La montée en force des compagnies Low-cost, après l'accord de l'Open Sky signé fin 2005 avec l'UE, a mis à l'épreuve le groupe Royal Air Maroc face au défi d'opérer un redéploiement stratégique sans précédent qui a engagé sa survie même. Cinq ans après, la RAM semble plutôt bien partie pour gagner le pari de la compétitivité induite par la nouvelle donne. Avec l'ouverture du ciel aux opérateurs européens, la compagnie nationale devait gérer la transition vers un environnement d'âpre concurrence, accentuée par la crise économique mondiale et les fluctuations du prix de carburant. Elle s'est vue ainsi contrainte d'opérer un nouveau positionnement marketing à travers un recentrage sur le client et une politique tarifaire plus agressive. Depuis, la compagnie a engrangé d'importantes avancées en termes de satisfaction de la clientèle et de conformité aux standards internationaux, comme l'avait affirmé son PDG, Driss Benhima, lors d'une réunion de la commission des finances à la Chambre des représentants. Les résultats ne se sont pas fait attendre: La RAM est parvenue à se tailler le rang de première compagnie de transport aérien à l'échelle du Maghreb et la 2ème place sur le plan du continent africain, derrière la South African Airways. En même temps, le Maroc a continué à affûter ses atouts de proximité du marché européen et de position de leader en Afrique. C'est ainsi que l'aéroport de Casablanca est devenu le premier hub de l'Afrique de l'ouest et le 3ème à l'échelle internationale, en termes de transport des voyageurs entre l'Afrique et l'Europe, après les aéroports de Charles de Gaulle et de Londres. Redéploiement stratégique sur fond d'ouverture du ciel Plaçant très haut la barre de ses ambitions, la compagnie s'est fixée comme axes prioritaires de sa nouvelle orientation d'améliorer la ponctualité pour la ramener aux meilleurs standards internationaux à 82 pc en 2015, et de porter ainsi le taux de satisfaction global de 85 pc en 2009 à 90 pc en 2015. Dans le même souci d'amélioration de la qualité des prestations, le groupe a investi dans un véritable centre de contrô_le des opérations pour coordonner et faciliter la réactivité en temps réel de la machine opérationnelle RAM. A cet effet, l'accent a été mis sur la révision des processus liés au traitement de la chaîne client au sol à travers une meilleure organisation des métiers d'exploitation aéroportuaire et la création d'un comité ponctualité regroupant l'ensemble des intervenants dans cette chaîne. Dans ce contexte, Royal Air Maroc a créé "Atlas Blue", compagnie conçue sur le modèle Low-cost, dans l'optique de contribuer de manière significative à la fluidification des flux touristiques. Atlas Blue dispose aujourd'hui d'une part de marché qui dépasse les 30 pc du trafic touristique vers le Maroc et représente l'outil à bas coûts de la RAM, permettant d'offrir des tarifs très abordables. Elle porte en elle le futur du groupe dans la bataille des lignes régulières entre l'Europe et le Maroc. L'ouverture du ciel n'a donc fait que conforter la compagnie dans ses stratégies d'expansion sur le moyen et long termes. L'extension de la flotte n'a en effet pas cessé, passant de 30 avions en 2002 à 45 avions en 2007 et 60 aujourd'hui. De surcroît, de nouveaux marchés hors aérien se sont ouverts pour les activités annexes de la RAM dans la maintenance des appareils et la réparation des moteurs, dans l'assistance au sol des appareils de la soixantaine d'autres compagnies desservant le Maroc ainsi que dans la fourniture de repas à bord. La filiale hôtelière de la RAM, Atlas Hospitality, n'est pas en reste puisqu'elle occupe le deuxième rang dans son secteur avec 11 hôtels, grâce à la croissance du tourisme, intimement liée à la libéralisation du secteur aérien. Dans ce nouvel environnement en pleine mutation, la RAM demeure très concentrée sur l'analyse de ses performances opérationnelles et commerciales "ligne par ligne", et adopte une tactique de réponse "au coup par coup", indique-t-on auprès de la compagnie. Elle reste tout aussi attachée à sa stratégie moyen et long termes avec en perspective l'ouverture de six nouvelles lignes sur l'Afrique par an. Dans l'optique de se doter tous les moyens d'affronter la concurrence acerbe et de rationaliser sa gestion, elle a entrepris un plan de redressement et de développement prévoyant le départ de 1.560 salariés sur 4.600 pour la période 2011-2013, en leur accordant nombre d'avantages d'un commun accord avec les partenaires sociaux. Cette démarche, indique le patron de la RAM, est censé ouvrir la voie à une série d'initiatives portant entre autres sur la recherche d'un partenaire stratégique, l'amélioration du service sur les destinations africaines, la suppression des liaisons non rentables qui entrainent 57 pc des pertes, la filialisation de l'école de formation des pilotes et le recentrage de la RAM sur son cœur de métier. La stratégie de développement structurel de l'aérien est fortifiée par une composante industrielle solide, avec l'émergence de l'aéronautique comme l'un des métiers mondiaux du Maroc, érigé en créneau prometteur du Plan Emergence. L'industrie aéronautique marocaine, qui compte près de 90 entreprises de référence internationale et un effectif de près de 9.000 emplois qualifiés, peut se targuer d'une chaîne logistique couvrant la quasi-totalité des métiers du secteur, de la tôlerie à la maintenance, en passant par le câblage, la fabrication des nacelles, les composants électroniques, le traitement de surface, la fonderie et la mécanique de précision. "Le Royaume est incontestablement en position compétitive favorable par rapport à ses concurrents, grâce à cette dynamique de haute technicité", se réjouit Hamid Benbrahim El Andaloussi, président du Groupement des industriels marocains aéronautique et spatial (GIMAS), cité par le portail spécialisé www.aeronautique.ma. C'est un secteur dont les perspectives de croissance annuelle sont de 20 pc et où les investissements se sont fortement accrus au cours de ces dernières années. Les opérateurs EADS, Boeing, Snecma, Aircelle, Creuzet, Daher, Souriau, Labinal, Zodiac, Teuchos, Casablanca Aéronautique et Le Piston Français sont déjà présents au Maroc. L'ambition est d'atteindre 15.000 emplois à l'horizon 2015 et 23.000 en 2020. Pour concrétiser ces ambitions, le Maroc a connu ces derniers mois deux événements majeurs qui marquent un nouveau tournant dans l'industrie aéronautique Marocaine: le lancement des travaux d'aménagement de MidParc Casablanca Free Zone, plateforme industrielle dernière génération dédiée à l'aéronautique, et l'inauguration de l'Institut des métiers de l'aéronautique. La capacité d'accueil de MidParc, Casablanca-Nouaceur Free Zone est d'environ 300 unités sur 125 hectares. "Notre business model part du constat que l'investisseur international se concentre sur son cœur de métier, la technologie et les marchés. Et pour gagner en compétitive, il a besoin de co-localiser une partie de sa production dans une zone offshore. MidParc lui offre ainsi la possibilité d'une implantation rapide dans un grand standard de qualité, à moindres coûts", indique M. El Andaloussi, également président de MidParc. Pas loin de MidParc, l'Institut des métiers de l'aéronautique a été inauguré pour former 300 à 400 jeunes par an avec l'ambition d'atteindre 800 lauréats par an à l'horizon 2015. Outre le volet technique, l'institut dispensera des formations dans les domaines annexes aux métiers de l'aéronautique, notamment les achats, la qualité, la logistique, l'ingénierie, la gestion et le management industriel. C'est dire que le Maroc mise beaucoup sur le secteur aéronautique et spatial dans le cadre de son Plan national pour l'émergence industrielle qui couvre la période 2009-2015. L'ambition est de doubler sur cette période la taille du secteur grâce au développement d'activités de sous-traitance ou de maintenance en partenariat avec les groupes étrangers.