A trois semaines des élections générales du 20 novembre en Espagne, la question de l'emploi continue de meubler les discours politiques, les statistiques officielles nationales et les rapports de conjecture européens. La situation de l'emploi est devenue préoccupante et pèse sur les positions à prendre aussi bien en Espagne que dans l'Union Européenne (UE). Avec la publication, la semaine dernière, des résultats de l'Enquête sur la Population Active (EPA) du troisième trimestre faisant état de près de cinq millions de chômeurs, le panorama global du marché du travail invite à une réflexion multiple. Aucun remède du gouvernement socialiste n'a servi pour stopper la saignée du tissu industriel et ramener le chômage à un taux tolérable et proche de la moyenne européenne. Après l'annonce des résultats de l'EPA, jeudi dernier, qui ont été commentés avec énormément de scepticisme dans les milieux sociaux et politiques, l'Eurostat, l'office de la statistique de l'UE, vient de diffuser le bilan de l'emploi en septembre. La lecture de ce rapport mensuel corrobore la mauvaise conjoncture que traverse le marché du travail en Espagne avec un taux de chômage de 22,6%, soit plus que le double de la moyenne en UE qui est de 10,2%. En août dernier, le taux de chômage était inférieur à celui de septembre de 0,4 % en Espagne, ce qui démontre les difficultés de récupération qu'affronte le marché du travail en Espagne. Aussi bien les données de l'EPA que celles de l'Eurostat invitent à une sérieuse réflexion sur l'avenir de la politique de l'emploi à quelques jours de changement de gouvernement. Au cas où un gouvernement de droite, dirigé par le Parti Populaire, accède au pouvoir, la question de l'emploi sera abordée de manière différente avec davantage de mesures restrictives privilégiant la position du patronat qui aspire à une souplesse dans les processus de licenciements et moins de prestations sociales. Conscient de cette dramatique situation et de son héritage comme président de gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero a reconnu, dimanche, publiquement qu'il est « le principal responsable » du chômage dans son pays. Déplorant les « mauvaises données » du marché du travail et « le désespoir » que ressentent tous ceux qui ont perdu leur emploi, Zapatero a expliqué qu'il avait tenté de maintenir, par le biais des drastiques mesures adoptées, les niveaux de protection sociale « jusqu'aux limites de notre capacité économique ». Le chômage en Espagne n'est pas sélectif mais affecte toutes les catégories de travailleurs y compris ceux qui ne bénéficient pas de couverture sociale en cas de perte d'emploi, tels les autonomes. Pourtant, les dernières statistiques rendues publiques, lundi par la Fédération Nationale des Associations de Travailleurs Autonomes (ATA) signalent que 88.100 autonomes ont cessé leur activité au 1 er semestre. Ces données révèlent que l'Espagne demeure en retard sur les autres pays qui connaissent des taux de croissance du nombre de travailleurs telles la Suisse (plus 5%), l'Allemagne (plus 4 %), l'Autriche (2,4% ou la France (1,1%). En ce qui concerne les autonomes, le taux de croissance moyenne en UE se situe à 0,3% au 1 er semestre alors qu'en Espagne leur nombre a baissé de 6%, soit 60.500 entrepreneurs de moins, selon les statistiques européennes. Enfin, dans sa dernière étude intitulée “rapport sur le travail dans le monde 2011”, l'Organisation Internationale du Travail (OIT) a recommandé à l'Espagne l'application d'un “plan de choc” pour améliorer les perspectives d'emploi des jeunes, dont 45% sont en chômage. A la lumière de ces rapports de conjoncture, les partis politiques en Espagne seront obligés, dans leur campagne électorale, de modifier leur agenda et affronter avec sérénité et transparence les défis de la triple crise économique, financière et de l'emploi. Ce dernier demeure le principal élément de l'équation de la récupération de l'économie.