans la mission d'éliminer de la mémoire collective les faux préjugés et stéréotypes collés aux marocains. Le collectif marocain en Espagne, fort de 822.000 membres en situation légale, dont 205.000 affiliés à la Sécurité Sociale, constitue soit en tant que force de travail soit en tant que consommateur une indéniable ressource pour l'économie espagnole. D'autant plus, sur les cinq millions de chômeurs en Espagne, plus d'un million et demi sont des étrangers (33%), dont près de 250.000 sont marocains. La population immigrante qui réside, consomme et paie des impôts en Espagne, mérite qu'elle soit parmi les priorités des programmes électoraux des deux grands partis politiques. Les meetings des deux leaders se résument en un perpétuel échange d'accusations, de répliques et en une rhétorique destinée à complaire les militants et sympathisants. Les grands problèmes du monde ont eu en réalité une incidence sur l'économie espagnole. De nombreux pays tentent de trouver une solution à leur crise dans un cadre régional, comme c'est le cas en Amérique Latine ou dans l'Europe du Nord. Dans ce contexte, les deux candidats à la présidence du gouvernement devaient se compromettre à instaurer un climat de confiance permanent dans les relations avec le Maroc, et, rassurer le collectif des immigrés, qui a contribué à la création de la prospérité et à richesse durant le boom économique, que son avenir les préoccupe au même titre que celui des autochtones.